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L'affaire de l'esclave Furcy

L'affaire de l'esclave Furcy

Titel: L'affaire de l'esclave Furcy Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Mohammed Aïssaoui
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Par
moments, le militaire faisait preuve de faiblesse quand il avait
face à lui le procureur général, ce qui avait le don d’agacer
Desbassayns... Après la menace du général Lafitte, Sully-Brunet abdiqua et
dit qu’il acceptait de partir à Saint-Benoît dans la semaine.
Mais cela ne suffit pas. Avec l’aide de la police, Desbassayns
de Richemont ordonna à Sully-Brunet de quitter Saint-Denis à
6 heures du soir. Il lui restait une demi-heure pour s’exécuter...
Le jeune substitut éprouvait de la honte à être traité ainsi. Enragé, écœuré, furieux à cause du coup d’éclat de Boucher, Desbassayns se réfugia dans son bureau et décida d’expédier une lettre urgente au ministre de la Marine et des Colonies qui était en route pour Paris. L’affaire continuait de faire
du bruit à Bourbon et pouvait risquer de « contaminer » l’île. Il
termina par ces quelques mots : Pour donner plus d’éclat à sa démarche, Gilbert Boucher
attendit la séance solennelle du tribunal d’instance et un nombreux auditoire attiré par l’affaire. Ainsi, ce magistrat qui,
dans cette circonstance solennelle, devait prêcher le respect
aux lois a transformé le palais de justice en une assemblée de
trop fameuse mémoire où l’on discutait tous les actes de l’autorité et où le public recevait des leçons d’insubordination et de
révolte, qui s’opposaient au vœu de la loi ! Je ne crains point de le dire, M. Gilbert Boucher est le véritable auteur de la rébellion de Furcy ; c’est lui qui a fabriqué
les écrits séditieux présentés au nom de l’esclave et de sa sœur,
lui qui était le pivot de toute cette machination. Le principal
coupable peut-il rester impuni ? M. Boucher d’ailleurs a donné
à sa conduite un nouveau degré de culpabilité en outrageant
ma personne et l’autorité du roi par les calomnies les plus
absurdes et les plus atroces, il vient en outre de saper l’autorité jusque dans ses bases par son discours incendiaire au tribunal. Enfin, il s’est mis en forfaiture en requérant que l’ordonnance des administrateurs ne soit point enregistrée. Puis, n’y tenant plus, il ajouta ces deux phrases : Son substitut, Jacques Sully-Brunet est un petit intrigant,
sans expérience ni compétence, qui par son origine, se rattache à la classe des gens de couleur puisque sa trisaïeule
était une Malgache. Le procureur général Boucher a un penchant détestable : il est proche des dernières classes de la
société et éloigné de ceux qui tiennent un rang dans le monde,
ceux qui sont considérés et fortunés. Votre très humble et très obéissant serviteur. Desbassayns de Richemont.

16
    Desbassayns de Richemont se tenait toujours debout, et
obligeait Constance à rester assise. Il avait convoqué chez lui, dans son habitation, Adolphe
Duperrier et la sœur de Furcy afin de les pousser à avouer que
toute cette histoire avait été montée par Gilbert Boucher. Pour
tenter de les piéger, il interrogeait séparément Constance et
son cousin Adolphe. Il les avait fait venir. Le colon n’avait
qu’un objectif : la sœur de Furcy et son cousin devaient dire
clairement, voire l’écrire, que Gilbert Boucher était le véritable instigateur de l’affaire. Constance avait essayé d’éviter de se rendre chez Desbassayns, et lui avait fait savoir qu’elle était malade et dans
l’impossibilité de se déplacer car elle habitait Saint-André, au
lieu-dit le Champ Borne, à près de trente kilomètres de Saint-Denis. Qu’à cela ne tienne, Desbassayns mobiliserait les autorités ; Constance devait venir à Saint-Denis coûte que coûte. Il
se produisit alors une scène incroyable. Desbassayns ordonna
au maire de Saint-André de faire transporter Constance en
palanquin, tenu par quatre noirs jusqu’à l’habitation. Elle
arriva à Saint-Denis à 5 heures du matin, après une nuit de
voyage et accompagnée de gardes de police. L’image étaitétonnante ; vue de loin, on ne savait pas si la sœur de Furcy
était une prisonnière ou une notable. Adolphe fut également obligé de se rendre à l’habitation du
colon. Que ces deux personnes libres soient détenues contre
leur gré n’eut pas l’air de gêner Desbassayns. Il s’autorisait
tous les droits. Il gardait toujours son calme. Au fond, il n’en
voulait ni à Constance ni à Adolphe. Pour lui, ils étaient juste
deux pions qui allaient lui servir à abattre le procureur général.
Il ne les jugeait pas assez

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