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L'affaire Nicolas le Floch

Titel: L'affaire Nicolas le Floch Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jean-François Parot
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Au cours de la chasse, La Borde était demeuré muet. Le roi n'avait pas quitté sa voiture, se plaignant d'avoir froid en dépit de la douceur du temps. Il avait mauvais visage et souffrait de l'état de ses gencives, que son dentiste venait d'examiner quelques jours auparavant. Nicolas avait dormi dans l'appartement du premier valet de chambre. Le lendemain, de retour vers trois heures de relevée au Petit Trianon, il apprit que le roi s'était trouvé souffrant, avait pris quelques remèdes anodins sans ressentir de soulagement et, après avoir fait sa partie, s'était couché, comptant sur le sommeil pour dissiper son malaise.
    En attendant les nouvelles, La Borde et Nicolas se promenaient dans le petit jardin à la française qui prolongeait les serres chaudes dans lesquelles le roi tentait d'acclimater le caféier, le figuier et l'ananas. Ils approchaient du petit pavillon de Gabriel où le roi s'arrêtait souvent pour classer ses herbiers ou pour prendre une collation de laitage et de fraises. Soudain, le commissaire s'immobilisa à la vue d'une silhouette en haut des degrés du pavillon. Il n'en croyait pas ses yeux. Naganda 61 était là qui le considérait en souriant.
    M. de La Borde les abandonna à l'émotion des retrouvailles. Ils ne s'étaient pas revus depuis l'été 1770, quand Nicolas avait accompagné le jeune chef mic-mac à Nantes, où il s'était embarqué pour le Canada. Ils évoquèrent leurs souvenirs communs et l'Indien prit des nouvelles de Bourdeau et de Semacgus. Il conta dans quelles conditions il avait recueilli l'héritage de son père à la tête des siens. Il expliqua ensuite que l'abondance des renseignements recueillis dans les tribus, mais également auprès des colons américains, avaient conduit les bureaux de Versailles à souhaiter qu'il vînt tout expliquer de vive voix, et, notamment les esquisses cartographiques et les relevés stratégiques qu'il avait pu dresser. Un bateau de pêche, trompant la croisière anglaise, l'avait secrètement récupéré sur les bords du Saint-Laurent et mené à Saint-Pierre-et-Miquelon, où un vaisseau du roi l'attendait. Il montra avec fierté à Nicolas l'uniforme d'officier dont il était revêtu. Il compléta enfin le tableau de la situation américaine que celui-ci connaissait déjà par sa conversation récente avec le dauphin. Son séjour serait bref. Il devait être reçu par le roi et le ministre de la Marine, et reprendrait aussitôt la mer muni de nouvelles instructions. Il logeait à Versailles, à l'hôtel de la Belle Image, place Dauphine. Nicolas lui suggéra de l'accompagner à Paris, M. de Noblecourt ayant toujours regretté de n'avoir point rencontré « l'homme du Nouveau Monde ». Leur conversation fut interrompue par un officier qui venait rechercher le chef indien, et par La Borde, qui, une fois Naganda éloigné, s'ouvrit à Nicolas de ce qu'il venait d'apprendre.
    — Le roi a passé une très mauvaise nuit, dit-il. Douleurs de tête avec complications de maux de reins. M. Le Monnier, premier médecin ordinaire, a été réveillé. Il a trouvé de la fièvre. Sur l'ordre du roi, on a fait quérir Mme du Barry. Le Monnier, habitué aux pusillanimités de son patient, ne prête guère attention aux symptômes et suppose une indigestion. Les gentilshommes de service ont, eux aussi, traité à la légère cette indisposition.
    — Et la comtesse ? s'enquit Nicolas.
    — Elle craint que la peur du diable qui se réveille chez le roi au moindre prétexte ne lui fasse demander son confesseur. Du coup, elle opine dans le même sens que les autres. Elle souhaite rester la seule à veiller sur le roi et a obtenu qu'on ne prévienne personne au Palais.
    — Mais tout se sait à la Cour...
    — Justement, cher Nicolas, vous imaginez bien que la famille de Sa Majesté s'est aussitôt inquiétée. N'osant paraître, elle a dépêché La Martinière, son premier chirurgien. Il vient d'arriver. Pressons le pas et retournons au Château neuf.
    La Borde avait pris Nicolas par le bras pour l'entraîner. Sur les marches de l'escalier qui conduisait à l'étage noble, où se trouvaient les pièces de réception, les serviteurs attendaient. Dans l'antichambre, appuyé sur l'un des deux poêles en faïence, Gaspard, le garçon bleu, les salua. Plusieurs courtisans attendaient là aussi, parmi lesquels Nicolas reconnut M. de Boisgelin, chez qui, jeune encore, il avait accompagné son père, le marquis de Ranreuil, à la chasse

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