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L'affaire Nicolas le Floch

Titel: L'affaire Nicolas le Floch Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jean-François Parot
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aucun autre remède n'étaient parvenus à calmer le roi. La matinée s'écoula dans une attente anxieuse. Vers neuf heures, Le Monnier, d'accord avec le premier chirurgien, décida de le faire saigner. L'opération se fit en public et chacun put observer sur une console les trois palettes tirées. Nicolas, adossé dans l'ombre de la cheminée, put constater avec les autres assistants que le malade n'en paraissait pas soulagé. Les deux médecins se retirèrent dans la chambre de conseil pour discuter de la marche à suivre. Le Monnier, la veille encore si optimiste, envisageait maintenant de faire appel aux lumières de ses confrères. Nicolas, qui les avait suivis, surprit une longue dispute pour savoir qui aurait l'honneur de la consultation. Lorry, médecin du duc d'Aiguillon, et Bordeu, celui de la favorite, furent désignés. Ce dernier, réputé bon praticien, paraissait, selon un propos échappé à la comtesse, propre à se laisser conduire dans le cas où l'indisposition deviendrait maladie. Lassone, médecin de la dauphine, fut adjoint également à ce conseil, puis d'autres encore. Gaspard, le garçon bleu, vint tirer Nicolas par la manche ; on le réclamait dans la chambre du roi.
    Il s'agissait de faire évacuer la pièce. Trop de monde s'y pressait, elle était trop confinée et l'air manquait. Le roi, couvert de sueur, gisait sur un petit lit de camp au milieu de la chambre. Il tenait des propos sans suite, d'une voix rauque, appelant souvent La Borde qu'il finit par envoyer chez Mme du Barry, réclamant que le petit Ranreuil reste là « surtout, surtout ». Il répéta ce mot plusieurs fois, cherchant Nicolas des yeux. À midi, les médecins de Paris faisaient leur entrée, figés de componction.
    Ils examinèrent longtemps le roi, l'interrogeant sur ses souffrances. La face congestionnée, il se plaignait de maux de tête. Il ne fut à aucun moment question de déterminer la nature de sa maladie et la Faculté disserta longuement de l'éventualité d'une fièvre catarrhale. Le roi continuait à s'agiter et, après bien des hésitations, les médecins ordonnèrent une seconde et peut-être une troisième saignée. Tout Versailles bruit aussitôt de la nouvelle et la famille royale accourut derechef. Les conciliabules et les intrigues reprirent de plus belle.
    — Une troisième saignée ! dit le roi. Une troisième saignée ! C'est donc une maladie. Elle me mettra bien bas, je vous le dis.
    Il s'accrochait à cette idée, interrogeant l'assistance du regard.
    — Je voudrais bien qu'on ne me la fît pas. Pourquoi cette troisième ?
    Dans les pièces précédant la chambre du malade, Nicolas fut alors le témoin atterré du développement des conciliabules. Cette saignée devenait une affaire d'État. Les médecins, attaqués de toutes parts et attirés alternativement par les deux camps en présence, vacillaient. L'enjeu de cette agitation crevait les yeux. Selon leurs dispositions favorables ou contraires aux intérêts de la favorite, les uns et les autres craignaient ou espéraient le verdict. Les uns décrivaient le roi frappé de cette proposition, et combien alors il se persuaderait d'être malade et quel serait le danger de cette peur pour un homme de sa faiblesse. On dévidait, pour être plus clair, les suites de cette troisième saignée, qui ne pouvaient manquer d'être le recours aux sacrements et le renvoi de Mme du Barry. On balançait, devant des esprits incertains, les risques de se faire de la favorite et du ministre en place des ennemis irréconciliables. M. de La Borde prêtait la main au clan de la comtesse, tant par amitié sincère pour elle que par souci de l'inquiétude de son maître. Les autres, arguant de la nécessité pour le roi de se mettre en paix avec sa conscience dans le risque où il paraissait être, voilaient, sous des impératifs religieux, leur volonté de revanche sur la favorite et le duc d'Aiguillon. Nicolas ne savait que penser. Au bout du compte, on se contenta d'une deuxième saignée vers le soir. Le roi faillit se trouver mal et demanda du vinaigre. Il se faisait tâter le pouls à chaque instant et montrait son inquiétude.
    — Vous me répétez que je ne suis pas mal et que je serai bientôt guéri. Vous n'en pensez pas un mot. Vous devez me le dire !
    À cinq heures, ses filles, appelées par La Borde qui pensait ainsi faire pendant à la venue de la favorite, visitèrent leur père. Nicolas regrettait de voir tant de monde affluer

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