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L'affaire Nicolas le Floch

Titel: L'affaire Nicolas le Floch Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jean-François Parot
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en silence. Ils entendirent près d'eux quelqu'un qui pleurait. C'était M. de Séqueville, surgi de nulle part. À genoux, l'homme du cérémonial psalmodiait à mi-voix et décrivait, au milieu de sanglots, le protocole d'une pompe funèbre imaginaire.
    — Hélas, mon maître, comme on vous traite ! La messe dite, on devrait procéder aux derniers actes de la sépulture. Douze gardes du corps enlèvent le cercueil et le descendent dans le caveau. Le roi d'armes se dépouille de sa cotte d'armes et de sa toque, les jette sur le cercueil, ainsi que son caducée, puis, reculant de trois pas, il s'écrie : « Hérauts d'armes de France, venez remplir vos charges ! » Les officiers s'approchent de l'ouverture du caveau et jettent à leur tour leur caducée, leur cotte d'armes et leur toque. Le roi d'armes reprend la parole et ordonne aux valets de descendre les ornements royaux, les honneurs du défunt, la couronne, le sceptre, la main de justice, le pennon, les éperons, l'écu, la cotte d'armes, le heaume et les gantelets. Le grand chambellan, obéissant à l'appel du roi d'armes, approche du caveau la bannière de France. Puis en tant que grand maître de la maison royale, s'écrie « Le roi est mort, le roi est mort, le roi est mort », puis il ajoute « Prions tous Dieu pour le repos de son âme ». Chacun s'incline en priant silencieusement. Le grand chambellan relève son bâton qu'il a abaissé vers le caveau et crie « Vive le roi ! » trois fois et ajoute, hélas... hélas...
    À cet instant M. de Séqueville se dressa, levant les mains vers la voûte obscure. Son cri hurlé réveilla les échos de la nécropole ; quelques pigeons enfermés s'envolèrent, affolés.
    — « Vive le roi Louis, seizième du nom, par la grâce de Dieu, roi de France et de Navarre, très chrétien, très auguste, très puissant, notre très honoré seigneur et bon maître, que Dieu lui donne très longue, très heureuse vie. »
    Alors, dans la vieille église, on entendit une plainte, presque celle d'un enfant ; un Algonquin orphelin de la France pleurait, auprès d'un Breton fidèle, son roi disparu.

XI
    LUEURS
    Nous sommes pour eux comme un vase cassé qu'on jette et dont on ne fait nul usage.
    Saint Bernard

    Vendredi 13 mai 1774
    Cette nuit d'affliction s'acheva par un retour silencieux à Versailles. La Borde, dont les fonctions avaient cessé aussitôt la mort du roi, convia Nicolas et Naganda à se restaurer dans ses appartements, qu'il devrait bientôt quitter. Tous trois, accompagnés de Gaspard éploré, reprirent la route de Paris. Le château déserté paraissait un grand vaisseau abandonné aux frotteurs et aux nettoyeurs qui, dès à présent, devaient remettre les appartements en état en vue du retour du nouveau roi et de la Cour, à l'issue de la quarantaine. La Borde leur rapporta que Mme du Barry avait été conduite la veille à l'abbaye de Pont-aux-Dames, en Brie champenoise à dix lieues de Paris. Entre autres précisions, il indiqua, en regardant Nicolas, qu'elle était au secret et n'avait point, pour le moment, l'autorisation de recevoir des visites.
    — Vous-même, qu'allez-vous faire ? demanda Nicolas.
    — Je rentre à Paris. Il y a trop longtemps que j'ai abandonné mes études, mes travaux et le souci de mes affaires. Cela m'aidera à oublier et à supporter ce qui va venir. Je vais m'étourdir de musique, d'écriture et de femmes. Voyez à quoi tout se résume... Il faut se faire une raison. Vous verrez, nous allons devenir « vieille Cour » ! Notre dévouement et notre fidélité ne seront comptés pour rien. Les regards seront transparents à notre approche, les saluts se feront rares et les dos tournés seront tout notre horizon !
    — Je vous trouve bien sombre et amer.
    — Vous êtes encore jeune, je le suis un peu moins...
    — Jadis chez moi, expliqua Naganda, quand le chef mourait, on tuait tous ses guerriers. Ils devaient le servir dans l'outre-tombe.
    — Remercions Dieu de n'être point mic-macs, répliqua La Borde avec un pauvre sourire. Encore que...
    — Notre fidélité au roi, déclara Nicolas, sera de servir son petit-fils.
    — Certes. Cependant, le proche avenir sera difficile. Accabler les vrais serviteurs, assouvir des rancunes, se ruer vers les honneurs et les places, et provoquer des exils et des départs, voilà ce que sera l'occupation des gens de bien. Déjà, on me dit que Choiseul est rentré à Paris, ses lettres de cachet ayant

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