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L'affaire Nicolas le Floch

Titel: L'affaire Nicolas le Floch Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jean-François Parot
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bien ? questionna Nicolas.
    Éon fourragea dans son corsage et rajusta sa guimpe.
    — Chaque jour que Dieu fait, ce coquin m'entête de lettres et de rendez-vous. Je l'écoute et le rencontre et, faute d'opiner dans son sens, je m'efforce de lui insuffler la raison. Je dois constater que cette bonne parole n'est pas reçue, jusqu'à présent. Autant tirer sa poudre aux moineaux 30 . Cet homme n'a d'entrailles que pour sa nichée : il a fait mourir son père de chagrin et a voulu faire pendre sa mère. Longtemps enfermé à Armentières, il a trouvé un refuge commode en Angleterre. Si vous m'en voulez croire, il finira à Tyburne 31 où ses pieds patauds donneront leur bénédiction à la canaille de Londres venue le voir tirer sa méchante langue !
    — Comment décririez-vous ce caractère ?
    — L'homme est sans qualité et il tient pour le mal. Il a cent piques au-dessus de la tête 32 et ne sait où la tourner pour trouver les expédients nécessaires. Au demeurant, je le répète, bon père et bon mari. Reste que son ambitieuse médiocrité le fait patauger dans la fange où il se noie, voulant et ne voulant pas, et insensible à tout argument. Il ne pousse jamais ses attaques résolument, piquetant çà et là, provoquant et agaçant comme un chien qui baise par saccades...
    Éon tendit la pointe d'une de ses bottes, se penchant vers elle comme s'il voulait s'y mirer.
    — Il m'a tout conté de l'aventure des filous de Paris venus le tuer, reprit-il. J'ai tenté de lui faire sentir que cela ne m'étonnait point, que ce qui arrivait, je le lui avais prédit de tout temps et qu'il était lui-même la cause première des affaires dangereuses qui survenaient. Enfin, ai-je ajouté, ne pouvait-il choisir d'autres sujets de censure que la sultane en titre, sans compter celle qui l'avait précédée, pour exercer sa détestable plume et répandre son venin ?
    — Et quelle fut sa réaction ?
    — Celle d'un enragé, marquis. Je ne vous en donne pas le détail, vous en jugerez par vous-même. Il m'a congédié en m'intimant le conseil de faire dire au duc d'Aiguillon et à « toute la clique » de la Cour qu'il se foutait et se contrefoutait d'eux, de toutes leurs menées et de tous leurs séides. L'ayant derechef exhorté à mettre un terme à ces insanités, il n'en a point démordu. Songez qu'il a envoyé les récits de ses aventures qui ont été publiés, le 11 janvier, dans le Morning Post and Daily Advertiser . Il veut saisir la justice contre l'infamie qui lui est faite. Je l'ai quitté excédé, et j'ai dit à sa pauvre femme de prendre garde aux conséquences des actes de son mari, qui me paraissait fort dérangé, et de s'en prendre à lui des retombées calamiteuses pour elle-même et ses marmots.
    — Et que suis-je censé faire dans cette galère ? fit Nicolas en riant.
    La chevalière se frappa les cuisses avec gaillardise.
    — Tout beau ! Ne vous désespérez pas. Avec un oiseau de cet acabit, tout reste possible. Ce n'est pas que d'autres ne s'y soient essayés, mais...
    — Mais ?
    — L'homme, malgré les apparences, est loin d'être fou. Il s'esclaffe devant cette lamentable équipée, même si cette aventure l'a chaviré et inquiété. Parlez-lui. Si vous n'en obtenez rien sur le moment, du moins ameublirez-vous ses défenses pour des offensives ultérieures. Outre cela, il n'est pas sans savoir, car je me suis chargé de le lui apprendre, que vous n'êtes pas l'émissaire de M. le duc d'Aiguillon, mais celui du roi. J'ai mes sources d'information, il a les siennes, elles se recoupent quelquefois. La rumeur rapporte, marquis, que des chiens courants sont après vous ; cela vous rendra sympathique ! Mais même en Angleterre le renard s'échappe parfois ! C'est tout le bien que je vous souhaite. Au fait, êtes-vous armé ?
    — Oui, une bonne lame et un pistolet.
    — Sinon, je vous aurais procuré le nécessaire. Mes épées sont les meilleures de Londres. Savez-vous que j'ai été l'élève de Dumonchelle et de Rousseau, maîtres d'armes à Paris ?
    Il redressa fièrement sa petite taille.
    — Méfiez-vous de tout et de chacun, reprit-il. Morande vous dispensera un respect et des propos peu ménagés, ne vous y laissez pas prendre. Il est pris dans un jeu de dés fatal dont la fureur le possède et qui noircit et absorbe toutes ses pensées.
    — Quand le verrai-je ? demanda Nicolas.
    — Demain, sans doute. Mme Williams vous le fera savoir. Il voulait vous

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