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L'amour à Versailles

L'amour à Versailles

Titel: L'amour à Versailles Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Alain Baraton
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déterminante, même si, après sa disgrâce, beaucoup des endroits qui lui étaient associés furent modifiés. Le roi était fou d’elle, fou au point de faire construire en quelques mois le palais des fées du Trianon de porcelaine, fou au point de lui offrir, pour sa toilette, et leurs ébats, une salle de bain tout en marbre, en lambris de bois précieux, le salon Octogone, qui doit son nom à la baignoire, aujourd’hui on dirait une piscine, paradisiaque, taillée dans un seul bloc de marbre, fouau point d’exécuter bon nombre de ses caprices, innombrables, mais non au point de l’épouser. Celle qui, à la mort de la reine, réussira cette prouesse est une femme aussi froide et calculatrice qu’Athénaïs est d’un tempérament chaud et dépensier, Mme de Maintenon. Elle n’aura de cesse de faire oublier le luxe et la luxure de sa rivale. Mme de Maintenon, « l’autre » Françoise, l’ancienne amie, qui prit sa place d’abord dans le coeur de ses enfants puis dans celui du roi, s’est empressée de faire disparaître les monuments érigés pour celles qui l’ont précédée : adieu la grotte de Thétys construite pour la fine La Vallière, adieu le Trianon de porcelaine pour la fougueuse Montespan. Mais l’esprit Mortemart a la vie dure, et dans ces quelques recoins de verdure, on sent encore son exquise présence.

Chapitre 9
    Dévots et saintes nitouches
    A la fin de l’été 1683, coup de théâtre au château : la reine, à peine installée à Versailles, meurt en quelques semaines, emportée par une septicémie foudroyante. Voici donc à la tête de l’État un veuf, qui ne se morfond guère, puisqu’il déclare à la mort de Marie-Thérèse : « C'est le premier chagrin qu’elle m’ait causé. » Louis XIV a alors près de quarante-cinq ans, et, même s’il n’est plus un prix de beauté, il est trop jeune pour rester sans épouse. Il se trouve qu’il a à ses côtés une veuve, fort joyeuse elle, mais aussi fort dévote, Françoise de Maintenon qui éduque depuis des années les bâtards royaux, et « instruit » le roi sur les fureurs du ciel qui l’attendent s’il ne redresse pas sa conduite. Celle qu’on baptise depuis quelques années Mme de Maintenant, titrée trop récemment, sans fortune hormis celle qu’elle a gagnée à la sueur de son front, épouse à l’automne 1683, quelques mois à peine après la mort deMarie-Thérèse, le sieur Louis Capet, monarque de son état.
    La scène se déroule à Versailles, dans la petite chapelle accolée aux appartements du roi. Le mariage est dit « secret », c’est-à-dire que le peuple n’est pas au courant, mais que toute la Cour ne parle que de l’événement, estomaquée, horrifiée, éberluée par l’union « du plus grand roi du monde » avec « la veuve Scarron ». C’est un conte de fées, le monarque le plus puissant d’Europe sort du ruisseau une roturière pour en faire son épouse, secrète certes, mais légitime. Les révolutionnaires ne s’y trompent pas : en 1793, lorsqu’ils déterrent le corps de Françoise Scarron, ils lui réservent le même sort qu’aux membres de la famille royale, la profanation de sa sépulture et la mutilation abjecte de sa dépouille… L'hommage est barbare, mais il montre bien, comme l’écrit un des biographes cité dans L'Allée du Roi, qu’elle est traitée en reine. Toutefois, bien avant cette scène horrible, tous les détails du conte ne sont pas bons à raconter aux enfants…
    Qui est « la veuve Scarron » ? Au moment de ses noces, à quarante-cinq ans passés, la « belle » est une femme sévère, intrigante, austère, avare, pieuse, un parangon de vertu et de religion… depuis peu, car avant de devenir une sainte nitouche, en quête d’auréole, la dame s’est bienamusée, et, à en croire Saint-Simon « elle avait fort rôti le balai ». Certes, elle eut une enfance difficile : on sait sa naissance en prison, les malheurs financiers qui frappèrent sa famille (de là sans doute date sa pingrerie), les errances de son père pour refaire fortune, la petite Françoise placée dans ce que nous appellerions des « familles d’accueil », des oncles, des tantes, des amies, prêts à soulager quelque temps la mère miséreuse, traitant plus ou moins bien la fillette, parfois ayant une réelle affection pour elle, mais ne l’aimant jamais comme leur propre enfant. A quinze ans, elle a vécu : elle a connu la pauvreté, la séparation, les voyages, les maladies, les

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