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L'amour à Versailles

L'amour à Versailles

Titel: L'amour à Versailles Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Alain Baraton
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ni querelle jusqu’à la mort de Scarron en 1660. Le secret de ce couple improbable ? Chacune des deux parties y trouve son compte. Dans son salon, elle parachève l’art de plaire et de bien parler, pioche çà et là quelques amants, et je suis bien persuadé que le vieil infirme devait la conseiller dans ses choix, voire convier l’amant à rester à souper pour qu’il puisse jouir de sa conversation, puis rester à dormir pour qu’il puisse les regarder s’aimer. Il paraît même que, Scarron ne pouvant avoir d’enfant, demanda à l’unde ses domestiques de faire, en son nom, un fils à Françoise. Ce fut l’une des rares fois où sa femme lui refusa une grâce. Elle le regretta peut-être, elle qui consacra sa vie à l’éducation des enfants mais qui ne connut jamais la joie d’être mère. Grand parleur et grand voyeur, tel est le portrait que je me fais de l’auteur du Roman comique.
    A vingt-cinq ans, à la mort de son mari, Françoise se retrouve de nouveau sans un sou, mais riche d’une grande expérience, et libre. Elle en profite pour chiper l’amant de son ancienne initiatrice, le marquis de Villarceaux, un proche de Louis XIV. Cette liaison fort à propos puisque c’est grâce à lui qu’elle entre dans les cercles royaux et fait la connaissance de Mme de Montespan, lui laisse pourtant un héritage encombrant : peintre à ses heures, Villarceaux brosse d’elle un portrait où pose une Mme Scarron vêtue uniquement d’une grande étole qui réussit la prouesse de ne masquer ni ses seins, ni ses hanches, ni ses jambes, à peine son sexe. Lorsqu’elle épouse Louis XIV, elle cherche à faire disparaître le tableau, mais Villarceaux le « perd » de manière fort opportune. Aujourd’hui, la toile trône au château de Villarceaux. J’ai eu la curiosité d’y jeter un oeil. Avant d’être la dévote au teint pâle et à l’air renfrogné que l’on voit sur les peintures officielles, la marquise de Maintenon était fort gironde : deuxpetits seins haut placés, aériens, effrontés au point de sortir du voile qui tentait de les couvrir, un ventre tendre et rond et, chose rare pour les beautés de l’époque, de longues jambes fines, elle est plus que jolie. Ajoutez à cela une bouche sérieuse, un regard provocant et, avouons-le pour la rendre plus humaine, de fort grands pieds, vous aurez une idée assez précise de la veuve Scarron.
    Mais déjà, ce ne sont plus les plaisirs de la chair qui l’intéressent. La belle est une tête dure et un coeur sec qui préfère la froideur de l’argent à la chaleur des corps : une vraie calculatrice. Elle veut faire carrière à la Cour et tant pis si elle y est traitée de « guenipe », de « guenon » ou de « ripopée », un mélange de mauvais vin qui sert à désigner une prostituée de bas étage, voire de putain. Elle a pour alliée Mme de Montespan et n’hésite pas, littéralement, à lui marcher sur le ventre, puisqu’elle lui vole l’amour de ses enfants, le duc du Maine en particulier. Elle devient en 1669 la gouvernante des enfants royaux. Montespan ne se méfie pas : Françoise est son amie, qui plus est, elle est plus vieille que le roi et, à cette époque, on craint plus facilement la génération suivante que la précédente. Pour accepter la charge, la « bonne amie » n’a-t-elle pas refusé la prestigieuse situation de dame de compagnie de la reine du Portugal ?
    Devant Louis XIV, Françoise Scarron est réservée, cérémonieuse, ne parle que Dieu, enfants et éducation, rien d’affriolant. Et pourtant, un beau soir de 1675, alors qu’Athénaïs vient tout juste d’accoucher d’une petite Louise, la fidèle – et vieille – amie la trahit. La scène se passe, comme il se doit, dans des jardins. Fait inédit, Louis XIV le relate dans son journal :
    « Il y a quelques jours, un gentilhomme vêtu de gris, peut-être un prince errant incognito entreprit durant la nuit une nymphe égarée dans le parc de Saint-Germain. Il savait le nom de cette nymphe, qu’elle était belle, bonne, pleine d’esprit mais sage. La nymphe cependant se laissa faire et ne lui refusa aucune faveur. Cette nymphe ressemblait à s’y méprendre à Mme Sc. ; et je crois deviner qui était le prince vêtu de gris. Ce prince est comme moi, il déteste les femmes légères, il honnit les prudes, il aime les sages. »

    La veuve Scarron eut donc la sagesse de se laisser prendre dans un bosquet et mit toute sa science à satisfaire le roi.

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