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L'Amour Et Le Temps

L'Amour Et Le Temps

Titel: L'Amour Et Le Temps Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Robert Margerit
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certaine mesure, à la sincérité de ces factums qui non seulement prenaient à partie « l’Autrichienne » – « M me  Déficit » – sur sa morgue, sa frivolité, sa coquetterie, sa passion du jeu, sa prodigalité sans frein, mais l’accusaient encore des plus éhontés dévergondages. Elle ne comptait plus ses amants. Le second Dauphin était fils de l’un d’eux : un gentilhomme suédois nommé Fersen. Au demeurant, les hommes ne lui suffisaient pas. Ajoutant aux fureurs de Messaline le vice de Sapho, elle choisissait ses favorites, depuis la Polignac, la Lamballe, jusqu’aux chambrières, aux filles de garde-robes, pour leur lubricité dans des ébats dont on donnait tout le tableau. Ces allégations semblaient assez bien correspondre à ce que l’on pouvait, de loin, savoir de ses habitudes, de sa légèreté, de son goût pour le plaisir. Or Claude avait appris, en causant avec des électeurs versaillais, avec l’hôte du Renard, en personne, que ces pamphlets étaient d’entières calomnies inspirées, sinon rédigées, par les proches parents du Roi, voire probablement par son frère Provence, jaloux de Louis XVI et implacable ennemi de Marie-Antoinette depuis sa venue en France. On soupçonnait le duc d’Orléans d’amener également de l’eau à cet ignoble moulin, Provence et Orléans cherchant l’un comme l’autre à déconsidérer le ménage royal, dans l’espoir de le remplacer sur le trône. Cette ambition, Claude, depuis – et même avant – les confidences de Nicaut, ne l’ignorait pas. Il se jugea un tantinet Pourceaugnac ou Escholier limousin, pour n’avoir pas mis un peu plus de précaution à recevoir comme évidences des imputations si violentes. L’histoire romaine, avec ses impératrices cupides ou lubriques le disposait à croire qu’une reine possède naturellement l’étoffe soit d’une Messaline soit d’une orgueilleuse Julia Mammea. Mais il a existé des Julia Domna !… N’oublions jamais Descartes. Il faut tout passer au crible de la raison. Revenu à ce principe, Claude l’avait appliqué aux témoignages recueillis en se promenant par la ville et dans le parc même. Car, contrairement à ce qu’il s’imaginait – encore une conviction sans examen –, la royauté ne dressait point de murailles entre le peuple et elle. Nulle troupe ne montait la garde aux grilles du parc. On y entrait librement à toute heure du jour ; n’importe qui pouvait pénétrer jusque dans le château où, seulement aux entrées des appartements particuliers, les sentinelles vous avisaient de n’aller pas plus loin. Si, au lieu de demeurer à cinq lieues de Paris, les souverains avaient vécu de la sorte au Louvre ou bien aux Tuileries, la population parisienne, donc la France entière, aurait eu peut-être pour eux le sentiment que manifestait à leur égard le menu peuple de Versailles, mêlé familièrement à la vie du château. À l’en croire, la Reine était toute simple, pleine de sensibilité, de bonté. Excellente mère – douloureuse parce qu’elle voyait incliner irrémédiablement vers la mort son fils aîné, le pauvre petit Dauphin – elle portait d’autant plus d’attachement et de soins à ses autres enfants : Madame Royale, fillette de onze ans, Charles-Louis, âgé de quatre ans et demi, qu’elle appelait d’une façon charmante, elle Mousseline, lui Chou d’Amour. Ils s’adoraient tous les trois. On n’eût pu trouver famille plus unie, plus simplement tranquille, que celle du Roi, au milieu de l’envie et des trames ourdies par l’ambition de ses proches. Bon. De telles affirmations devaient être exactes, dans une certaine mesure, elles aussi, et l’on obtiendrait sans doute la vérité juste en corrigeant cet idyllique tableau par quelques touches empruntées à celui que peignaient les libelles. Car il n’y a tout de même pas de fumée sans feu. Louis avait été longtemps « empêché », jusqu’à la petite opération après laquelle était venu au monde le Dauphin. Marie-Antoinette, alors très jeune, eût, ma foi, assez normalement – ne soyons pas trop sévères ! – cherché des compensations. Par la suite, elle avait eu encore des amitiés à tout le moins suspectes. Enfin, plus récemment, les actions de M me  de la Motte et de Rohan dans cette affaire du collier trahissaient quelque persistance, chez la Reine, d’un esprit frivole qui marquait autrefois la conduite de la Dauphine. Il n’y a pas non plus de

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