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Lancelot du Lac

Lancelot du Lac

Titel: Lancelot du Lac Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jean Markale
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Pendant deux jours, ils chevauchèrent à travers forêts et vallées verdoyantes. Chaque fois qu’ils rencontraient des paysans dans les champs, ils s’informaient pour savoir si l’on connaissait l’enchanteur Iweret qui résidait dans la forteresse de Dodone, au milieu d’une forêt qu’on appelait Behforêt. Mais personne ne pouvait apporter la moindre réponse sur ce sujet. Et le fils du roi Ban commençait à se décourager.
    Le lendemain matin, tous trois pénétrèrent en une grande plaine où tourbillonnaient des vents violents. Ils virent au milieu de cette plaine une grande forteresse très sombre et demandèrent à un bûcheron qui passait quel en était le nom : « C’est Chatelmor, répondit-il, mais quant à vous dire le nom de celui qui en est le maître, je ne peux le faire, car nous ne l’avons jamais vu et nous n’approchons jamais de cet endroit. On raconte que ce sont des diables qui y mènent grand bruit, et de fait, lorsque le vent vient de là, nous entendons des cris et des plaintes. Voilà pourquoi nous nous tenons à l’écart. » Ce que ne savait pas le bûcheron, c’est que Chatelmor (22) était la forteresse où résidait Mabuz, le frère de la Dame du Lac. Il ne savait pas non plus que, pour protéger Mabuz, qui était atteint de couardise par suite du sort jeté par Iweret, la Dame du Lac avait elle-même lancé un enchantement sur le château : quiconque y pénétrait sans y avoir été invité par Mabuz devenait immédiatement plus lâche et plus couard que le dernier des manants. Et plus celui qui y pénétrait indûment était courageux et vaillant, plus il devenait peureux et honteux. Ainsi Mabuz était-il protégé contre ses ennemis, car ceux-ci, à commencer par l’enchanteur Iweret en personne, se gardaient bien de vouloir en franchir les murailles.
    Le fils du roi Ban et ses compagnons furent très intrigués par les paroles du bûcheron. Après en avoir discuté, ils décidèrent qu’ils iraient voir de plus près ce dont il s’agissait. Ils parvinrent aux abords immédiats de la forteresse. Tout était vide et désert aux alentours, comme si le sol avait été brûlé par un vent infernal. On n’y voyait ni prairie, ni bosquet : il n’y avait que des landes parsemées d’ajoncs griffus et d’herbes rases qui avaient peine à pousser. Dans la muraille, il n’y avait qu’une seule porte, et elle était gardée par deux sergents munis de piques. Le fils du roi Ban sentait bien qu’il y avait quelque chose d’étrange dans cette forteresse isolée au milieu des landes stériles. Il décida donc d’y pénétrer seul, recommandant à la belle Ade et à son frère d’attendre à l’extérieur et de lui venir en aide seulement si besoin en était. Alors, tenant son cheval par la bride, il s’avança vers la poterne.
    Mais dès qu’il l’eut passée, il fut pris à partie par les deux sergents qui abaissèrent leurs piques vers lui et lui demandèrent de se rendre. Le fils du roi Ban se mit à trembler de peur. Sans hésiter, il tendit son épée et se désarma lui-même, implorant les sergents de ne pas lui faire de mal. Il se laissa emmener sans aucune résistance, et on l’entendit de loin implorer la clémence de ses gardiens. La belle Ade et son frère furent donc les spectateurs de cette scène ahurissante. Ade dit à son frère : « Ainsi j’ai donc donné mon amour à un lâche qui se rend sans condition, sans même tenter de se défendre, contre deux hommes d’armes qui tiennent leurs piques comme un vulgaire balai ! Honte sur moi de m’être livrée à un homme qui se prétend fils de roi et qui n’est que le pire de tous les manants ! » Sur ce, elle fit tourner bride à son cheval et, encourageant son frère à la suivre, elle s’éloigna au galop sans jeter un regard en arrière.
    Cependant, le jeune homme était traîné à travers les rues. Chaque fois qu’il rencontrait quelqu’un, il se jetait à ses genoux et suppliait humblement qu’on lui laissât la vie sauve. Et les gens riaient de le voir si pleutre et déconfit. On le mena dans les souterrains du château, là où se trouvaient déjà un grand nombre de chevaliers qui se lamentaient et pleuraient. Quand il les entendit se plaindre ainsi de leur sort, le fils du roi Ban se mit à gémir encore plus fort que les autres, clamant qu’il se sentait en grand danger et que, si ses gardiens le voulaient bien, il serait leur valet pourvu qu’on le laissât en

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