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L'ange de la mort

L'ange de la mort

Titel: L'ange de la mort Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Paul C. Doherty
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cordon infranchissable d’hommes d’armes de la Maison du roi. La plupart des fidèles étaient partis, mais l’atmosphère vibrait encore du drame, des chants et de la mort atroce qui flottaient en suspens dans l’air, à l’instar des vapeurs d’encens odoriférant.
    Corbett s’immobilisa en apercevant une silhouette en bas des marches du choeur, celle d’une femme en robe de damas blanc et or, sous un manteau du même tissu, fourré d’hermine et lacé aux épaules par de larges galons de soie brochés d’or, chacun paré de superbes noeuds dorés. Ses cheveux blonds lui tombaient dans le dos, retenus par une fine résille de soie enrichie de pierres fines. Son long visage aux traits lisses aurait été digne d’une reine, n’eussent été le regard impudent et la bouche tordue en un rictus sournois. Corbett ne l’avait jamais vue. D’abord, il la prit pour une dame de la cour, mais en distinguant ses lèvres fardées et ses ongles vernis, il pensa que c’était la maîtresse d’un des nobles restés dans le sanctuaire ou même celle d’un chanoine. Il se souvint avec amusement du vieil adage : « L’habit ne fait pas le moine. » Plus d’un prêtre goûtait aux plaisirs de la chair avec autant d’ardeur qu’il mettait à les dénoncer dans ses sermons. Le clerc allait s’éloigner quand la femme l’interpella d’une voix dure :
    — Montfort est-il mort ?
    Il répondit machinalement :
    — Oui, oui, il est mort.
    Le temps qu’il se ressaisît, elle avait tourné les talons et redescendait la nef d’un pas énergique, balançant de façon fort suggestive ses hanches larges et rebondies sous sa robe de soie. Il aurait voulu la suivre pour lui demander la raison de son intérêt, mais le roi l’attendait ; il se dirigea donc vers la rangée d’hommes d’armes. En le voyant approcher, l’un d’eux lui fît signe de s’arrêter, mais Bassett, derrière, glissa quelques mots à l’oreille du capitaine des gardes qui laissa passer Corbett.
    Celui-ci gravit les marches quatre à quatre et se retrouva près du long autel en marbre. Ce maître-autel, plus large que ne l’avait cru Corbett, était décoré, sur le devant, de sculptures très fouillées d’anges et de bergers dans une scène d’une gaieté presque enfantine : un berger jouait tellement fort de sa cornemuse qu’il n’entendait pas la musique céleste. Corbett contempla la frise, appréciant la douceur du matériau et oubliant sa mission pour admirer la délicatesse et la complexité du tracé. Il s’accroupit et aperçut une pâle tache de vin, puis en remarqua d’autres sur le tapis. Avait-on renversé du vin ? Oui, un peu, apparemment ! Il se leva avec un haussement d’épaules pour examiner l’autel pouce par pouce. Posant les mains sur la nappe souillée de larges gouttes de cire vierge, il tâta les linges précieux qu’elle protégeait, probablement en cendal {13} , samit {14} , sarcenet {15} , damas, soie et velours. La nappe elle-même, d’un blanc immaculé, arborait sur le pourtour des broderies vertes, ocre, dorées et bleu nuit, et au milieu une croix rouge, symbolisant la relique qu’abritait tout autel. Comme, ici, c’était la cathédrale St Paul, les reliques étaient des plus rares : un morceau de la vraie croix, de minuscules fragments du rocher où s’était tenu Jésus avant de monter au ciel, un bout du voile de la Sainte Vierge et des reliques du tombeau de Saint Paul à Rome.
    L’autel s’ornait de magnifiques pièces d’orfèvrerie : d’énormes candélabres qui n’étaient qu’entrelacs et volutes de feuillages d’argent, agrémentés de minuscules silhouettes en or d’hommes et de démons, se dressaient à côté de petites burettes peu profondes à tige de cristal teinté, gravées des scènes de la Passion ; un ostensoir aux multiples rayons voisinait avec des patènes en vermeil très pâle dont certaines contenaient encore des hosties consacrées. Dans la confusion, on avait laissé là un encensoir incrusté d’or et un autre, en forme de nef, émaillé de pierres précieuses. Corbett soumit tous ces objets à un examen approfondi. Certains prêtres auraient pu l’accuser de sacrilège puisque le pain et le vin consacrés se trouvaient toujours sur l’autel, mais il était assez frotté de théologie pour savoir que le sacrilège réside plus dans l’intention que dans l’acte lui-même. Il marmonna une brève prière, se frappa la poitrine en disant « 

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