L'Anneau d'Atlantide
solide, avec un beau visage ouvert et des yeux pétillants d’intelligence. Elle se nommait Mrs Mallowan, épouse d’un archéologue « mésopotamien », mais s’était déjà taillé une réputation en Grande-Bretagne ainsi qu’en France en écrivant des romans policiers sous son pseudonyme : Agatha Christie. Elle s’était installée à l’hôtel où elle occupait une suite afin d’y écrire tranquillement. Sa conversation était pleine d’imprévus et de boutades. Elle disait par exemple :
— La meilleure chose à faire est d’épouser un archéologue. Plus vous vieillirez et plus il vous aimera…
Autre qualité maîtresse pour Morosini : elle se fichait royalement des joyaux célèbres ou non et il était incroyablement distrayant de bavarder avec elle à bâtons rompus. Hélas, c’était insuffisant pour le débarrasser de ses tourments…
Au matin du quatrième jour, enfin il se produisit un événement : le portier remit à Aldo une enveloppe renfermant son passeport. Sans un mot d’explication, mais cela n’avait plus d’importance. Il en éprouva la joie d’un gamin dont on vient de lever la punition et qui voit s’ouvrir devant lui les portes de la liberté, et se précipita chez M me de Sommières :
— Alléluia, Tante Amélie ! Je peux rentrer chez moi !
Deux visages se levèrent en même temps vers lui : la marquise rédigeait en effet son courrier, assistée de Plan-Crépin :
— On t’a rendu ton passeport ?
— Oui. Je suis franchement navré de vous quitter mais ce voyage dont j’espérais tant se termine si mal que je n’ai guère envie de le poursuivre ! En outre, je ne sers strictement à rien ici. Alors demain, je pars pour Le Caire.
— Je ne peux pas te donner tort… commença la marquise, interrompue aussitôt par sa « secrétaire ».
— Et Adalbert ? Qu’est-ce que vous en faites ? Vous le laissez tomber ?
— Du calme, Plan-Crépin ! Il est assez grand pour savoir ce qu’il doit faire !
— Merci, Tante Amélie ! Quant à vous, ma chère enfant, je vous ferai remarquer que ce n’est pas moi qui ai lancé les tuiles en l’air ! Si Adalbert voulait que l’on se réconcilie, il en a eu largement le temps…
— Comme si vous ne le connaissiez pas ! Il doit être aussi malheureux que vous !
— Ça m’étonnerait énormément ! À l’heure qu’il est, il doit être en train de jouer les consolateurs auprès de sa dernière passion !
— Dont vous vous méfiez non sans raison ! Je suis certaine qu’il va avoir besoin de vous sous peu !
— J’aimerais savoir d’où vous sortez cette certitude ? Je sais comment cela se passe quand il a une femme dans la tête : le monde disparaît. Seule compte la bien-aimée. Alors je le laisse à ses amours… D’ailleurs, il n’est pas abandonné chez Henri Lassalle. Il le considère comme son second père…
— Peut-être. N’empêche que vous ne pouvez pas partir de la sorte ! J’ai la prémonition que nous allons tous le regretter… bientôt !
Des larmes coulaient sur ses joues et sa voix trahissait une telle angoisse qu’Aldo s’en émut :
— Il ne faut pas vous désoler, Angelina ! Si quelqu’un peut, un jour, recoller les morceaux entre lui et moi, c’est vous et Tante Amélie. Il vous aime beaucoup et dès le moment où j’aurai disparu de son champ de vision, il reviendra peut-être plus facilement à la raison… J’y pense… Je vais vous donner un cadeau pour lui… Attendez deux minutes.
Il courut à sa chambre, prit une enveloppe et y glissa l’Anneau, la ferma et revint la mettre dans les mains de Marie-Angéline :
— Voilà. Vous le lui porterez de ma part ! Il lui sera sûrement beaucoup plus utile qu’à moi.
— Tu es certain de ne pas te tromper ? s’inquiéta M me de Sommières. Souviens-toi de ce que nous disions : il n’aura de cesse de l’offrir à la dame de ses pensées…
— Si ça peut le rendre heureux…
Cependant Plan-Crépin palpait l’enveloppe sans oser l’ouvrir :
— Qu’est-ce que c’est ?
— Un anneau… et la dernière cachotterie qu’on vous ait faite ! Justement parce que nous craignions que vous n’alliez la livrer tout droit à Adalbert !
— Mauvaise raison ! Si vous commenciez par m’en parler ? Je ne lui donnerai rien avant de savoir de quoi il retourne ! Étant donné que
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