L'archer du Roi
d’Anglais.
Les housses des chevaux anglais dégoulinaient de sang. Leurs
cavaliers tournèrent bride afin d’aller rejoindre la nouvelle vague d’hommes
d’armes anglais qui se battait visière relevée, car l’ennemi affolé n’offrait
plus réellement de résistance.
Cependant, la droite et le centre écossais tenaient
toujours.
La droite, une fois de plus, avait été poussée dans la
tranchée, mais à présent, au lieu d’affronter des archers qui les attaquaient
depuis le bord, les Écossais se retrouvèrent face aux hommes d’armes anglais
qui avaient été assez téméraires pour descendre dans le creux. Gênés par leur
cotte de mailles, ces derniers enjambaient les cadavres pour se précipiter sur
l’ennemi et asséner des coups d’épée et de hache sur les boucliers et les
crânes. On rugissait, grognait, frappait et trépassait au milieu des fougères
fangeuses, mais le combat était vain. En effet, l’avantage pris par les uns ou
les autres ne servait qu’à faire remonter l’ennemi au sommet du fossé, lui
redonnant l’avantage, et les morts s’entassaient au fond du trou. L’avantage
passait ainsi alternativement d’un côté et de l’autre, laissant toujours plus
de guerriers pleurant et mourant, criant le nom de Jésus, maudissant leurs
ennemis, se vidant de leur sang.
Beggar était parmi eux, tel un grand roc, assis à
califourchon sur le corps du comte de Moray, narguant les Écossais et les
invitant à venir se battre. Une demi-douzaine répondirent à son invitation et y
laissèrent la vie, avant qu’une meute d’hommes des Highlands ne fonde sur lui
en hurlant et en lui promettant la mort. Il les défia en agitant son énorme
masse cloutée, pareil à un ours hirsute assailli par des mastiffs. Sir William
Douglas, trop malin pour être pris au piège une deuxième fois, observait le
combat depuis le bord opposé en s’étonnant que l’on pût descendre de son plein
gré à l’abattoir. Puis, conscient que la bataille ne pourrait être ni gagnée ni
perdue dans ce creux mortel, il retourna au centre où la division du roi avait
toujours une chance de remporter une grande victoire en dépit du désastre subi
par l’aile gauche.
Car les hommes du roi avaient réussi à franchir le mur de
pierre. Par endroits, ils l’avaient démoli, et à d’autres, l’ouvrage s’était
écroulé sous la pression. Même si les pierres tombées représentaient un
formidable obstacle pour des soldats encombrés par les écus et les cottes de
mailles, ils parvenaient à les enjamber et à repousser le centre anglais.
Les Écossais avaient donné l’assaut sous la grêle de
flèches, y avaient résisté et même pris au piège une grande quantité d’archers
qu’ils massacrèrent joyeusement. À présent, ils se frayaient un chemin vers la
bannière de l’archevêque à grands coups d’estoc et de taille. Le roi, dont la
visière était poisseuse du sang qui s’écoulait de sa joue blessée, était en
tête de la division. Son chapelain était à ses côtés, agitant un gourdin
clouté. Sir William et son neveu se joignirent à eux. Sir William eut soudain
honte de la prémonition qui lui avait soufflé de battre en retraite. C’était
ainsi que l’on se battait quand on était écossais ! Avec fougue et
sauvagerie.
Le centre anglais reculait en débandade. Sir William, en
voyant que l’ennemi avait amené les chevaux près de la ligne de bataille, en
déduisit qu’il se préparait à la fuite. Aussi redoubla-t-il d’efforts.
— Tuez-les ! glapissait-il.
Si les Écossais pouvaient enfoncer leur ligne, ce serait le
chaos pour les Anglais, incapables d’atteindre leurs chevaux. Et cela n’en
représenterait que plus de viande pour les bouchers.
— Tuez ! Tuez ! rugissait le roi, bien
visible sur son cheval.
— Des prisonniers ! criait le comte de Menteith,
plus sensible. Faites des prisonniers !
— Enfoncez-les ! Enfoncez-les ! braillait sir
William.
Il avança vivement son pavois pour arrêter un coup d’épée,
frappa par en dessous et sentit que sa lame transperçait une cotte de mailles.
Il fit tourner l’épée et la retira d’un coup sec, avant que la chair ne puisse
adhérer à l’acier. Il poussa son bouclier sans voir par-dessus, sentit l’ennemi
reculer en chancelant, baissa son pavois pour anticiper un coup bas, puis le
lança de nouveau en avant, rejetant l’ennemi en arrière. Il trébucha et fut à
deux doigts de perdre
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