Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen
L'archipel des hérétiques

L'archipel des hérétiques

Titel: L'archipel des hérétiques Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Mike Dash
Vom Netzwerk:
grande qu'aux autres habitants de l'île.
    Le premier mutin dont l'intendant adjoint voulut tester la
loyauté était un soldat allemand du nom de Hans Hardens, originaire de
Ditmarschen, un duché situé à proximité de la frontière danoise. Il s'était engagé
à la VOC pour cinq ans et s'était embarqué sur le Batavia avec sa femme
Anneken et leur fille Hilletgie, âgée de six ans. Ils avaient tous trois
survécu au voyage, au naufrage et aux premières épreuves de leur séjour sur
l'île 65 .
    Rien ne permet d'affirmer que ce Hardens s'était joint à
la conspiration à bord du Batavia , mais durant le mois qui avait suivi
le naufrage, il avait gravité autour de la bande de Cornelisz - peut-être dans
l'espoir de protéger sa femme et sa fillette, et de les sauver de la famine. Il
devint peu à peu l'un des conjurés les plus actifs, bien qu'il fut loin d'être
le plus violent. Il semble néanmoins que Jeronimus ait conçu une certaine
méfiance à son égard. Avait-il fait preuve d'une trop grande indépendance
d'opinion, d'une certaine réticence à exécuter tel ou tel ordre, ou d'une trop
grande amabilité envers Frans Jansz... ? Quel qu'en fut le motif, au début de
la deuxième semaine de juillet, Cornelisz décida de le mettre à l'épreuve. Il
invita Hardens et sa femme dans sa tente et, pendant qu'ils mangeaient et
buvaient de compagnie, il envoya Jan Hendricxsz étrangler leur fillette.
    Hilletgie Hardens fut le premier enfant assassiné. Si ce
meurtre avait pour objet d'éprouver la loyauté de
    Hans Hardens, Jeronimus dut être satisfait. Le père de la
petite victime comprit qu'il n'avait aucun moyen de se rebeller et qu'il lui
fallait continuer à obéir aux mutins, quels que fussent ses sentiments, s'il
voulait sauver la vie de sa femme. Trois jours après la mort de sa fille, Hans
Hardens prêta serment d'allégeance à ses camarades, et leur signa « un pacte
écrit irrévocable, le serment le plus solennel que l'on puisse faire, et leur
jura de leur être loyal en toute chose 66 ».
    Jeronimus trouva sans doute une certaine satisfaction à
réduire Hans Hardens à sa merci, mais son attention fut bientôt attirée par une
autre de ses recrues. Andries de Vries avait frôlé la mort de très près, et
avait eu la chance d'être sauvé in extremis de la noyade au début du
mois. Il lui fallait à présent prouver sa loyauté à ceux qui l'avaient épargné.
Le 10 juillet, Cornelisz lui en fournit l'occasion. De Vries devait faire ses
preuves, en tuant sur ordre de l'intendant adjoint.
    Les malades de l'infirmerie étaient des victimes toutes
désignées 67 . Ils étaient onze, au total - onze bouches inutiles, lui
fit remarquer Cornelisz. Ils étaient si affaiblis par les fièvres et le scorbut
qu'ils se laisseraient faire sans opposer de résistance. De Vries se glissa
nuitamment dans leur tente et les égorgea de sa main, l'un après l'autre, sous
la surveillance de Zevanck, de Van Huyssen, et de Van Welderen, qui tinrent à
s'assurer qu'il menait sa tâche à bien. Trois jours plus tard, le jeune commis
se vit à nouveau intimer l'ordre d'assassiner quatre ou cinq autres malades.
    De ce jour, le moindre signe de maladie sur le Cimetière
du Batavia équivalait à une sentence de mort. Jan Hendricxsz et Allert
Janssen commencèrent par égorger Jan Pinter 68 , le seul soldat
anglais du navire, qui n'avait pu se lever. Puis ce fut le tour d'un jeune
garçon de cabine qui était tombé malade 69 . Quelques jours plus tard,
de Vries et Janssen s'associèrent pour assassiner Hendrick Claasz 70 ,
un charpentier. Tous ces meurtres furent, eux aussi, commis de nuit. Seuls
étaient épargnés les malades alliés des mutins : Hans Frederick, qui avait
participé à l'exécution d'un certain Warnar Dircx et devait être l'un des
proches associés de Hendricxsz, et Olivier Van Welderen, le frère aîné de
Gysbert 71 .
    Débarrassé des grabataires, Jeronimus entreprit de régler
leur compte aux survivants les plus robustes. Le soir du 12 juillet,
l'intendant adjoint envoya Hendricxsz, son exécuteur favori, supprimer
Passchier Van den Ende, un canonnier, et Jacop Hendricxsz Drayer 12 ,
qui était charpentier 72 , tous deux sous l'accusation, désormais
habituelle, d'avoir clandestinement puisé dans les réserves.
    La nuit devait être venteuse, comme d'ordinaire dans cette
partie du globe, car les hurlements des rafales et les claquements de la toile
des tentes avaient masqué les bruits de pas de

Weitere Kostenlose Bücher