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L'armée perdue

L'armée perdue

Titel: L'armée perdue Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Valerio Manfredi
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les ambassadeurs devront décrire au Roi l’état de ma phalange. Tout cela demande du temps. Je les recevrai quand le moment sera venu.”
    »Il nous raconta alors cette histoire d’âne égaré qu’il avait fait répandre par un héraut. Nous avons tous ri, bien que nous ayons l’estomac vide. Une heure s’est écoulée depuis qu’on lui annoncé la visite des ambassadeurs, et je suppose qu’il doit être en train de les recevoir à présent. »
    Xéno n’avait pas achevé son discours qu’on sonnait le rassemblement. Les soldats se précipitèrent au centre du campement.
    Cléarque apparut.
    Il avait tiré ses cheveux sur la nuque et portait une armure étincelante, une lance dans la main gauche et un bâton de commandement dans la droite. « Soldats ! commença-t-il. Des messagers du Grand Roi demandent à être reçus. Je veux que vous soyez parfaitement alignés sur quatre rangées. Il faut que nos ennemis voient une armée, non un troupeau de chèvres. Avez-vous bien compris ? Et maintenant, les gardes du corps ! »
    Il se mit à inspecter les rangs. Lorsqu’il voyait un homme mal aligné, il lui assenait un coup de bâton afin qu’il rectifiât sa position. Il choisit ensuite huit soldats, les plus grands, les plus musclés, qui lui tiendraient lieu de gardes du corps.
    À une nouvelle sonnerie de trompette, les hommes empoignèrent leurs boucliers et serrèrent les rangs, provoquant de grands cliquètements. Alors Cléarque fit annoncer aux messagers qu’il était prêt à les recevoir.
    Les trois notables se présentèrent. Non sans stupeur, ils admirèrent l’ordre des troupes, la rigueur impeccable de l’alignement, les éclats menaçants des armures. Bien que tenaillés par la faim, nos soldats bombaient le torse devant les étrangers, bien décidés à leur montrer qu’ils n’étaient pas domptés, qu’ils ne les craignaient pas, mieux, qu’ils étaient redoutables. Je vis Socrate d’Achaïe, tête nue, au centre de son régiment, Agias d’Arcadie appuyé à sa pique, telle la statue d’Arès, je vis Ménon de Thessalie, aussi étincelant que l’étoile d’Orion qui porte malheur, arborant une cape incroyablement blanche. Je vis Agasias de Stymphale, Lykios de Syracuse et Glous.
    Ils se tenaient en première ligne, à dix pas d’intervalle les uns des autres, aussi bien disposés que des pions sur un échiquier. Seul Sophos était absent. Il ne se montrait jamais dans ce genre d’occasion. Il s’évanouissait dans les airs, comme un mirage.
    Les messagers annoncèrent que le roi était prêt à décréter la trêve, à condition que Cléarque s’engageât à interdire tout pillage ou toute offensive. Le général en chef répondit qu’avant de promettre quoi que ce soit il entendait nourrir ses hommes, et les nourrir immédiatement. Faute de quoi, il attaquerait.
    Tout en prononçant ses mots, il regardait ses troupes afin que les messagers sachent qu’il ne plaisantait pas et qu’il pouvait déchaîner à tout instant les capes rouges.
    Sans doute s’était-il entendu avec ses officiers, qui se tournèrent à leur tour vers leurs hommes. Alors se produisit un miracle : les guerriers inclinèrent leur bouclier l’un après l’autre afin de refléter les rayons du soleil. Ce mouvement fut si rapide qu’on eût dit que la foudre incendiait la phalange alignée.
    Abasourdis, les Perses sautèrent sur leurs chevaux et disparurent.
    Ils ressurgirent bientôt, prouvant que le Grand Roi, ou tout du moins l’homme qui était chargé des négociations, bivouaquait non loin de là.
    Ils répondirent à Cléarque que sa demande était acceptée. Avant le soir, des guides conduiraient les troupes vers un groupe de villages regorgeant de vivres.
    Nous étions sauvés.

11
    Le trajet n’était pas aisé. Nous rencontrions des canaux remplis d’eau qu’il était impossible de traverser. Mais Cléarque donnait chaque fois l’exemple, saisissant une hache et abattant des palmiers pour fabriquer des passerelles destinées aux hommes, aux chariots, aux chevaux. Lorsqu’elles n’étaient pas assez larges par manque de matériaux, il ordonnait de démonter les véhicules, dont les roues étaient poussées à la main et le plancher tiré sur l’eau à l’aide de cordes, à l’instar de radeaux.
    En voyant le général en chef s’activer de la sorte, les plus jeunes se mirent à la besogne, rassemblant toutes les forces qui leur restaient pour écourter le délai qui les

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