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L'Art Médiéval

L'Art Médiéval

Titel: L'Art Médiéval Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Élie Faure
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élémentaires aboutissant à la
formation du langage, des premières cristallisations sociales et
des industries qui leur sont indispensables. Même transplanté par
grandes masses, et depuis des siècles, en des régions parvenues
sinon au plus haut, du moins au plus original degré de civilisation
moderne, comme l’Amérique du Nord, il reste ce qu’il était, un
enfant impulsif, ingénument bon et cruel, dont tous les actes
sortent de l’immédiate sensation. C’était pourtant la seule des
grandes races primitives habitant en grand nombre un continent
massif, et ne manquant ni de bras ni de têtes pour modifier son
milieu, trouver des rapports nouveaux et créer des idées nouvelles.
Mais ce continent est divisé en vingt tronçons par les sables, les
montagnes, les brousses, les forêts vierges, infesté de fauves,
fiévreux, torride, coupé en deux par l’équateur. Son extrême nord
qui borde la Méditerranée et où peuvent vivre les blancs a seul
participé depuis les débuts de l’histoire aux grands mouvements des
hommes vers l’avenir.
    Pourtant, si l’on remonte à ces temps-là, on
découvre une Afrique probablement identique à ce qu’elle est à
l’heure actuelle, et parvenue par conséquent au même niveau que les
tribus barbares qui peuplaient l’Europe du Nord et de l’Ouest,
peut-être à un niveau supérieur. La guerre et le commerce créaient
des relations constantes entre la vieille Égypte et le Soudan, et
l’Afrique centrale participa au développement de la civilisation
nilotique. Dès cette époque, en Nigritie, on travaillait le fer,
alors que le vieux monde connaissait à peine le travail du bronze,
et les bijoux africains que fabriquent encore aujourd’hui les
Somalis de l’Afrique orientale, les Pahouins, les Achantis, les
Haoussas de l’Afrique occidentale, étaient apportés par les
caravanes des confins de la haute Égypte sur les marchés de Thèbes
et de Memphis. Ils sont lourds, de matière épaisse et compacte sous
les incrustations de pierres bleues et rouges qui tachent de lueurs
opaques leur cercle d’or mat ou de sombre argent. Les figures
géométriques, chères à tous les primitifs, qu’ils peignent leurs
pots, ornent leurs cases, tissent leurs vêtements ou se couvrent de
zébrures la peau du visage et du corps, l’entament dans tous les
sens, courtes, grasses, denses, serrées. Comme la mathématique,
science des formes inertes, a précédé la biologie, science des
formes animées, l’ornement géométrique précède l’ornement vivant,
et tels peuples enfants incapables d’interpréter la vie, sont
parvenus dans l’art ornemental au plus haut point de puissance.
L’esprit humain, toujours, va du simple au complexe, mais
l’intelligence le ramène aux sources primitives où s’abreuvait
l’instinct, quand le grand artiste apparaît pour réunir sous la
même arabesque les formes vivantes les plus différenciées ou quand
la science moderne tente d’exprimer toutes ses conquêtes en
symboles mathématiques. C’est toujours l’émouvant accord du
sentiment le plus obscur et de la plus haute raison.
    Il ne faut pas en général chercher dans l’art
des nègres autre chose que ce sentiment encore irraisonné et
n’obéissant qu’aux besoins les plus élémentaires de rythme et de
symétrie. L’instinct qui pousse les peuples jeunes à imposer aux
formes vivantes qui sortent de leurs doigts une vague apparence
architecturale, une symétrie gauche et fruste, obéit sans aucun
doute à un désir impérieux de synthèse, mais cette synthèse est de
celles qui précèdent l’expérience et non de celles qui la suivent.
La sculpture sur bois des nègres est encore très éloignée de la
grande sculpture égyptienne, par exemple, dont l’apparition
coïncide avec un édifice social et religieux puissamment
architecturé. Peut-être n’en est-elle d’ailleurs que la première
ébauche, presque aussi lointaine que l’apparition de l’homme en
Afrique, et montant soudain, pour de longs siècles, dans la grande
vallée fertile où le noir et le blanc fusionnent, à la plus lente,
la plus haute, la plus consciente stylisation, puis, alors que
l’art nilotique s’abîme dans les sables, se prolongeant, immobile,
jusqu’à nous. Mais il ne faut pas rechercher des abstractions
métaphysiques là où il n’y a que des sensations aussi courtes que
violentes, une tentative de satisfaire aux besoins les plus
immédiats d’un fétichisme

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