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L'assassin de Sherwood

L'assassin de Sherwood

Titel: L'assassin de Sherwood Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Paul C. Doherty
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pas revenu plus tôt ? Et comment t’es-tu blessé ?
    Maltote baissa les yeux.
    — Pour deux raisons, répondit gaiement Ranulf. D’abord, il s’est laissé entraîner dans une partie de dés où il a tout perdu. Ensuite, continua-t-il en donnant une bourrade amicale à Maltote et en adressant un sourire de connivence à Corbett, il a essayé de se refaire en relevant le défi d’un archer.
    Corbett étouffa une exclamation.
    — Voyez-vous, mon maître, poursuivit Ranulf, intarissable, notre brave courrier a tiré d’abord une flèche, puis en a sorti une autre du carquois ; mais à ce moment-là, il s’est pris les pieds dans son arc {19} et le résultat, conclut Ranulf, lèvres pincées pour ne pas éclater de rire, c’est qu’il s’est retrouvé les quatre fers en l’air et blessé au genou.
    Corbett n’en croyait pas ses oreilles. Il aurait bien sermonné Maltote sur le danger que représentait pour lui le maniement des armes, mais le jeune homme avait déjà l’air bien marri : sa pâleur faisait ressortir les marques de brûlures autour des yeux, séquelles de l’attaque à la chaux qu’ils avaient subie quelques mois auparavant, lors d’une enquête sur les assassinats atroces de prostituées londoniennes {20} . Corbett lui tapa sur l’épaule.
    — Oublions tout cela ! Écoutez plutôt : je vais profiter de l’absence de Branwood pour aller à Kirklees. Ne me posez pas de questions ! Observez ce qui se passe ici ! Et Ranulf, tant que j’y pense, je verrai ton ami Rahere à mon retour.
    Le clerc quitta la forteresse dans l’heure qui suivit, accompagné jusqu’à la porte principale par ses deux serviteurs. Le capuchon rabattu pour ne pas être reconnu, il guida sa monture dans les rues grouillantes de monde, où les affaires allaient bon train. Sur la place du marché, il lui fallut se frayer un chemin dans la foule qui se pressait pour voir une meute hargneuse de mâtins faire mine d’attaquer un grand ours noir. Dressé sur ses pattes arrière en une attitude de défi, l’énorme animal grondait et retroussait des babines qui découvraient des crocs d’ivoire, tout en lançant de redoutables coups de griffe, ce qui ravissait la populace et excitait les chiens. Corbett descendit une ruelle près de St Mary à la recherche d’un écrivain public. Un porteur d’eau lui en signala un, de l’autre côté de l’église. En arrivant sur le parvis, il s’arrêta net et poussa un juron : les corps nus des deux prisonniers s’étalaient sur les marches de l’église. Comme l’exigeaient les édits municipaux, on les avait dépouillés de leurs vêtements et exposés à la vue de tous, pour que quelqu’un pût les identifier. Les cadavres étaient couchés sur le côté dans des cercueils rudimentaires, ce qui permit à Corbett de voir les plaies pourpres et hideuses causées par les flèches tirées dans le dos. Le clerc récita une prière à voix basse et continua son chemin.
    À l’un des étals, près de l’entrée du cimetière St Mary, il dénicha un écrivain public qui lui fit un croquis de la région en lui indiquant l’itinéraire conduisant au prieuré de Kirklees. Le scribe prit tout son temps en jacassant comme une pie : certains avaient vu des lutins qui, assis sur une tombe, se repaissaient de chair humaine et les routes partant de Nottingham étaient toutes infestées d’esprits malins. Corbett piétinait d’énervement, mais l’homme acheva la carte. Corbett s’en saisit, le paya et quitta le cimetière.
    Il avait perdu une bonne heure avec ce bavard. Lorsqu’il franchit les portes de la salle et se joignit à la longue file des paysans sur le chemin tortueux, il sentit que sa sérénité s’était envolée. Corbett était, par nature, un homme solitaire, accoutumé aux subtiles intrigues de cour tout comme aux traquenards des bas-fonds londoniens. Cela lui avait donné un sens aigu du danger. Il était taraudé par l’inquiétude à présent, sûr d’être observé et suivi. Au début, il bénéficiait de la présence des autres voyageurs, mais ceux-ci quittèrent bientôt la grand-route pour regagner leurs fermes ou des hameaux isolés. Il se retrouva seul, dans le silence que rompaient seulement les disputes des petits passereaux dans les haies, le chant soudain d’un pinson ou le grésillement régulier des grillons. Il fit glisser son épée dans son fourreau et laissa son cheval aller l’amble, tandis que, l’oreille aux aguets, il

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