L'assassin de Sherwood
dans Sa sainte Lumière !
Quelques soldats de la garnison se joignirent à eux. Frère Thomas fit le signe de la croix et commença la messe. L’office fut des plus simples et, comme il était de coutume à une messe de requiem, frère Thomas récita le Dona Eis trois fois, après la bénédiction finale. Corbett écouta les paroles avec émotion : « Accorde-leur le repos éternel, ô Seigneur, qu’ils reposent dans Ta paix et Ta lumière ! Amen ! »
Il se rappela la remarque de frère Thomas au début de la cérémonie, à propos de Dieu accueillant les âmes des deux morts dans la lumière, et pensa aux trois flèches enflammées qui avaient rayé le velours de la nuit. Ces flèches étaient-elles une prière ? Un hommage ? – Ou une menace ?
Il quitta la chapelle et monta à la chambre de Vechey. Ranulf y avait apposé des scellés aux armoiries de son maître. Corbett les brisa et entra dans la pièce mal aérée. Il prit un drap du lit, rassembla certains objets ayant appartenu à Vechey et, refermant la porte derrière lui, regagna ses quartiers. À sa grande surprise, Ranulf, déjà levé et habillé, était assis près de Maltote qui faisait une mine d’enterrement.
— Ainsi, notre messager est de retour ! s’exclama Corbett, dissimulant sous son lit les objets pris précédemment dans la chambre de Vechey.
Maltote s’avança vers lui en boitillant.
— Seigneur Dieu, mon garçon ! s’écria le clerc. Que t’arrive-t-il ?
— Je me suis rendu à Southwell selon vos instructions, Messire.
— Et alors ?
— Guy de Gisborne m’y a retenu.
— Pour quelle raison ?
Corbett regardait, interloqué, le bandage entourant le genou du jeune homme.
— Installe-toi confortablement et raconte-nous ce qui s’est passé.
— Je vais vous le dire, moi, intervint Ranulf. Gisborne est entré dans Sherwood.
Corbett poussa un gémissement en fermant les yeux.
— Ses troupes sont arrivées hier soir, poursuivit Ranulf. Elles ont commencé à fouiller la forêt au point du jour. Maltote a chevauché toute la nuit pour nous apporter cette nouvelle. Les portes du château étant barrées, il est descendu au Pèlerin de Jérusalem.
— Pourquoi Gisborne ne t’a-t-il pas laissé partir immédiatement ?
— Parce qu’il savait que vous essaieriez de le détourner de ce projet, répondit Ranulf à la place de Maltote. C’est pour cette raison qu’il l’a retenu.
Corbett alla regarder par la fenêtre. Il revoyait la face rubiconde de Gisborne, ses traits burinés et son nez camus que surmontaient des yeux d’une dureté de pierre. Excellent soldat, combattant-né, Gisborne avait accompli maintes prouesses sur les Marches écossaises et, à en croire les clercs de Westminster, éprouvait une haine viscérale pour Robin des Bois. Il n’avait jamais admis que le roi accordât une amnistie au hors-la-loi. Mais, selon certaines rumeurs de la Chancellerie, Édouard lui avait fait jurer sur des reliques, lors de la campagne écossaise, qu’il n’attenterait jamais à la vie de Robin. Lorsque Robin était retourné à ses brigandages, Gisborne, qui possédait des terres dans la région et connaissait parfaitement la forêt de Sherwood, avait immédiatement mis son épée au service de la Couronne et offert de le pourchasser. Le roi avait refusé, préférant, après l’attaque contre Willoughby, confier la mission à Corbett. Le monarque avait également envoyé à Gisborne des mandats lui permettant de lever des troupes. Celles-ci, néanmoins, ne devaient être déployées qu’avec l’assentiment de Corbett. Mais Gisborne s’était montré fin renard : l’arrivée de Maltote ne signifiait-elle pas que Corbett approuvait tacitement ses mouvements de troupes ? Il avait donc retenu le messager, s’assurant ainsi que le clerc ne pouvait soulever aucune objection.
— Qui d’autre est au courant ? lança Corbett d’une voix rauque.
— Sir Peter Branwood, bafouilla Maltote. Les gardes l’ont prévenu tout de suite.
Corbett appuya sa joue contre la croisée pour se rafraîchir.
— Et, naturellement, marmonna-t-il, Sir Peter ne décolère pas devant cette façon d’agir !
— Pire ! rectifia Ranulf. Naylor et lui ont emmené une compagnie vers l’orée ; pour aider Gisborne ou pour l’arrêter, je ne saurais le dire.
Corbett se retourna d’un bloc, l’air excédé, et s’approcha de son messager au visage de chérubin.
— Et toi, pourquoi n’es-tu
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