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L’assassinat de Jesse James par le lâche Robert Ford

L’assassinat de Jesse James par le lâche Robert Ford

Titel: L’assassinat de Jesse James par le lâche Robert Ford Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Ron Hansen
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discret, introverti et réservé ; et il n’était pas
inconcevable que ce fussent des particularités de caractères correspondantes
qui eussent incité le hors-la-loi à faire confiance au jeune Ford.
    Mrs Moses Miller, la mère de Clell et Ed
Miller, qui souffrait de parésie, fit elle aussi une apparition chez
Seidenfaden où, s’appuyant sur deux cannes, elle s’approcha centimètre par
centimètre du lit de glace avant de se camper devant le corps, tremblotante. De
nombreux journalistes insistèrent pour qu’elle leur fît part de son sentiment
concernant l’homme qui était plus ou moins responsable de la mort de ses deux
fils, mais elle refusa de prononcer la moindre syllabe et se contenta de se
tamponner les yeux avec un mouchoir en dentelle de lin.
    Pendant ce temps-là, à l’est de Richmond, un
gamin de huit ans nommé Tom Jacobs batifolait sous la pluie dans un bois qui
reverdissait, à la recherche de son chien. Se laissant guider par les
aboiements du corniaud, il se faufila entre des chênes noirs, des érables, des
pommiers sauvages et découvrit l’animal en train de jouer à la roulette russe
avec un putois, claquant des mâchoires à vide de droite et de gauche, tandis
que son opposant dénudait ses dents blanches affilées et battait en retraite au
milieu de la végétation d’une ravine boueuse érodée par les averses. L’enfant
remarqua que le putois était en train de manger quelque chose. Il entrevit une
couverture en laine boueuse, des dents effrayantes, une main gauche desséchée à
laquelle il manquait trois doigts et fonça prévenir son père, terrifié.
    Perry Jacobs fut tellement saisi par l’effroi
de son fils qu’il sauta en selle et alla tout droit à Richmond trouver le
constable John C. Morris et le coroner Richard Bohanon, puis tous trois
suivirent Tom Jacobs jusqu’aux terres que la veuve Bolton louait au vieux
Harbison, où ils exhumèrent le cadavre de Robert Woodson Hite, en décomposition
dans une gangue de glaise et de feuilles de pommier qui se désagrégeait sur sa
poitrine sous l’effet des gouttes. Il avait les yeux arrachés, sa bouche
semblait crier et sa blessure à la tempe avait été agrandie par des oiseaux. Les
trois hommes apportèrent en grimaçant le corps jusqu’à un chariot et l’enveloppèrent
dans une bâche en caoutchouc, puis arrêtèrent Martha Bolton et Elias Capline
Ford pour les interroger sur le meurtre de Hite.
    Elias admit que la dépouille était celle de
Wood Hite, mais Martha soutint qu’elle connaissait seulement cet homme sous le
nom de Papy Ronchon ; hormis cela, leurs dépositions à propos de la
fusillade de décembre concordaient et attribuaient toutes les deux le meurtre à
Dick Liddil. Dans la mesure où deux des frères Ford étaient déjà en prison – ce
qui semblait constituer une garantie suffisante qu’Elias et Martha « ne
prendraient pas la poudre d’escampette » (pour reprendre l’expression du constable)
–, ceux-ci furent libérés sous caution. Le cadavre de Wood Hite fut placé sur
la table de l’accusation dans la salle d’audience du tribunal de Richmond dans
l’attente de l’enquête du coroner, puis, avec une hâte malséante, le constable
Morris fit parvenir au gouverneur Crittenden le message suivant : « J’ai
ici le cadavre de Wood Hite et suis en possession des éléments nécessaires à
son identification. Que dois-je en faire ? Je revendique la récompense. »
    La cupidité de Morris indigna tellement le
gouverneur qu’il envisagea de porter plainte contre le constable, mais, s’estimant
en partie responsable de la réaction du policier, il répondit seulement :
« Compte tenu du temps, enterrez-le. Pas de récompense pour ce cadavre-là. »
    Étonnamment, Bob et Charley ne s’émurent guère
de cette découverte. Peut-être leurs sources de distraction et de préoccupation
étaient-elles déjà trop abondantes pour qu’ils appréhendent les implications de
ce nouveau rebondissement, à moins qu’ils n’eussent nonchalamment supposé que
le gouverneur les amnistierait de tous leurs crimes passés. Toujours est-il qu’ils
continuèrent à se comporter comme s’ils n’avaient rien fait de bien méchant et
que Charley fit même mine d’être blessé quand il apprit que son frère et lui ne
seraient pas autorisés à assister aux obsèques de Jesse ce jeudi-là.
    La pluie se
poursuivit jusque dans l’après-midi du 5 avril et, bien que les cabriolets et
les

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