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L’assassinat de Jesse James par le lâche Robert Ford

L’assassinat de Jesse James par le lâche Robert Ford

Titel: L’assassinat de Jesse James par le lâche Robert Ford Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Ron Hansen
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de qualité
sont assurés de trouver leur bonheur chez Boston. »
    Les Ford demeurèrent en cellule jusqu’à Pâques,
refusant toute visite le jour où Jesse fut mis en terre. Pour passer le temps, ils
bavardaient avec le shérif Thomas et Corydon Craig, le fils du marshal, jouaient
aux cartes, au jeu de puce, lisaient les divers récits d’entretiens qu’ils
avaient accordés dans les journaux. La congestion pulmonaire et les maux d’estomac
de Charley semblaient avoir empiré sous l’effet de l’excitation de toute cette
semaine, car il toussait continuellement pendant la nuit, vomissait
régulièrement son dîner dans son vase de nuit et racontait piteusement à tous
les journalistes qu’au cours des cinq années précédentes, il n’avait pas joui d’une
seule journée de bonne santé.
    Bob, lui, apprenait à apprécier l’attention
dont il était l’objet, et même à s’en délecter. Il se mit à fumer des cigarettes
afin de se donner l’air plus mûr, plus dangereux, plus distingué. Il pesa les
mérites de la moustache. Il flairait l’odeur de la poudre sur ses doigts. Il
sentait encore le recul du pistolet faisant feu, entendait encore le
gémissement de Jesse lorsqu’il s’était effondré de la chaise – mais c’était
tout, il n’avait vu aucun fantôme, il n’avait pas été interpellé par des voix
désincarnées, il ne faisait pas de cauchemars. Il lui arrivait de s’enquérir, songeur,
comme pris d’une lubie, si personne n’avait encore vu Frank James, mais il ne
craignait pas vraiment sa vengeance – comme si nul ne pouvait l’atteindre
désormais que Jesse était six pieds sous terre.
    Afin de satisfaire aux nombreuses demandes de
clichés qu’il recevait, Bob consentit à poser pour une photographie en studio
durant la deuxième semaine d’avril. Il était vêtu d’un pantalon vert en laine
et d’une veste grise en tweed dont seul le bouton au-dessous des courts revers
du col était attaché et qui s’entrouvrait sur un gilet vert. Il regimba à s’asseoir
sur une chaise et proposa plutôt un bel escalier sculpté incurvé ; il s’installa
sur la cinquième marche, la main droite pendante, appuyée sur le genou droit, la
gauche serrant un Colt Peacemaker étincelant – un accessoire fourni par le
photographe – posé avec artificialité sur la cuisse gauche et accaparant l’attention
de l’observateur. Il ressemblait à un commis d’épicerie surpris par hasard avec
un long revolver à la main. Lorsqu’un journaliste voulut savoir pourquoi, puisque
Bob était droitier, il tenait l’arme de la main gauche, Bob répliqua, comme s’il
n’était besoin d’en dire plus : « Jesse était gaucher. »
    Ce fut aussi début avril que les Ford se
rendirent à Kansas City à cheval, chaperonnés par deux adjoints. Une fois
là-bas, dans les coulisses du Théâtre Comique, parmi les câbles sans fin, les
contrepoids et les poulies, ils reformulèrent la tragédie dans leur tête en
regardant un Russe en costume d’opéra lancer des couteaux sur des cartes à
jouer que tenait une jolie femme. Charley était si agité et nauséeux qu’il
fumait cigarette sur cigarette et se servait de l’une pour allumer l’autre ;
mais Bob, lui, était ravi, sous le charme : l’atmosphère était excitante, sympathique,
excentrique, provocante – précisément le genre d’environnement où il était
susceptible d’être heureux. Il discuta avec le régisseur, observa un homme qui
jonglait avec des assiettes dans sa loge, attrapa un torticolis à force de
scruter le cintre et les rideaux, les couronnements et les toiles de fonds
suspendus au gril. Une femme âgée lui souligna les cils à l’aide d’un fusain qu’elle
avait léché et lui étala du rouge sur les lèvres avec l’auriculaire.
    « Je ne sais pas ce qu’on fabrique ici, lâcha
Charley après avoir subi le même traitement cosmétique.
    — On instruit », répondit Bob en
peignant sa chevelure brun roux face à un miroir.
    Les adjoints prêtèrent aux Ford leurs
ceinturons et leurs pistolets vides, puis allèrent se poster dans la fosse d’orchestre
avec des fusils en travers de la poitrine. Enfin, un comique avec une moustache
spiralée et une barbiche cirée acheva sa relation facétieuse des déboires d’un
visiteur de Boston dérouté et déboussolé en annonçant avec emphase :
« J’ai à présent le singulier privilège de souhaiter la bienvenue dans
cette salle aux deux courageux jeunes

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