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Le Baiser de Judas

Le Baiser de Judas

Titel: Le Baiser de Judas Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Hubert Prolongeau
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avaient accompagné sa fin. Mais
elle avait eu aussi des moments de lucidité où elle avait parlé de lui, exprimant
à la fois le regret de ne pas le revoir et la fierté de ce qu’il était en train
d’accomplir. Elle était morte en pensant à lui. Hannah avait été recueillie par
sa tante.
    « C’est vrai ? Elle a vraiment dit
ça ? »
    Barabbas jura. Ils quittèrent les bains une
heure plus tard. Judas demanda à Barabbas de ne plus lui parler de sa mère. Ils
passèrent une partie de l’après-midi à lui couper les cheveux. Des vêtements, que
Samuel était allé acheter, achevèrent de le transformer. Ils rirent plusieurs
fois, plus proches peut-être qu’ils ne l’avaient jamais été. Puis Barabbas
partit, après avoir réussi à convaincre Judas qu’il serait absurde de se rendre
à Chorazim, où les Romains de toute évidence l’attendaient…
    « J’essaierai de repasser dans quelques
mois. D’ici là…
    — Quelques mois ? Mais c’est très
long.
    — Je sais. Je te promets d’essayer de te
trouver quelque chose. Mais te reprendre avec nous serait suicidaire et pour
toi et pour la troupe. Tu sais ce qu’on dit dans le beau pays d’Hérode : même
les oiseaux dans le ciel sont de la police. »
    Ils se quittèrent avec une émotion qui n’était
pas feinte.
    Judas ne comprit
vraiment tout ce qu’il venait de perdre qu’après le départ de Barabbas. Il
avait revu sa mère plusieurs fois depuis qu’il avait découvert ses liens avec
le chef rebelle, et elle avait été suffisamment fine pour que rien entre eux ne
soit gâché. Mais les dangers qu’il y avait à se déplacer avaient rendu leurs
rencontres trop rares. Il s’était toujours dit que, plus tard, il réparerait
cela, qu’ils se griseraient l’un de l’autre quand ils seraient à nouveau réunis.
Et maintenant c’était fini. C’était fini. Il se répétait les mots, sans arriver
à leur donner vraiment un sens.
    « Tu vas bien ? »
    La sollicitude de Samuel était pénible. Il
retourna voir Marie, mais il ne parvint pas à mêler le souvenir de sa mère au
décor dans lequel elle vivait et ne lui en parla pas.
    Il brûlait d’envie de retourner à l’action, comme
si donner à son tour la mort pouvait combler le vide qu’elle creusait dans sa
vie. Quand il croisait un Romain ou un collaborateur notoire, il lui arrivait
instinctivement de porter sa main à sa ceinture où ne pendait pourtant plus
aucun couteau. Il sentait en lui une joie trouble à repenser à ces années de
tuerie, et il était effrayé par ce qu’il croyait y voir. Il se mit alors, pour
contrer ce manque, à fréquenter plus assidûment la synagogue et à se rapprocher
du dieu qui, pour lui, excusait tout ce qu’il avait fait.
    Il se perdait dans
ce désarroi, fait de douleur et de frustration, quand il vit un jour pénétrer
chez Samuel un étrange personnage, vêtu d’une longue tunique blanche. Ses
cheveux étaient coupés très court, et son teint rose comme ses joues rondes lui
donnaient un air d’enfant trop vite poussé.
    Judas, qui était en train de préparer la
fritte, regarda Samuel, prêt à éclater de rire.
    « Chut : c’est un des fous du désert. »
    Samuel s’avança vers le jeune homme.
    « Puis-je vous aider en quoi que ce soit ?
    — J’appartiens au groupe d’esséniens de
Sion. Certains de nos frères sont venus nous rendre visite la semaine dernière,
et ils ont été séduits par la qualité d’un pot que ma mère m’avait donné et qui
avait été acheté ici. Ils auraient souhaité savoir s’ils pouvaient en passer
commande pour leur monastère de Qumran.
    — Oui, bien sûr. Cela dépend un peu de la
quantité que vous souhaitez, mais si tu nous en laisses le temps…
    — Là-haut, ils sont deux cents. Nous ne
vivons pas dans le luxe. Je pense qu’une centaine suffirait, pour le moment au
moins.
    — Repasse dans une semaine : ce sera
prêt.
    — L’un de vous pourrait-il venir avec moi
et les porter jusqu’à Qumran ?
    — Cela coûtera un peu plus cher, mais c’est
possible, bien sûr. »
    L’homme s’inclina. Quand il fut sorti, Judas
se tourna vers Samuel.
    « Qui est ce fou ?
    — C’est un des esséniens de Jérusalem. Ils
habitent sur la colline de Sion.
    — Ils ne sont pas dans le désert…
    — Les fondateurs, si, mais il y a des
adeptes en ville. Je crois qu’il y en a des mariés et des célibataires. Les
célibataires vivent tous à Qumran, en

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