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Le Bal Des Maudits - T 1

Le Bal Des Maudits - T 1

Titel: Le Bal Des Maudits - T 1 Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Irwin Shaw
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Michael.
    –  Pas pour l’instant, dit Michael. Je ne serai pas mûr pour l’armée avant deux ou trois mois.
    –  Dans trois mois, répliqua Pharney, en souriant par-dessus l’épaule de Michael à deux beautés éblouissantes, dans trois mois, vous cultiverez des fleurs à Yokohama.
    –  À vrai dire, reprit Michael, ne sachant comment éviter de donner à ses mots une tournure héroïque, je crois que je préférerais entrer dans l’armée comme simple soldat.
    –  Ça alors, dit Pharney. Mais pourquoi, Seigneur ?
    Michael eut soudain conscience d’avoir trop parlé.
    Quoi qu’il puisse dire à présent, il aurait toujours l’air d’avoir voulu se faire valoir.
    –  C’est toute une histoire, dit-il. Je vous la raconterai une autre fois.
    –  Vous voulez que je vous dise ce qu’est le simple soldat dans l’armée ? offrit jovialement Pharney. De la chair à saucisse. Hachée menu, avec ou sans graisse. Bonne guerre, mes agneaux !
    Il leur fit un signe amical et continua son chemin entre les tables.
    Cahoon regarda d’un air dégoûté deux comédiens qui se dirigeaient vers le bar en riant très fort et serrant les mains de tous les consommateurs.
    –  Je donnerais volontiers cinq cents dollars et deux places pour les premières de toutes mes pièces au Haut Commandement japonais, s’il voulait bombarder cette ville dès demain. Mike, dit-il sans regarder Michael, je vais dire quelque chose de très égoïste.
    –  Allez-y ! dit Michael.
    –  Ne vous engagez pas avant que cette pièce soit mise en route. Je suis trop fatigué pour monter un spectacle moi-même. Et vous avez été dans le coup depuis le début. Sleeper est un sale individu, mais sa pièce est bonne, et il faut que nous la montions…
    –  Ne vous inquiétez pas, dit doucement Michael, se demandant au fond de lui si cet honorable prétexte de l’amitié n’était pas une excuse toute faite pour remettre son engagement à plus tard.
    –  Ils se passeront bien de vous quelques mois, dit Cahoon. Ce n’est pas ça qui nous empêchera de gagner la guerre.
    Il cessa de parler en voyant Sleeper se frayer un chemin à travers la foule, en direction de leur table. Sleeper s’habillait comme un jeune écrivain d’avant-garde, chemise de travail bleu foncé et cravate en bataille. C’était un bel homme arrogant et bien bât i qui, plusieurs années auparavant, avait écrit deux pièces incendiaires sur le destin de la classe ouvrière. Il s’assit sans leur serrer la main.
    –  Nom de Dieu ? gronda-t-il, quelle idée de se donner rendez-vous dans un endroit pareil.
    –  C’est votre secrétaire qui a arrangé ce rendez-vous, lui rappela Cahoon d’un ton suave.
    –  Ma secrétaire, répliqua Sleeper, a deux ambitions dans la vie. Coucher avec un producteur hongrois d’Universal et faire de moi un gentleman. Elle appartient à ce genre de filles qui vous disent toujours qu’elles n’aiment pas vos chemises. Vous voyez le genre ?
    –  Moi non plus, je n’aime pas vos chemises, grommela Cahoon. Avec deux mille dollars par semaine, vous pourriez porter autre chose que ces horreurs.
    –  Double scotch, cria Sleeper au garçon.
    Puis il enchaîna :
    –  Alors, ça y est, nous y sommes, jusqu’au cou !
    –  Avez-vous récrit la scène deux ? demanda Cahoon.
    –  Pour l’amour du ciel, Cahoon ! s’écria Sleeper. Vous imaginez-vous qu’on peut travailler, par un jour comme celui-ci ?
    –  Je vous demandais ça en passant, dit Cahoon.
    –  Du sang  ! dit Sleeper, ressemblant plus que jamais, songea Michael, il l’un des personnages de ses pièces. Du sang sur les palmiers, du sang sur les ponts, du saur, sur les plages, et il me demande si j’ai récrit la scène deux ! Réveillez-vous. Un mo ment cosmique. Le tonnerre gronde dans les entrailles de la terre. La race humaine torturée s’agite et saigne dans son sommeil.
    –  Gardez ça pour la scène du jugement, dit Cahoon.
    –  Assez !
    Sleeper roula des yeux furibonds, sous ses lourds sourcils broussailleux.
    –  Assez de ces plaisanteries faciles, style Broadway. Ce temps-là est passé, Cahoon, passé pour toujours. La première bombe est tombée hier au milieu de la dernière facétie ! Où est l’Angliche.
    Il regarda autour de lui, en battant la charge sur le bord de la table.
    –  Hoyt nous a prévenus qu’il serait un peu en retard, dit Michael. Il va arriver.
    –  Il faut que je retourne au studio, dit

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