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Le Baptême de Judas

Le Baptême de Judas

Titel: Le Baptême de Judas Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Hervé Gagnon
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prisonnier ne l’avancerait à rien. Esclarmonde refuserait d’échanger la première part contre notre vie. Ses propos avaient été clairs, même lorsqu’il s’agissait de la vie de sa nièce.
    Jamais je n’avais été enfoncé aussi profondément dans les ténèbres. Je venais de rater la seule chance que j’avais de sauver Cécile. Pire encore, je risquais fort de ne pas revenir de là où on m’emmenait. Ce qui subsistait de la Vérité resterait derrière la muraille de Montségur et Cécile en paierait le prix ultime.
    Et moi, j’aurais l’éternité pour la pleurer. Même si mon âme était sauvée, le paradis me serait un enfer.
    Nous chevauchâmes pendant des jours et des nuits, sans jamais nous arrêter plus de quelques minutes. Dans le noir, je perdis vite toute notion de la direction dans laquelle nous allions. Je tentais de mon mieux d’utiliser la chaleur du soleil sur mon visage pour repérer le midi, vers lequel nous semblions nous diriger, mais la toile épaisse rendait l’opération hasardeuse et je fus bientôt tout à fait désorienté. Périodiquement, on détachait la ficelle de mon cou pour retrousser la cagoule et porter à ma bouche un morceau de pain dans lequel je devais mordre, nourri comme un enfançon. Puis on la rabaissait. Aucun mot n’était prononcé et seul le bruit des sabots rompait le silence. De temps à autre, on nous permettait de descendre pour répondre aux besoins de la nature, mais même à ces occasions, on ne nous détachait pas.
    —    Ugolin ? appelai-je pendant une de ces pauses, désirant savoir si mes compagnons étaient avec moi ou si nous avions été séparés.
    —    Ici ! répondit de loin la voix du géant.
    Aussitôt, un bruit de coup retentit, suivi d’un grognement de douleur contenu. Puis une violente claque me fit voir des étoiles.
    —    Silence ! ordonna une voix sur ma gauche.
    Je me tus, rassuré. Si le Minervois était là, il était probable qu’Odon se trouvât près de lui. Quant à Eudes et à Roger Bernard, ils étaient capables de prendre soin d’eux-mêmes.
    Bientôt, la fatigue me mit dans un état d’abrutissement tel que je m’abandonnai à mon sort. Que pouvais-je faire d’autre ? Bien sûr, il m’aurait suffi d’une pression des cuisses pour que Sauvage s’élance au galop. Mais pour aller où ? Je n’avais aucune idée d’où nous étions et je n’y voyais goutte. On aurait tôt fait de me rattraper et, si le maudit templier avait deux sous d’intelligence, ce que l’expérience récente ne m’autorisait pas à mettre en doute, il s’en prendrait à Odon pour me forcer à me tenir tranquille. Je n’avais pas le droit de courir ce risque. J’avais promis à Pernelle de veiller sur lui et, déjà, le pauvre garçon était prisonnier. Empirer les choses ne me mènerait à rien. Je n’avais d’autre choix que de laisser les événements suivre leur cours. Tôt ou tard, nous atteindrions notre destination et je saurais de quoi il retournait. Alors, je pourrais évaluer mes options.
    Dans un peu plus d’une semaine, Montfort et Amaury devraient admettre que la première part ne leur serait pas remise et ils n’hésiteraient pas à exécuter ma tendre amie pour se venger. À moins que je trouve une façon de la tirer de là. Mais j’étais entre les mains d’un ennemi inconnu et je ne voyais pas comment y arriver. J’en étais réduit à espérer mourir avant Cécile. Ainsi, je n’aurais pas à vivre ce tourment.
    Je finis par sentir que nous gravissions une pente, d’abord douce, puis de plus en plus abrupte. Je perçus les hésitations croissantes de Sauvage et reconnus le son que faisaient ses sabots. Il marchait sur des cailloux et des pierres. Selon toute vraisemblance, nous nous trouvions sur un sentier rocailleux. À maintes reprises, il glissa. Ses ébrouements m’indiquaient qu’il était nerveux.
    Nous montâmes ainsi pendant des heures et des heures. De temps en temps, je sentais une branche fouetter ma cagoule. Puis le vent se leva et devint glacial, m’indiquant que nous avions atteint une bonne altitude. J’étais transi et je frissonnais. Le hululement d’une chouette me permit de déterminer qu’il faisait nuit et je pouvais sentir la fatigue de Sauvage. Nous finîmes par arriver sur un plateau.
    —    Halte ! dit le templier. Les bêtes doivent se reposer. Qu’elles soient nourries et abreuvées.
    —    Et nous ? fit la voix étouffée d’Ugolin derrière

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