Le Baptême de Judas
qui t’a conduit ici. Maintenant, tu devras mettre ton bras au service du Bien. La tâche qui m’attendait était sans doute impossible, mais il n’était pas dit que j’échouerais sans avoir tout essayé, jusqu’à mon dernier souffle. Cécile le méritait. La Vérité aussi.
— Métatron, maudit châtron efféminé, murmurai-je pour moi-même, si tu tiens à ta Vérité autant que tu le dis, le temps serait bien choisi de lever ton petit cul étroit pour me venir en aide. Et au cas où tu en aurais l’impression, détrompe-toi : ceci n’est pas une supplique. Je ne m’abaisserais pas à te demander une faveur, même pour éviter l’enfer. Considère plutôt mes paroles comme l’amorce d’une négociation. J’ignore pourquoi la Vérité lui importe tant, lui qui est omnipotent, mais, puisque je suis interdit de prière, dis à Dieu que s’il souhaite obtenir ce qu’il veut, il devra intervenir. Sinon, il se retrouvera les mains vides.
Pour bien faire comprendre à l’archange l’ampleur du mépris qu’il m’inspirait, je crachai sur le sol. Puis le visage de Bertrand de Montbard me traversa l’esprit, comme toujours quand je ne savais que faire.
— Quant à vous, maître, ajoutai-je en laissant échapper un soupir las, où que vous soyez, votre bras à ma droite serait apprécié plus que jamais. Si vous êtes en mesure de me le prêter et que vous le souhaitez, évidemment. Sans vous, je serais un homme encore plus mauvais. Je ne deviendrai jamais celui que vous aviez espéré, mais si je parviens à préserver la Vérité, je peux peut-être encore m’en rapprocher un peu. Aidez-moi.
C’était le plus près que je pouvais m’approcher de la prière et je n’entretenais aucune illusion sur les résultats de ma démarche. Je ne voyais pas comment préserver la Vérité sans trahir les Neuf ou sacrifier Cécile et mes compagnons. Le dilemme était absolu.
— Tu parles tout seul, maintenant ? ricana avec mépris un des soldats qui m’encadraient.
— Ta compagnie n’est guère réjouissante, figure-toi, rétorquai-je. Mais si tu souhaites m’entretenir, je suis tout ouïe.
Quand je reportai mon attention sur le chemin, j’eus l’impression que la marque de la crosse que l’archange avait tracée dans la chair de mon épaule gauche brûlait. Puis la cicatrice qui encerclait ma gorge en fit autant. Je ne savais pas si je devais y voir un bon ou un mauvais augure.
2
Feu sacré.
3
La Lumière après les Ténèbres.
4
Une lieue vaut 4,5 km.
5
Je suis la résurrection et la vie. Celui qui croit en moi vivra, quand même il serait mort ; et quiconque vit et croit en moi ne mourra jamais. Jean 11,25-26.
6
Mon âme glorifie le Seigneur et mon esprit exulte de joie en Dieu, mon Sauveur !
7
La justice nous abandonne, le salut reste éloigné, car la vérité a trébuché sur la place, et la droiture est tenue à l’écart. La vérité a disparu ; ceux qui rompent avec le mal s’exposent à tout perdre. Le Seigneur l’a vu, et ses yeux n’ont pas supporté qu’il n’y ait plus de justice. Isaïe 59,14-15.
8
Ceux qui mettent leur confiance dans le Seigneur comprendront la vérité ; ceux qui sont fidèles resteront avec lui dans son amour, car il accorde à ses élus grâce et miséricorde. Sagesse 3,9.
9
Souviens-toi que tu mourras.
10
Au nom du Père, du Fils et du Saint-Esprit.
11
La force de l’habitude est grande.
Chapitre 2 Espoir
Au milieu du mois de mars, le temps s’éclaircit. Les nuages noirs qui nous avaient accompagnés depuis Gisors cédèrent la place à un soleil resplendissant. Mais sa lumière n’atteignait ni mon cœur, ni mon âme. Dès qu’Orléans fut en vue, une troupe à cheval, qui nous avait visiblement attendus, vint se greffer au convoi. Celui-ci comptait désormais près de deux cents hommes - autant de bouchers qui s’en allaient massacrer impunément des innocents dans le Sud. Il suffisait de les observer un peu pour voir la lueur de convoitise briller dans leurs yeux. Chacun de ces hommes se fichait de la foi. La pensée des rapines auxquelles ils se livreraient et des butins qu’ils rapporteraient était leur unique religion. Ils étaient fort bien armés et chevauchaient des montures de qualité. Nul doute qu’ils seraient des croisés efficaces. Leur discipline semblait excellente.
L’officier qui les menait était un certain Guillaume des Barres, seigneur de Chalons. Les conversations tenues
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