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Le bouffon des rois

Le bouffon des rois

Titel: Le bouffon des rois Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Francis Perrin
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tour à
Sa toute-puissante Majesté qui n’aurait pas le plaisir de courtiser ni d’abuser
sa femme. Pendant ce temps-là, Bonnivet faisait porter une missive la priant de
venir rejoindre son cher époux accompagnée de la belle copie de la bague.
    Et voilà pour quelle raison, en cette belle fin de journée
d’été, Madame de Châteaubriant se tenait devant nous et que « mon
cousin », tel un prisonnier de l’amour, la contemplait comme une personne
surnaturelle.
    Le mari crut défaillir lorsqu’il comprit, un peu tard, qu’il
avait été joué. Allait-il, l’imprudent, lutter sans espérance ? Il n’y
songea pas un seul instant, comptant sur la sagesse de son adorable épouse. Et
les fêtes, succédant aux bals, les bals précédant les chasses n’émoussèrent pas
la résistance de Madame de Châteaubriant dont la beauté parfaite emportait tous
les cœurs de la cour. Sa taille très menue lui donnait l’élégance, son visage
très doux reflétait l’innocence, la blancheur de son teint et l’éclat de son
rire, ses cheveux noirs brillants, son esprit juste et fin, un bon sens qui
jamais ne fut mis en défaut la rendaient la plus rare et la plus admirée des
femmes d’une cour toute subjuguée et d’un seul coup conquise.
    Flattée de voir à ses pieds, prosterné, un si fougueux
admirateur, elle se montra sensible aux poèmes qu’elle en recevait, même si
« mon cousin » aurait souvent mieux fait de demander le secours de
M. Clément Marot, comme en témoignent ces mauvais vers issus de sa
profonde détresse :
     
    Ne sais-tu pas
qu’hier soir tu me promis
    Qu’en allant
voir en ville tes amis
    Je me rendrai,
pour plus souvent te voir
    Et le plaisir de
ta parole avoir ?
    Mais nonobstant
ta foi à moi promise
    Qui dans ma main
par la tienne fut mise,
    Rien ne
ouïs : ni parole, ni vent
    Venir vers moi
pour me mettre en avant.
    J’ai attendu et
encore j’attends
    Par affection
voulant forcer le temps.
     
    Elle succomba enfin et le roi, désireux de la voir
s’attacher et glisser davantage, moins de huit jours après qu’elle eut franchi
le pas, comme à son habitude se montra généreux envers elle mais aussi envers
ses proches. Toute la famille de Françoise bénéficia des largesses royales.
Seul, son mari n’accepta pas le statut de grand cocu officiel de la cour et
rumina une vengeance qui sera terrible. Louise de Savoie ne cacha pas non plus
son antipathie pour la comtesse et ne ménagea pas son fils, l’accablant d’incessants
reproches. Il n’en eut cure, trop aveuglé par la rayonnante beauté de la
nouvelle maîtresse de son cœur et préoccupé par l’annonce de la mort de
Ferdinand II d’Aragon qui signifiait la montée sur le trône de Charles de
Habsbourg devenu roi d’Espagne. Les deux souverains décidèrent de se rencontrer
pour signer la paix de Noyon.
    Charles renonçait au Milanais en échange du royaume de
Naples et rappelait mielleusement qu’il attendait avec impatience la nubilité
de Louise pour convoler en de justes noces. Décidément, je n’aimais pas cet
avorton, toujours habillé de velours noir, la lippe pendante, le teint jaune,
au sourire souffreteux qui me jetait des regards moitié effrayés, moitié
effrayants et qui m’aurait volontiers livré céans aux disciples de Torquemada.
    Dans la foulée, François I er signa le traité
de Fribourg qui nous assurait une paix perpétuelle avec la Suisse dont les
régiments serviraient la France, après avoir lutté contre nous durant des
décennies. Fallait-il toutes ces guerres et ces massacres pour en arriver
là ?
    Le 23 octobre, comme le roi chassait dans les forêts
qui entouraient le château d’Anet, on vint l’avertir que la reine était dans
les douleurs. Il planta là son loisir favori pour retourner à bride abattue au
château d’Amboise. Quand il arriva au chevet de la reine, elle était en
pleurs : le nouveau-né était une petite fille, Charlotte. Le roi la prit
dans ses bras et la consola en lui murmurant doucement : « Ne pleurez
point, ma mie, nous en ferons bien un. Foi de gentilhomme ! »
    Tout avait été préparé pour l’arrivée d’un dauphin.
Jusqu’aux courriers d’État qui attendaient, leurs chevaux tout sellés, prêts à
s’élancer pour porter la grande nouvelle aux quatre coins de l’Europe. La
déception fut grande à la cour et l’on chuchotait déjà :
    « La pauvre reine Claude est comme sa mère Anne, elle
ne fera que des

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