Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen
Le Brasier de Justice

Le Brasier de Justice

Titel: Le Brasier de Justice Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Andrea H. Japp
Vom Netzwerk:
l’autonomie du Temple, avec lui à sa tête, bien sûr, rétorqua le chevalier.
    — Assoyez-vous… Plisans, c’est bien cela ? Vous avez esquissé un assez juste portrait de Molay. Était-ce la raison pour laquelle vous avez sollicité une entrevue avec moi ? résuma le conseiller d’un petit ton d’impatience afin de pousser son vis-à-vis plus avant.
    — Non pas, messire, avec tout mon respect. Je connais un peu Molay. Valeureux mais buté et arrogant. Il ne cédera jamais, entraînant, le cas échéant, mes frères dans leur perte, et je ne puis le tolérer. J’ai longuement réfléchi, pesant le pour et le contre. Ainsi que je vous l’ai affirmé, j’espère sauver mon ordre du pire que je pressens.
    — Et comment cela ?
    — En vous aidant, si vous l’acceptez.
    — Qu’ouïs-je ? s’exclama Nogaret sidéré.
    Les templiers formaient un ordre presque secret et n’avaient guère pour habitude d’offrir ou d’accepter aide d’un étranger à leurs rangs.
    — Étonnant, j’en conviens, sourit Hugues de Plisans. Que mon inquiétude et ma dévotion envers mes frères soient mes explications. S’il faut circonvenir Molay pour nous sauver tous, ainsi soit-il.
    — Trahiriez-vous votre grand maître pour plaire au roi ? s’enquit Nogaret en s’efforçant de dissimuler sa surprise.
    — Le terme « trahir » parait abusif, non que je me cherche des atténuations. D’autant qu’en ce cas c’est Jacques de Molay qui s’apprête à trahir son ordre et la confiance que nous avions placée en lui.
    Nogaret détailla le bel homme installé en face de lui. Nulle veulerie, nulle bassesse dans les traits virils de son visage. S’y lisait en revanche une extrême détermination. Guillaume de Nogaret sut à cet instant qu’il avait affaire à un pur, prêt au sacrifice pour défendre sa cause. Car, si Molay venait à apprendre sa démarche, il ne donnait pas un fretin de la vie du chevalier.
    Un pur. La peste fût des purs ! Rien n’est plus difficile à contraindre ou à appâter qu’un pur.
    — Votre fougueuse sincérité vous honore mais me désarme, je vous l’avoue. C’est que j’en ai fort peu l’habitude, céans, admit Nogaret. Il me faut réfléchir avant de m’engager plus avant.
    — Oh, je le comprends, messire, déclara Hugues de Plisans en se levant et en s’inclinant. À vous revoir, à votre convenance, je l’espère. Vous êtes… mon ultime recours.
    1 - Personne habile et rusée, espion. Nous a laissé « mouchard » dans ce sens, et « fine mouche ».

    2 - Voir la série Les Mystères de Druon de Brévaux, Aesculapius, Lacrimae, Templa Mentis , Flammarion.

XXV
    Alentours de Nogent-le-Rotrou,
 octobre 1305, ce même jour
    A ntoine Méchaud démonta devant les marches menant à la porte principale du manoir. Un valet d’écurie déboula vers lui afin de s’occuper de son vieux roncin 1 . Il le remercia d’un vague signe de tête et prétendit épousseter sa housse et ses chausses afin de se donner quelques instants de répit.
    Une muette prière se forma dans son esprit : « De grâce, Divin Agneau, pas un deuxième enfant trépassé ce même jour ! » Il songea qu’il devenait trop âgé, d’une sensiblerie de vieille femme, et qu’il allait devoir abandonner l’art médical. Si peu de réussites, tant d’échecs, de défunts. Au fond, pouvait-il se prévaloir d’avoir sauvé un jour un véritable malade ? Dieu, la chance ou surtout une robuste constitution n’avaient-ils pas été les seuls traitements efficaces ? Des doutes l’assaillaient. De plus en plus souvent. Que tenter, hormis saigner 2 , alors même qu’il était presque certain que cette effusion de sang aggravait l’état de certains patients ? Que prescrire lorsqu’une femme relevant de couches commençait de décliner, pour s’éteindre, exténuée par des saignements, des infections, une alimentation insuffisante ? Aligner des coquelicots 3 sur sa poitrine afin de vivifier son sang ? Tant de maladies, tant de trépas, si peu de remèdes.
    Il finissait par envier les prêtres. Certes, l’attrait pour les plaisirs de ce monde, dont la douceur d’une peau de femme, avaient détourné Antoine Méchaud de la robe. Mais, au fond, eux seuls savaient consoler, redonner l’espoir. L’agonisant était pardonné, certain que Dieu l’attendait bras grands ouverts. Un sourire pénible mais heureux naissait à nouveau sur ses lèvres, après des jours et des nuits de

Weitere Kostenlose Bücher