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Le cadavre Anglais

Le cadavre Anglais

Titel: Le cadavre Anglais Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jean-François Parot
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pointes de corail. Nicolas toussa, un chat noir traversa la pièce comme une flèche en crachant, la belle se rajusta et ce faisant manqua choir. L'homme fixa l'arrivant, l'air irrité.
    — Monsieur, qui que vous soyez, apprenez que le dimanche les ateliers des maîtres sont fermés et qu'on achète des estampes dans les galeries du Louvre !
    — Je vous prie, monsieur, de pardonner cette intrusion si peu civile, mais ayant frappé et personne ne répondant, j'ai cru devoir passer outre, votre porte ouverte m'ayant incité…
    — Et quelle urgence vous pousse ?
    — Je m'en viens vous demander de l'aide. M. de Noblecourt, qui vous connaît, m'a conseillé de faire appel à vous et de compter sur votre loyauté de fidèle sujet du roi.
    — Noblecourt, l'ancien procureur ? Ah ! Mais voilà qui est tout différent. Servir le roi ? J'y suis tout disposé, quoique rien n'indique que mes faibles talents lui puissent être de quelque utilité ! On avait besoin d'un calculateur, ce fut un danseur qui l'obtint !
    — Détrompez-vous, monsieur, c'est précisément l'art que vous illustrez, dont j'ai pu admirer un exemple remarquable…
    — Le portrait de Mme de Noblecourt, je suppose ? C'est curieusement la rapidité de son exécution qui en fit, j'ose l'affirmer, un chef-d'œuvre. Nous étions en été, nous ne pouvions attendre…
    — C'est justement en raison de cette maîtrise que je souhaite faire appel à votre génie propre…
    Nicolas savait qu'avec les artistes le compliment se servait à la truelle.
    Le vieux visage se plissa de contentement, tandis que la belle faisait la moue.
    — Sachez, monsieur, que je suis un élève de La Tour et de Perronneau. L'un m'apprit à peindre la nature, l'état, le caractère de mes sujets et à insuffler à cette poudre colorée le souffle du vivant. Quant à l'autre, je lui dois la spontanéité, le jeu des couleurs et la lumière, oui, la lumière.
    L'homme s'exaltait en parlant et, sous le coup de la passion, son visage, marqué par l'épicurisme le plus grossier, s'irradiait, comme ennobli.
    Nicolas profita de ce répit pour jeter un coup d'œil dans l'atelier. Il admira des esquisses et des tableaux achevés. La clientèle de Lavalée appartenait d'évidence à la bourgeoisie parisienne. Les types observés lui parurent criants de vérité, avec un naturel des regards qui donnait tout son prix à cette technique si singulière où l'inanimé ressuscitait le vif.
    — Cependant, dit Nicolas, le cas que j'ai à vous soumettre pourrait, je le comprendrais, rebuter votre délicatesse.
    L'autre se redressa, se drapant dans sa robe.
    — Croyez, monsieur, qu'aucune tâche n'est au-dessus de ce que je puis faire, et plus encore !
    — Vous vous méprenez. Loin de moi l'idée que vous n'y soyez pas égal. Il se trouve pourtant que la proposition pourrait heurter votre sensibilité.
    — Évoquez-vous certaines représentations licencieuses ou infâmes que certains amateurs payent à prix d'or ? Ce n'est pas, si vous souhaitez me l'entendre dire, mon affaire et, dans ce cas, nous n'avons plus rien à traiter ensemble. Je ne suis pas un scélérat, tout libertin que je sois !
    — Monsieur, ce n'est pas le cas, répondit Nicolas en souriant. Je suis commissaire au Châtelet et me nomme Nicolas Le Floch. En un mot, un homme est mort hier soir. Accident ou meurtre, nous l'ignorons encore. De même, il nous a été impossible de déterminer son identité. Son corps est à la basse-geôle. Accepteriez-vous d'apporter votre concours, car il n'est pas dans mes intentions de vous contraindre, pour portraiturer le cadavre ? Cela nous permettrait de retrouver ceux qui l'auraient connu.
    — Je suis votre serviteur.
    — Votre prix…
    — Point de prix, monsieur. Cela m'offrira l'occasion de rendre à la justice du petit-fils ce que le feu roi me donna. La pension qu'il voulut bien m'octroyer pour un portrait de… mais je m'entends… me mit le pied à l'étrier. Je vais de ce pas m'habiller car je comprends qu'il y a urgence. Freluche 22 , ma fille, verse un peu de vin de Champagne à notre hôte. Par ce temps, il abreuve tout en réchauffant !
    Il disparut dans les arrières du logis, laissant Nicolas en tête-à-tête avec la belle.
    — Allons, approchez, dit-elle, vous goûterez bien une de ces huîtres tout droit venues de la rue Montorgueil. Bientôt le Carême, on va pouvoir s'en gloutir des bourriches !
    — Vous les semblez apprécier.
    Elle

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