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Le cadavre Anglais

Le cadavre Anglais

Titel: Le cadavre Anglais Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jean-François Parot
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l'allusion mécanique, mais désirait confier son nom. Oh ! L'habile homme.
    — Alors le pourquoi des deux dans les trois ?
    — Pas si étroit que ça ! C'est l'affaire du commissaire aux enquêtes extraordinaires. Pourquoi riez-vous ?
    — C'est l'étroit, dit Nicolas en s'étranglant de rire.
    — Hum ! Qu'est-ce à dire ? Posons-nous aussi la question de savoir s'il savait qu'il allait périr quand il a dissimulé le papier dans la fissure du mur. Était-ce du domaine du testamentaire ? Ou bien…
    — Mettons-nous à sa place. Je pense qu'il laissait un indice pour le cas où un malheur surviendrait.
    — Trois ! Son nom, son pays, sa profession.
    — Quatre. Car, ce faisant, il indiquait qu'il redoutait quelque chose et espérait le faire savoir à qui trouverait son message.
    — La tête nous chauffe, le souper doit s'apprêter. Nous n'irons pas plus loin ce soir, la nuit porte conseil. Mais une visite s'impose chez Le Roy et chez Berthoud. Vous avez de la chance, leurs officines voisinent rue du Harlay, derrière le Palais.
    Tournant le dos à la porte, Nicolas ne pouvait voir la gracieuse apparition d'Awa et de Freluche. Il n'en crut pas ses yeux en les découvrant. La première tirait la seconde par la main comme dans une figure de danse imposée. Le modèle était revêtu d'une longue lévite d'un vert profond, le chef surmonté d'un foulard noué à la créole. Cette robe exotique la drapait de ses plis harmonieux, laissant sur un côté largement découvertes l'épaule et la naissance d'un sein. Awa portait une tenue identique d'une teinte violette aux reflets d'un bleu sombre. Il constata que Semacgus partageait son admiration.
    — Les Grâces sont descendues de l'Olympe !
    — Non ! dit Awa, de l'office. Messieurs les pétrifiés, le souper vous attend.
    Le chirurgien de marine présenta son bras à Freluche. Nicolas fit de même pour Awa et le cortège gagna en plaisantant l'office où la table avait été dressée, toute couverte d'une argenterie disparate, témoignages de combats passés et de prises de mer fructueuses. Semacgus expliqua qu'il aimait se tenir au plus près de ses invités, mais également des préparatifs du repas. Nicolas éprouva avec plaisir la douce chaleur émanant de la cheminée et du potager. Des bouteilles de vin de Champagne attendaient dans un rafraîchissoir. Bientôt les bouchons sautèrent et Semacgus emplit les coupes. Le commissaire, le nez levé, respirait en amateur les effluves qui flottaient dans l'air. Freluche, intimidée, baissait les yeux.
    — Dites-nous, belle Awa, dit Nicolas, ce que la cambuse du marin nous réserve ce soir ?
    — Chez Semacgus, dit le chirurgien, c'est tous les jours fête, surtout en carême !
    — Fête ? Voire, dit Awa en faisant la moue, un jour sur trois. Un vieil homme comme lui, si on le veut debout , doit être tempéré à sa table.
    À la surprise de Freluche, les deux hommes éclatèrent de rire au mot à double sens d'Awa qui les reportait à un autre souper quelques années en arrière.
    — … Mais, ajouta-t-elle la mine réjouie, vous êtes arrivés le bon jour, le troisième, celui où l'on fait bombance !
    — Et quel est le maître plat du moment ? demanda Nicolas qui s'aperçut soudain de sa faim dévorante.
    — Crépinettes de cuisses de canard, pâté de macaronis à l'italienne et crème à l'anglaise frite.
    — Hélas, cela me conduira à confesser dimanche ma voracité, dit Nicolas à moitié sérieux.
    — Vos yeux et une certaine humectation de vos lèvres démentent cette volonté de résipiscence. Elle cède à votre concupiscence gourmande. Croyez-en l'homme de l'art.
    Ce fut une partie charmante qu'Awa anima de sa gaieté : Freluche, plus réservée, stupéfaite de ce qui lui arrivait, tenait sa partie sur un mode mineur. Dépouillée de sa gouaille habituelle, elle redoublait sa séduction. Les cuisses de canard firent événement et Nicolas réclama la recette qu'il souhaitait rapporter à Joséphine.
    — C'est tout de simplicité, dit Awa dont l'accent n'était plus, après tant d'années dans le royaume, qu'une charmante musique. Faire suer et attendrir les cuisses à l'étouffée, puis les envelopper dans un hachis de chair de perdrix, lard et épices. Enfin, disposer sur chacune d'elles de larges tranches de truffes et enfermer le tout, bien serré, dans une crépinette, laquelle vous aurez pris soin de rincer qu'elle ne fleure point le rance. Et vous passez au

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