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Le calice des esprits

Le calice des esprits

Titel: Le calice des esprits Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Paul C. Doherty
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muette,
rétorquai-je avec vivacité, désespérée par son départ.
    — Partez maintenant,
Mathilde, murmura-t-il. La voie est libre. La Tour est tout près et personne ne
vous fera de mal. Gardez votre capuchon sur la tête, insista-t-il. Je vous
suivrai.
    Ravalant ma riposte, je sortis
dans la rue, selon ses instructions. J'emboîtai le pas à un groupe de
magistrats portant calotte blanche qui revenaient de la cour des plaids communs
à Westminster jusqu'à ce que je parvienne à des ruelles menant au fleuve.
J'étais, en fait, une bachelette envoyée faire quelques courses. Je me trouvais
aux abords de la Tour quand j'ouïs, juste dans mon dos, des clameurs montant de
la foule. Je regardai derrière moi : des cavaliers s'avançaient dans les
rues. Marigny ! Les bannières de France bleu et or claquaient au vent. Le
cortège se dirigeait vers la Tour en grand apparat. Je me hâtai de rejoindre
les spectateurs regroupés aux environs de la Porte du Lion. J'embrassai la
scène du regard pour apercevoir Demontaigu : il avait disparu. Je cherchai
alors des yeux la chevelure ardente de Gaston, mais, là encore, je ne
distinguai rien d'inhabituel. J'aurais pu continuer ma route et me signaler à
Sandewic et Casales qui attendaient devant le grand portail, mais je voulais
rester là. Je tremblais pour Demontaigu et même un peu pour Gaston de Preux que
je n'avais jamais rencontré. Je voulais aussi être témoin de ce qui arriverait,
désireuse de voir périr Marigny et les autres. La vengeance, la revanche
sanglante ne sont pas feux à s'enflammer sur-le-champ ; on les allume, ils
prennent et faiblissent, ils couvent, mais ils brûlent toujours. Je pouvais
voir périr Marigny. Je priais pour que lui, l'impudent chasseur, devienne la
proie. Ils arrivèrent enfin, étendards fleurdelisés battant au vent, armures et
pierres précieuses scintillant au soleil. Ils étaient entourés de notables et
de soldats dans leurs plus beaux atours. La foule se rua en avant. Je jetai un
bref regard sur les visages gercés, les yeux larmoyants, les ribaudes
échevelées, les charpentiers couverts de poussière, les enfants en haillons qui
dansaient d'un pied sur l'autre. Je cherchais quelqu'un d'extraordinaire :
un vendeur de reliques portant au cou une corde d'où pendaient des os, son nez
charnu fendant l'air comme celui d'un chien de chasse ; un béjaune roux,
l'air stupide et le regard vide, évadé d'une maison de fous dans ses oripeaux.
J'aperçus bien un jouvenceau roux qui se frayait un chemin dans la cohue, mais
il s'arrêta pour chuchoter à l'oreille d'une bachelette.
    Le cortège des Français, chevaux
au pas, approcha de la Porte du Lion. Casales et Sandewic, en tabars écarlate
et or frappés des léopards grondant d'Angleterre, allèrent à sa rencontre. Un
frère de l'ordre des Pénitents de Jésus, dont le crâne rasé luisait au soleil,
se détacha de la foule.
    —  Mon seigneur de Marigny,
je vous apporte une lettre du roi *.
    Marigny serra la bride de sa
monture dans un claquement de sabots et un nuage de poussière. Le frère fit
quelques pas en avant en levant le morceau de parchemin, puis se fendit en
brandissant un poignard de la main droite vers le ventre de Marigny. Sandewic,
qui s'apprêtait à saisir les rênes, fut plus rapide encore et poussa le cheval
du Français vers l'assassin. L'animal, déjà effarouché, se déporta de côté en
faisant rouler l'agresseur au sol. Les soldats anglais se précipitèrent pour
encadrer Marigny et son escorte. Casales ordonna aux autres d'une voix de
stentor de se déployer en cercle. Une corne sonna. Un flot d'archers gallois,
arcs bandés, sortit par la Porte du Lion. Les spectateurs, éberlués par ce
soudain assaut, se dispersèrent sans demander leur reste. Je m'avançai. Un
sergent me prit sans ménagement par l'épaule. Je me libérai d'un geste et lui
montrai le sceau personnel d'Isabelle, puis me hâtai vers le portail. Le groupe
de Marigny était déjà entré au galop dans la cour intérieure, où, à présent,
régnait le chaos. Des chevaux se cabraient, des hommes criaient, on
s'empressait de fermer les grilles, on abaissait les herses dans des
grincements. Je restai à l'écart. Marigny n'était pas blessé, mais fou de rage.
Toujours à cheval, il invectivait Casales en français. Sandewic envoyait des
renforts sur les remparts. Je vis emmener l'assassin dans un cachot sous l'une
des tours. Je me glissai à travers la confusion et passai devant

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