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Le Chant de l'épée

Le Chant de l'épée

Titel: Le Chant de l'épée Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Bernard Cornwell
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Steapa.
    — Parce que, d’une certaine manière, je
suis un très bon chrétien.
    — Toi ?
    — Oui, j’aime mes ennemis.
    — Les Danes ? Moi pas, dit-il d’un
ton morne.
    Ses parents avaient été massacrés par les
Danes. Je ne répondis pas. Je pensais à la destinée. Si les trois fileuses la
connaissent, pourquoi prêter serment ? Car lorsque nous le brisons, est-ce
traîtrise ou est-ce le destin ?
    — Alors tu combattras demain ? continua-t-il.
    — Bien sûr. Mais pas comme le croit Æthelred.
Aussi, je désobéirai aux ordres et tu dois me tuer pour cela.
    — Je te tuerai plus tard.
    Æthelred avait changé le plan dont nous étions
convenus sans se douter que je n’avais jamais eu l’intention de le suivre. Il
était trop évident. Comment peut-on attaquer une ville autrement qu’en tentant
de dégarnir les remparts que l’on vise ? Sigefrid devinerait que notre
premier assaut était une feinte et laisserait sa garnison en place tant qu’il
ne saurait pas avec certitude d’où venait la vraie menace. Dès lors, nous
mourrions sous ses murs et Lundene resterait une place forte des Norses.
    La seule manière de s’en emparer était donc d’user
de ruse furtive et de prendre un immense risque.
    — Ce que je compte faire, expliquai-je à
Steapa, c’est attendre qu’Æthelred quitte l’île. Ensuite, nous y retournerons
et prendrons deux navires. Ce sera très dangereux, car nous devrons passer par
la brèche du pont en pleine nuit et les navires y périssent même en plein jour.
Mais si nous pouvons passer, nous pourrons pénétrer facilement dans la vieille
ville.
    — Je croyais qu’il y avait un rempart le
long du fleuve ?
    — Oui, mais il est brisé en un endroit.
    Un Romain avait construit une grande demeure
au bord de la rivière et avait creusé auprès de sa maison un petit canal qui
trouait la muraille. Le Romain devait être riche et vouloir ancrer son navire, car
il avait abattu une partie du rempart pour ménager ce canal, et c’est par là
que je comptais pénétrer dans Lundene.
    — Pourquoi ne l’as-tu pas dit à Alfred ?
    — Alfred sait garder un secret, expliquai-je,
mais Æthelred ne le peut. Il en aurait parlé à quelqu’un, et en deux jours les
Danes auraient connu nos intentions.
    C’était vrai. Nous avions des espions tout
comme eux, et si j’avais révélé mes véritables plans, Sigefrid et Erik auraient
barré le canal avec des navires et garni la grande demeure. Nous aurions péri
sur les quais. Nous pouvions encore y laisser la vie, car je n’étais pas sûr de
trouver la brèche du pont et, si c’était faisable, de pouvoir la franchir, car
à cet endroit la rivière sautait brusquement et il y avait des tourbillons. Si
nous manquions notre coup, si l’un des navires dépassait d’un côté ou de l’autre,
nous serions entraînés sur les piles déchiquetées et nous chavirerions. Et nous
nous noierions tous, entraînés par le poids de nos cottes et de nos armes.
    Steapa avait réfléchi, ce qui lui prenait
toujours du temps, mais il posa une fine question :
    — Pourquoi ne pas débarquer en amont du
pont ? Il doit bien y avoir des portes dans le rempart ?
    — Il y en a une dizaine, peut-être même
vingt, et Sigefrid les aura toutes bloquées, mais il ne s’attend sûrement pas à
ce que nous essayions de franchir la brèche.
    — Parce que les navires y périssent ?
    — Pour cela, oui, acquiesçai-je.
    J’avais vu une fois un navire marchand dont le
timonier avait trop incliné la barre et les piles brisées avaient éventré la
coque. La brèche faisait une quarantaine de coudées de largeur et, quand la
rivière était calme, sans vent ni courant, elle paraissait sans danger, mais c’était
trompeur. Le pont de Lundene était meurtrier, et pour prendre Lundene je devais
le franchir.
    Et si nous y parvenions ? Si nous
trouvions le quai romain et que nous débarquions ? Alors nous serions peu
face à un ennemi nombreux, et certains d’entre nous mourraient dans les rues
avant que les hommes d’Æthelred franchissent la muraille. J’effleurai le
pommeau de Souffle-de-Serpent et sentis la petite croix d’argent qui y était
enchâssée. Le présent de Hild. D’une maîtresse.
    — As-tu entendu chanter le coucou ? demandai-je
à Steapa.
    — Point encore.
    — Il est temps de partir. Sauf si tu veux
me tuer !
    — Peut-être plus tard, mais pour l’instant
je veux combattre auprès de toi.
    Et nous

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