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Le Chant de l'épée

Le Chant de l'épée

Titel: Le Chant de l'épée Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Bernard Cornwell
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si une jolie pucelle y demeurait. Un prêtre qui protégeait des femmes
dans son église tenta d’arrêter la cohue en brandissant un crucifix, mais il
fut abattu d’un coup de hache. Une vingtaine de Norses trouvèrent la mort dans
le palais où ils gardaient le trésor amassé par Erik et Sigefrid, et leur sang
ruissela sur les mosaïques romaines.
    C’est la fyrd qui fut la plus destructrice. Les
soldats étaient disciplinés et restaient en rangs, et ce furent eux qui
chassèrent les Norses de Lundene. Je restai dans la rue proche du rempart du
fleuve et nous poussâmes les fugitifs comme des moutons qui fuient les loups. Le
père Pyrlig agitait au-dessus de nous sa bannière à la croix accrochée à une
lance pour que les soldats d’Æthelred sachent que nous étions alliés. Des cris
et des hurlements s’élevaient de toute part.
    — Seigneur ! s’exclama Sihtric.
    Il avait remarqué qu’une troupe de Norses
avait trouvé refuge sur le pont brisé. L’extrémité nord était gardée par un
bastion romain auquel menait une arche. Le passage était barré par un mur de boucliers
sur six rangs, disposé comme le nôtre à la porte de Ludd.
    — Non, dis-je alors que Steapa levait sa
hache en grondant.
    — Faisons une défense de sanglier, grogna-t-il,
et tuons ces gueux.
    Une défense de sanglier, c’était une formation
d’hommes qui s’enfonçait comme un coin dans du bois. Mais ce mur-là était trop
serré, et ses hommes trop désespérés.
    Ils combattraient jusqu’à la mort et nous
perdrions des nôtres.
    — Restez là, ordonnai-je à mes hommes.
    Je confiai mon bouclier et mon casque à
Sihtric et rengainai Souffle-de-Serpent. Pyrlig m’imita.
    — Tu n’es pas obligé de venir, lui dis-je.
    — Et pourquoi ne le ferais-je pas ?
    Il tendit sa bannière improvisée à Rypere et
posa son bouclier ; comme j’étais heureux de sa compagnie, nous avançâmes
tous les deux vers le pont.
    — Je suis Uhtred de Bebbanburg, annonçai-je.
Et si vous souhaitez festoyer au banquet d’Odin ce soir, je suis disposé à vous
y expédier.
    Derrière moi, la fumée et les cris
continuaient de s’élever de la ville. Les neuf hommes du premier rang me
fixèrent sans répondre.
    — Mais si vous voulez goûter plus
longtemps aux joies de ce monde, continuai-je, répondez.
    — Nous servons notre jarl, dit finalement
l’un d’eux.
    — Et c’est… ?
    — Sigefrid Thurgilson.
    — Qui s’est bien battu.
    Je l’avais couvert d’insultes peu auparavant, mais
il était temps de se radoucir. De permettre à l’ennemi de se rendre et de
sauver la vie de mes hommes.
    — Le jarl Sigefrid est-il encore en vie ?
m’enquis-je.
    — Oui, répondit sèchement l’homme en
désignant l’arrière du pont.
    — Alors dis-lui qu’Uhtred de Bebbanburg
souhaite lui parler, pour décider s’il vivra encore ou non.
    Ce n’était pas à moi d’en décider. Les Nornes
avaient déjà fait leur choix, et je n’étais que leur instrument. L’homme qui m’avait
parlé transmit le message et j’attendis. Pyrlig priait, mais j’ignore s’il
demandait merci pour ceux qui hurlaient derrière nous ou la mort pour ceux qui
nous faisaient face.
    Puis le mur de boucliers s’écarta pour nous
laisser passer.
    — Le jarl Erik accepte de te parler, m’annonça
l’homme.
    Pyrlig et moi allâmes à la rencontre de l’ennemi.

6
    —  Mon frère dit que
je devrais te tuer, me déclara Erik en guise de salut.
    Le cadet des frères Thurgilson m’attendait sur
le pont et il n’y avait sur son visage rien de la menace de ses paroles. Il
était calme et semblait ne pas s’inquiéter de sa périlleuse situation. Hormis
une entaille au bas de sa cotte, il était indemne. Sigefrid, en revanche, était
affreusement blessé. Je l’aperçus plus loin sur la route, gisant sur sa cape en
peau d’ours, convulsé de douleur pendant que deux hommes le soignaient.
    — Ton frère, dis-je sans quitter Sigefrid
du regard, pense que la mort est la réponse à tout.
    — Alors il est comme toi à cet égard, répondit
Erik avec un faible sourire, si tu es ce que l’on dit de toi.
    — Et que dit-on ? m’enquis-je, curieux.
    — Que tu occis comme un Norse, répondit-il
en contemplant les navires danes et norses qui avaient réussi à fuir les quais
où le combat faisait encore rage. Parfois, je songe, continua-t-il tristement, que
la mort est le véritable sens de la vie. Nous l’adorons, nous la donnons

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