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Le Chant des sorcières tome 1

Le Chant des sorcières tome 1

Titel: Le Chant des sorcières tome 1 Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Mireille Calmel
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tâche.
    — Y consent-elle ?
    — Depuis toujours.
    — Et sa mère ?
    — Tout autant.
    — Alors l'affaire est faite.
    — Avec votre permission…
    — Ne viens-je pas de te la donner à l'instant ? se mit à rire le baron.
    Mathieu se fendit d'un sourire qui lui étira la bouche jusqu'aux oreilles. Pour un peu, il en aurait dansé.
    — J'ai une objection à formuler, père.
    Le bonheur de Mathieu se figea sur ses traits. Il tourna la tête vers Philippine qui, interrompant soudain sa conversation avec Enguerrand, s'était dressée.
    — Je t'écoute, ma fille. Algonde est ta chambrière. Tu es donc libre d'en disposer.
    — Justement. Et à ce titre, mon bon Mathieu, il te faut savoir que je n'ai pas l'intention de m'en séparer, même si tu l'épouses.
    — Vous voulez dire que…
    Il déglutit.
    — Qu'elle me suivra à la Bâtie lorsque nous y repartirons.
    Mathieu n'avait pas un seul instant envisagé cette éventualité. Comme lui, Algonde appartenait à Sassenage. Il s'y voyait depuis toujours vivre et prospérer avec elle.
    — Je ne veux pas la quitter, osa-t-il, hardiment.
    — Il le faudra pourtant si tu restes panetier.
    — Bien sûr qu'il va le rester, répliqua le père, comme une évidence.
    Mathieu était son fils aîné.
    Le baron se frotta la barbe. Il ne s'était pas préparé à cette étonnante rivalité. Sidonie se pencha à son oreille et lui glissa quelques mots. Il hocha la tête. Mathieu, les poings serrés sur sa détermination, restait planté devant leur table en se rongeant la joue. Philippine, quant à elle, s'était rassise, ennuyée de le peiner, mais refusant d'en démordre. Elle s'était trop attachée à Algonde pour s'en passer. Et ce n'étaient pas les arguments que s'empressait de lui servir Enguerrand en faveur des promis qui y pourraient rien changer.
    — Approche, Mathieu, et toi aussi, Jean, décida le baron.
    Père et fils avancèrent d'un même pas.
    — Songes-tu à prendre ta retraite, maître panetier ?
    — Je ne suis point encore trop vieux.
    — Un apprenti te ferait donc aussi bien l'affaire que ton fils.
    — Aussi bien, aussi bien, comme vous y allez, tempéra l'homme qui sentait venir le piège.
    — Vois sa mine désespérée et prétends le contraire, insista Jacques.
    Le panetier jeta un œil vers son fils et haussa les épaules. Jacques de Sassenage avait raison. C'était un crève-cœur.
    — Peut-être bien que je pourrais m'en accommoder quelque temps.
    — Toi, Mathieu, suivrais-tu ta belle si l'occasion t'en était donnée ?
    — Pour ne pas la perdre, je suis prêt à tout.
    — Même au métier des armes ?
    Mathieu sursauta. Jean étrangla un cri d'angoisse dans sa gorge. D'un battement de cils, Sidonie les rassura tous deux.
    Mathieu reprit confiance.
    — S'il le faut, affirma-t-il.
    — En ce cas, je maintiens ma bénédiction. Tu épouseras Algonde et intégreras l'escouade du sire Dumas. A compter de ce jour, panetier, ton fils délaissera ton fournil pour apprendre auprès des soldats son nouveau métier.
    — Et ma retraite ?
    — Ton cadet y pourvoira. Hélène ?
    — Cela me va, assura cette dernière, détendue.
    — Alors voilà qui est réglé. Vous pouvez disposer.
    Algonde survint à cet instant, tenant au pli du coude un bouquet somptueux de roses et de lys qu'elle avait confectionné avec sa mère. Les tiges en avaient été délicatement tressées avec des rubans semblables à ceux de la couronne de pain.
    Mathieu intercepta la jouvencelle.
    — C'est fait. Le baron vient de nous fiancer !
    Les inquiétudes d'Algonde s'évanouirent aussitôt. Puisque le sort en était jeté, la décision ne lui appartenait plus. Elle serait l'épouse de Mathieu et demeurerait à Sassenage. Arriverait ce qui devait arriver !
    — Va, je te raconterai tout plus tard, promit Mathieu.
    Elle hocha la tête, le laissa détaler en bondissant comme un cabri, et, retrouvant d'un coup sa naturelle légèreté, s'esclaffa de voir le bouffon sautiller à outrance tout autour d'elle pour le contrefaire. Accompagnée du tintement des clochettes de son bonnet aux trois pointes, et de sa mère qui l'avait rejointe, Algonde s'en fut offrir son présent aux mariés.
    Après l'apéritif composé d'hypocras, de vin aux herbes, de bâtons au fromage, de saucissons de sanglier et de boudins aux prunes, intermèdes et plats s'enchaînèrent une bonne partie de la journée, salués chaque fois par une volée de trompettes et

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