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Le Chant des sorcières tome 1

Le Chant des sorcières tome 1

Titel: Le Chant des sorcières tome 1 Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Mireille Calmel
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ceinture de toile.
    — Pas encore, décida Djem en portant la main à ses lèvres.
    Un hululement s'éleva à son tour, long comme celui d'une chouette. Un hurlement y répondit à quelques secondes d'intervalle.
    — Maintenant ! lança Djem.
    D'un même élan, ils se mirent à courir vers la liberté.
     
    — Ventrebleu ! gueula Philibert de Montoison de rage en les voyant détaler.
    Avec Guy de Blanchefort, Jean Iseron, Imbert de Beauvoir et Jean Boniface, il s'élança à la course pour les rattraper.
     
    Derrière eux, déjà, les lames s'entrechoquaient sur le parvis. Cimeterres contre épées. Janissaires contre chevaliers. Quatre-vingts aux fronts enrubannés contre les huit cents hommes que Guy de Blanchefort avait ralliés et qui jaillissaient de partout. On eût pu croire le combat perdu d'avance, mais les Turcs, par leur dextérité, le ramenaient presque à égalité. Pour un d'entre eux qui tombait, c'était dix des Francs qui s'agenouillaient, tête ou membre tranché.
     
    Djem les voyait, ces maudits Hospitaliers, qui surgissaient de part et d'autre, accourant comme des chiens sur un gibier.
    — Va ! hurla Houchang en faisant soudain volte-face pour couvrir ses arrières.
    Anwar et Nassouh firent de même. Djem parcourut quelques toises encore. Le choc du métal accompagné du cri de guerre des siens derrière. Le hennissement apeuré des montures devant. Près de cette porte que barraient déjà huit soldats armés jusqu'aux dents. Djem savait qu'il lui serait facile de les massacrer. Fuir. C'était à sa portée. Il s'immobilisa pourtant. Que serait-il sans ses amis ? Un loup, blessé, harcelé, errant dans une montagne inconnue, une terre hostile. Se méprisant un peu plus chaque jour de les avoir abandonnés à une mort certaine et inutile. Il pivota. D'un regard bleu d'azur à la vision de rapace, l'oreille habituée à sonder la nuit pour en recomposer les mouvements, il engloba la scène. Sur les terrasses, ses janissaires faiblissaient. Combien en restait-il ? Une trentaine tout au plus à en juger par le bruit caractéristique de leur lame contre celle des Francs. Sueur et sang lui accrochaient le nez. Philibert de Montoison et Guy de Blanchefort n'étaient plus qu'à quelques foulées de ses compagnons qui contenaient un nombre grandissant de soldats en cotte de mailles. Avant longtemps, et malgré leur carnage, ils seraient terrassés. Une fraction de seconde. L'honneur ou la liberté. Djem n'hésita pas davantage et se jeta dans la mêlée au moment où Guy de Blanchefort dégainait son épée.
     
    Chaque coup que portait Djem trouvait une résonance en sa chair, en ses muscles, en son âme. Entre lui et le grand prieur d'Auvergne, des cuirassiers se dressaient. On voulait l'encercler. Pauvres fols ! Il se mit à rire, comme lorsqu'il était enfant et que son père lui apprenait à sabrer cette corde qui virevoltait autour de lui. À la manière d'un derviche, il tournoya sur lui-même, le tranchant du cimeterre à l'horizontale, de telle façon et à telle vitesse malgré l'herbe qui collait à ses pieds qu'il décapita quatre de ses agresseurs dans la foulée. Les autres reculèrent, impressionnés. Il ne leur laissa pas le temps de se reprendre. Ils étaient quinze contre lui. Bondissant comme un diable, il les défit l'un après l'autre avec tant de facilité qu'on eût pu le croire détenteur de pouvoirs démoniaques. Mais peut-être était-ce simplement leur réserve qui les perdait. Guy de Blanchefort ne criait-il pas de le prendre vivant ? Plutôt que de l'affronter à présent, les Francs reculaient, l'entraînaient à leur poursuite. Il avait soif de leur sang. Soif de victoire. Soif de cette vérité que seul le visage de la mort lui avait toujours apportée. Il s'en régénérait. Se guérissait de son humiliation. Forçait l'admiration. Il était Djem le sultan, l'enfant chéri de sa mère, le successeur légitime de son père et la terreur de ses aînés. Il était Djemchid, le héros mythique de la Perse, dont il avait hérité le courage et la témérité. Il était invincible parce que trop convoité.
     
    Lorsqu'il se rendit compte qu'on avait ainsi manœuvré pour l'isoler, il était trop en retrait des siens pour les rejoindre et Guy de Blanchefort se tenait en travers de son chemin. Seul. Les deux hommes se firent face.
    — C'est fini, Djem, lui annonça le chevalier.
    Je mourrai donc, décida le jeune homme en relevant la tête et le

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