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Le Chant des sorcières tome 1

Le Chant des sorcières tome 1

Titel: Le Chant des sorcières tome 1 Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Mireille Calmel
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jeta pas un regard et referma la porte derrière lui, déterminé à sa solitude. Algonde s'arracha à la muraille et s'en alla se jeter sur son oreiller.
     
    Il tardait à Djem de parvenir à destination. Le pas monotone des chevaux calé sur celui des mules finissait par l'exaspérer. Son seul plaisir, il le prenait au moment des haltes. Non dans quelque auberge ou monastère, mais à la belle étoile, comme il aimait à le faire autrefois, dans son pays.
    — La décision de gagner ce château nous a été dictée par la prudence, Djem. Vos ennemis vous cherchent dans nos commanderies, il faut les tromper. Nous quitterons Poët-Laval de nuit pour ne pas éveiller les soupçons et cheminerons jusqu'à la prochaine, hors des grands axes. Nous sommes nombreux et armés. Les brigands nous éviteront, avait expliqué Guy de Blanchefort.
    Djem avait approuvé avant de souligner d'un sourire :
    — Avouez, grand prieur, que vous craignez davantage de rencontrer le duc de Savoie qu'un quelconque envoyé de Bayezid.
    Leur amitié allait grandissant et Guy de Blanchefort en était convenu avant d'ajouter :
    — Quoi que vous en pensiez, je demeure celui qui vous veut le plus de bien en ce bas monde. Quelles que soient les mains entre lesquelles vous tomberiez, elles ne seraient qu'intérêt personnel, fourberie, mensonge. Personne ne veut vous voir remplacer Bayezid, en vérité. Ce qu'ils souhaitent, c'est le contraindre à ses accords, c'est maintenir la paix que votre captivité offre à la chrétienté.
    Djem savait qu'il avait raison. Plus il examinait la situation, plus elle lui apparaissait sous cet angle. Seuls ses amis refusaient d'entendre et se tenaient en alerte, parés à l'éventualité d'une embuscade. Jusque-là, elle n'avait pas eu lieu.
    Au-dessus de leur campement en arc de cercle, une myriade d'étoiles promettait encore une belle journée. La dernière avant d'apercevoir Rochechinard.
    — Ne vous formalisez pas de son allure, prince. C'est un nid d'aigle sur un promontoire. Imprenable. Austère. Il vous pincera le cœur, vous qui êtes coutumier de ces palais chatoyants.
    Djem s'était rembruni.
    — Pourquoi me désespérer déjà ?
    — Pour que vous ne m'accusiez pas de trahison. Il y a quelques jours encore, vos sentiments à mon égard m'indifféraient. Ce jourd'hui, par la faveur de l'amitié que je vous porte, ils me chagrineraient.
    — Il ne me restera donc que de la colère à défaut de ressentiment.
    — Sans doute, mais elle passera dès que vous vous pencherez à la fenêtre de la tour. Le château surplombe la vallée de l'Isère et les terres du baron Jacques de Sassenage. Ce sont les plus belles du Dauphiné. Je me fais fort d'obtenir que vous puissiez y galoper et chasser. Son château de la Bâtie n'est qu'à quelques lieues. Les fêtes qu'il organise aux beaux jours sont réputées. Je tiendrai ma promesse. Malgré la désagréable impression que vous en aurez, vous et vos compagnons, en parvenant à son pied, Rochechinard vous rendra heureux, autant en tout cas que vous puissiez l'être dans votre exil.
    Guy de Blanchefort l'avait convaincu. Qu'importait la forteresse s'il pouvait à loisir s'en évader ?
    Djem croisa les bras sur sa nuque, les yeux grands ouverts vers les nuées. À ses côtés, Anwar, Houchang et Nassouh ronflaient, se répondant l'un dans les aigus, les deux autres dans les graves. Ses femmes dormaient sous une tente pour protéger leur peau fragile des moustiques. Elles étaient les seules. Comme les Turcs, les Hospitaliers couchaient à même le sol sur une couverture, sécurisés par les guetteurs qui encerclaient le campement. Il suivit le tracé fugitif d'une étoile filante. Pour un peu, il se serait cru dans les montagnes d'Anatolie. Djem enferma l'image et se laissa aller en songeant que Guy de Blanchefort avait eu raison la veille de le lui faire remarquer : malgré ses dispositions exceptionnelles au combat, il avait davantage l'âme poète que guerrière.
     
    Le navire avait quitté Aigues-Mortes en plein cœur de la journée et, malgré sa détermination, Enguerrand avait ressenti un pincement au cœur en regardant le littoral battu par les eaux calmes de la Méditerranée s'éloigner. Il n'avait pas vu les Turcs au moment de son embarquement. Luirieux l'avait salué d'un signe de tête et le capitaine lui avait désigné une paillasse au pont inférieur de la caravelle, au milieu de celles des matelots. Loin des autres passagers. Au

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