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Le Chant des sorcières tome 1

Le Chant des sorcières tome 1

Titel: Le Chant des sorcières tome 1 Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Mireille Calmel
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main davantage. À moins qu'il ne soit ambidextre.
    — Nous savons toi et moi que ce n'est pas le cas.
    — Tu pourrais essayer de convaincre Philippine de se passer de toi.
    Algonde haussa les épaules.
    — Les choses seront ce qu'elles doivent être, mère. Il s'y fera.
    Gersende l'attira contre elle. La jouvencelle se grisa du parfum de sa peau, printanier comme ces fleurs odorantes que Gersende glissait sous leurs draps. Odeur d'enfance. Sécurisante. Gersende la berça doucement.
    — Maître Janisse sera content de te préparer ton matinel. Ajoutée à ce drame, l'idée de ton départ prochain le désespère.
    — Je n'ai pas grand-faim, mère.
    — Te laisser périr ne changera rien, ma bécaroïlle.
    Comme Algonde aurait voulu rester là, toujours, entre ces bras épais. Comme sa mère lui manquerait là-bas. Elle s'arracha pourtant à son étreinte.
    — Que sais-tu de la sorcière ?
    Gersende lui sourit.
    — Rien de plus que ce qu'on en dit. C'est une brave femme. Ton père a toujours pensé qu'il était né d'elle, mais elle ne l'a jamais avoué.
    Le front d'Algonde se plissa.
    — J'ignorais qu'il était un enfant trouvé…
    — C'est ma propre mère qui l'a ramassé en bordure du Furon. Nous avons été élevés ensemble à son sein. Nos épousailles allaient de soi. C'était un garçon taciturne, mais nous nous aimions. Un soir, il est rentré du travail, abattu, bougon. Quelque chose s'était passé. Il n'a jamais voulu me révéler quoi. C'est à partir de là que tout s'est dégradé entre nous, qu'il s'est mis à boire.
    — Tu crois que cela pouvait être en rapport avec la sorcière ?
    — Non. Je suis sûre que non. Elle a toujours été bienveillante à notre égard.
    Algonde l'embrassa sur la joue avec tendresse.
    — Dis à maître Janisse que je viendrai. Plus tard.
    — Pourquoi m'as-tu parlé d'elle ?
    — Je te raconterai, lui promit Algonde en se dirigeant vers la porte.
    Fanette l'avait remplacée auprès de Philippine ces jours derniers. La baronne ne l'attendait pas. Algonde avait tout son temps pour résoudre ce mystère et peut-être trouver le moyen d'aider Mathieu à s'accepter.
    Sur le palier, elle se retrouva nez à nez avec Marthe qui descendait en cuisine prendre son matinel. La Harpie lui adressa un sourire grimacier, mauvais.
    Depuis la fenêtre de la chambre de Mathieu, le lendemain de l'agression, Algonde avait vu Marthe s'approcher de l'épervier. Son visage avait trahi son trouble devant la serre amputée du rapace, confirmant ce que les soldats de Dumas avaient révélé. Algonde s'en était réjouie. Ce pavé dans la mare de leurs certitudes à toutes deux prouvait qu'elle ne se trompait pas. Derrière cette prophétie se cachait quelque chose. Ou quelqu'un, autre que les protagonistes qu'on lui avait présentés jusque-là. Le seul moyen de le savoir était de se rendre chez la sorcière. Car Algonde en était convaincue à présent. C'était elle qui détenait les clefs.
    Anticipant quelque fiel en la bouche de Marthe, Algonde la bouscula légèrement. Sans s'excuser, elle s'élança dans l'escalier pour dévaler les marches quatre à quatre.
     
    La sorcière vivait près d'une source, dans une cabane de rondins en plein cœur de la forêt qui couvrait les flancs de la montagne au sud-ouest. On y accédait par un chemin étroit entre les conifères. La jouvencelle s'y engagea à peine franchi le mur d'enceinte du château. Vingt minutes plus tard, elle toquait à la porte vermoulue et noueuse de la masure, si couverte de mousse qu'elle se fondait dans la végétation alentour.
    La porte s'ouvrit.
    — Je t'attendais, lui dit la vieille femme en s'effaçant pour la laisser entrer.
    De mémoire de villageois, la jouvencelle devait être la première à en recevoir le privilège. Une odeur forte d'épices lui piqua les narines à peine se fut-elle avancée. La pièce était sombre, sommairement meublée d'une table encombrée de plantes et de racines, de fruits dans une coupelle, et d'un pichet d'étain qui jouxtait un pot de terre cuite empli visiblement de saindoux. Contre l'un des murs, un coffre ancien aux ferrures ouvragées montait jusqu'à l'appui d'une fenêtre d'une forme incertaine, née de l'intersection des branches tortueuses de la construction. Des étagères basses surchargées de pots de tailles diverses flanquaient les autres parois. Enfants, Algonde et Mathieu s'étaient souvent demandé à quoi pouvait ressembler cet antre.

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