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Le Chant des sorcières tome 1

Le Chant des sorcières tome 1

Titel: Le Chant des sorcières tome 1 Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Mireille Calmel
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visiblement ennuyé de sa méprise.
    — Pardonnez-moi. Je suis le capitaine Richard. Que puis-je pour vous, chevalier ?
    — Me conduire à Rhodes. Je paierai la traversée.
    L'homme hésita.
    — C'est que j'attends déjà des passagers.
    — Ce messire de Montoison, je présume. Et des Turcs…
    Le capitaine serra les mâchoires. Lui, le vieux loup de mer, s'était comporté comme un imbécile. Le matin même, le lieutenant Luirieux, détaché du convoi, était venu annoncer son arrivée prochaine en lui recommandant la plus grande discrétion. S'il laissait repartir ce bougre et qu'il s'épanche, c'est lui qu'on punirait. D'un autre côté, l'embarquer sans en référer… Certes, le lieutenant n'avait pas mentionné le nom de Philibert de Montoison. Mais le capitaine Richard savait que ce dernier n'appréciait guère que ses ordres ne soient pas respectés. Il soupira, ennuyé.
    — Vous trouverez le sire de Luirieux à la taverne des Trois Écus . Voyez-le pour votre affaire. C'est lui qui vous fixera le prix et les conditions du voyage.
    —  Les Trois Écus …
    — C'est celle qui jouxte la tour de la Poudrière.
    Enguerrand hocha la tête et accrocha un sourire à son visage satisfait.
    — Détendez-vous, capitaine. Je suis un homme d'honneur et ne parle ni sous l'emprise de l'alcool ni à la vue d'une bourse déliée…
    Sur ce, il tourna bride et remonta le quai.
    Il trouva Luirieux attablé devant un pot de soupe au lard, au milieu des marins avinés qui louchaient sur le cul des filles de joie en levant leur hanap de cervoise. Il se glissa sur le banc en face du lieutenant après avoir commandé de quoi manger à l'aubergiste, qui le lui avait désigné. Luirieux leva la tête, fronça les sourcils, puis enfourna la cuillère dans sa bouche. Un filet de bouillon glissa le long des fils de sa barbe brune qu'il ne prit pas la peine d'essuyer.
    — J'ai appris qu'un navire était en partance pour Rhodes et que c'est à vous qu'il fallait s'adresser pour embarquer.
    — À quel titre ? demanda Luirieux, aussitôt sur la défensive.
    Ses ordres étaient formels. Se méfier de tous. En espions potentiels.
    — Je souhaite mettre ma lame au service des Hospitaliers. Je suis le chevalier Enguerrand de La Tour-Sassenage.
    Luirieux manqua s'étrangler mais se reprit aussitôt. La ressemblance ne l'avait donc pas trompé. Au vu pourtant de ce que lui avait dit Philibert de Montoison, il doutait que ce dernier soit enchanté de se retrouver flanqué de sa progéniture comme d'un boulet. Autant donc l'éloigner. S'il était de confiance, il ferait sans nul doute une bonne recrue à Rhodes, sinon, il serait toujours temps de le faire disparaître. Luirieux n'était pas de ces êtres qui s'embarrassent de sentiments.
    — Le navire lèvera l'ancre dans trois jours. Si vous êtes ce que vous prétendez, il ne vous en coûtera rien pour la traversée.
    Enguerrand hocha la tête. La menace était claire derrière l'apparente générosité.
    — J'y serai, dit-il en piquant du nez sur l'écuelle fumante qu'une des serveuses venait de lui apporter.
    Luirieux termina la sienne en silence avant de se lever. De toute évidence, il ne tenait ni à faire connaissance ni à se laisser aller à des confidences. L'affaire était donc d'importance, songea Enguerrand, avant de héler l'aubergiste qui passait à portée. Il avait besoin d'une chambre jusqu'au départ. Ce bouge lui convenait aussi bien qu'un autre…
     

35
    L'épervier était mort. Le baron l'avait ramené comme un trophée. Ils avaient battu les chemins avec un leurre que le fauconnier avait préparé pour l'appâter. De longues heures durant, l'oiseau n'avait pas daigné se montrer. Puis, alors que le soir déclinait, il avait surgi de nulle part, s'était mis à survoler leur groupe en lents glissés, les narguant de ses cris, hors d'atteinte. Nul ne s'expliquait pourquoi il avait soudainement choisi de se poser sur un tronc d'arbre décapité, à quelques toises des archers, ni pourquoi il avait écarté les ailes. Ils n'avaient retenu que ses cris perçants, déchirants, tandis qu'il offrait son poitrail à leur vengeance.
    Il était tombé en arrière, emporté par la puissance du tir qui l'avait fauché. Un silence étrange avait succédé, comme si la forêt tout entière s'était mise en deuil et, machinalement, comme l'on fait pour conjurer un mauvais sort, le baron de Sassenage s'était signé. Ensuite le fauconnier était allé le

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