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Le Chant des sorcières tome 2

Le Chant des sorcières tome 2

Titel: Le Chant des sorcières tome 2 Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Mireille Calmel
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volontaire et fier qui fouillait l'horizon sans ciller en dépit de la lumière.
    — Que diraient vos poètes face à tant de beauté ? demanda-t-il.
    — Ils chanteraient l'azur comme une gemme habitée d'or et de lumière, glisseraient quelques vers sur l'éclat larmoyant des cours d'eau, ombreraient les versants d'un souffle de mystère et finiraient par l'espoir né du retour du printemps.
    — Et vous, prince ?
    Djem lui sourit.
    — Je m'attarderais sur l'espoir… d'en découvrir chaque écho…
    Il n'en fallut pas davantage pour que Jacques de Sassenage soit conquis par le personnage.
    — M'accompagnerez-vous demain ? Mon veneur m'a signalé certain cerf dont la ramure ferait un singulier trophée. J'aurai plaisir à vous entendre déclamer sa capture à ma cour.
    L'œil de Djem étincela plus encore. Il courba le front, la main sur son cœur, avant de se tourner de nouveau vers la frondaison des arbres au loin, en inspirant à pleins poumons ce premier vent de victoire et de complicité.
     
    Le lendemain, il se leva avec un allant qu'il n'avait plus éprouvé depuis longtemps. Ses pensées nocturnes avaient accompagné la fuite de Houchang. Même s'il ne pouvait avoir de certitude, son instinct lui assurait que son fidèle compagnon faisait fi des obstacles sur sa route. Il se rendit à la chapelle pour assister à la messe que Guy de Blanchefort allait célébrer à sa mémoire. Aucun des hospitaliers ne manquait et Djem eut même la surprise d'entendre Philibert de Montoison saluer le courage et la valeur guerrière de son ennemi. Cerné par leurs tuniques brodées de la croix blanche, le nez pris dans les vapeurs d'encens, Djem cacha sous un masque de circonstance le plaisir de sa rouerie. Durant quelques minutes même il pria ce Dieu des chrétiens, ce Dieu de sa mère. Pour qu'il apporte la paix au cœur de celle-ci, la protège de Bayezid et permette à Houchang d'atteindre son but.
    Ensuite, il retrouva ses compagnons.
    Seuls Nassouh et Anwar savaient la vérité. Comme Djem, pour mieux donner le change, ils offrirent une fois de plus leurs prières à Allah au milieu de l'aréopage turc sincèrement attristé tandis que les femmes se lamentaient dans la pièce voisine.
    Peu après le déjeuner, arcs et carquois à l'épaule, tous trois enfourchèrent leurs montures et franchirent le corps de garde. Au pied de la forteresse, ils rejoignirent le baron Jacques qui les présenta à ses comparses, une dizaine de seigneurs auxquels il offrait le privilège de sa compagnie. Pas un ne sembla s'offusquer de leur présence, juste surpris de les voir monter à cru. Djem leur offrit le visage carnassier d'un homme bien décidé à montrer sa bravoure.
    Prenant le pas du destrier du baron, il se plaça à sa hauteur et se mit à rire dans le vent.
    — D'où vous vient cette hilarité, prince ? s'étonna Jacques.
    Djem pencha vers lui sa belle tête enturbannée et s'approcha plus encore.
    — Avez-vous déjà vu plus insolite en ce monde, baron ? Musulmans et chrétiens unis par une même traque… Que croyez-vous donc que l'histoire en retiendra ?
    — Le nom de celui qui abattra ce cerf.
    — Alors, décida Djem, ce sera moi.
    Et d'un coup de talon, il détacha son cheval du groupe, le baron sur ses traces.
    Bien vite pourtant, ils durent s'accorder aux mouvements des rabatteurs. À plusieurs reprises les chiens levèrent quelques biches effrayées qui s'échappèrent en désordre dans les sous-bois, bondissant au-dessus des fougères. Djem fut tenté de bander son arc pour le seul plaisir de jauger son adresse, mais ce gibier-là était trop facile à prendre. Il préféra les laisser fuir.
    Il leur fallut quatre heures pour débusquer le cerf. Le groupe se dissémina pour encercler la zone de battue. Jacques de Sassenage avait gardé la compagnie de Djem et du tchélébi. Leurs chevaux abandonnés à l'orée, ils se trouvaient au plus sombre du bois, gênés par la luxuriance des fougères et des troncs resserrés dans un entrelacs de branches feuillues. Avançant à pas comptés, le plus silencieusement possible, l'arc au poing, les deux hommes sondaient avec insistance les alentours. Les yeux rivés au sol, Nassouh traquait comme il aimait à le faire en Anatolie. Brusquement il s'immobilisa et levant les bras à hauteur de poitrine leur fit signe de ne plus bouger.
    Côte à côte, Jacques et Djem suivirent le léger mouvement de sa tête vers une zone plus sombre encore. L'animal était

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