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Le Chant des sorcières tome 2

Le Chant des sorcières tome 2

Titel: Le Chant des sorcières tome 2 Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Mireille Calmel
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jeune, fringant et désormais bien placé. N'as-tu point apprécié de le revoir cet automne ? Il t'a écrit depuis… Non ?
    Philippine haussa les épaules. Leur dernière rencontre remontait à cet après-midi d'octobre où son père les avait amenés à Blois dans son sillage, rendre hommage à Charles VIII et renouveler sa fidélité à sa sœur, la régente Anne de Beaujeu. Page du dauphin au moment de son duel avec Philibert de Montoison au pied des murailles de l'abbaye de Saint-Just, Laurent de Beaumont était resté celui du jeune roi. Certes, il faisait un parti plus acceptable que Philibert de Montoison, mais ne lui avait-elle pas affirmé qu'elle ne l'épouserait pas, fût-il monarque lui-même ? Quant à ses courriers, nombreux, elle avait refusé d'y répondre, jugeant qu'elle avait bien assez de prétendants sous les yeux pour ne pas s'encombrer de ceux qu'elle voulait éviter.
    — Je ne l'aime pas, rétorqua-t-elle, navrée.
    Jacques de Sassenage soupira. Était-ce cette altercation avec son fils qui l'avait éprouvée ou la maladie d'Algonde ? Outre les confidences que celle-ci lui avait faites, Philippine avait deviné que son père lui était particulièrement attaché.
    Restée jusque-là en retrait de leur échange, Sidonie, à qui cela visiblement n'avait pas échappé, s'interposa d'une voix apaisante.
    — Allons, mon époux. Ne la voyez-vous pas, comme nous tous, en peine du drame qui se joue à la Bâtie ? Ne lui encombrez pas le cœur et laissons-la se reposer.
    Jacques lui sourit avec tendresse.
    — Las, vous avez raison ma mie, mais songes-y, Hélène. Nul ne sait ce que le destin nous réserve. Si tu tardes trop à te décider, je ne serai peut-être plus là pour te protéger.
    — Je vous le promets, père, assura la damoiselle dans un nouveau bâillement.
    Malgré l'inconfort du voyage, et le poids de son tourment, ses paupières tombaient.
    Sidonie enroula un bras protecteur autour de ses épaules. Lors, sans plus lutter, Philippine se laissa bercer.
     
    La grande abbesse de l'abbaye de Saint-Just-de-Claix s'attendait à leur visite depuis qu'un courrier signé du baron Jacques lui avait annoncé son intention de ramener ses filles à la Bâtie. Malgré son aversion pour Sidonie, elle devait se montrer. Dès qu'on l'avertit que la voiture du baron pénétrait dans la cour de la vieille forteresse royale, une bouffée de chaleur lui monta aux oreilles, signe chez elle d'une intense contrariété. Elle frotta ses mains moites à son scapulaire, rajusta sa coiffe et, laissant à droite la porte du scriptorium qu'elle venait de quitter, s'engagea dans le corridor. Tout au bout déjà, la voix de Sidonie résonnait. Sans ralentir le pas, la grande abbesse se signa comme on se protège du diable qu'il faut affronter.
     
    Philippine s'inclina devant elle. Elle se sentait ragaillardie par ce somme plombé.
    — Je suis bien aise de vous revoir, révérende mère, lui servit-elle, dans un chaleureux sourire.
    La grande abbesse ne le lui renvoya pas. C'eût été perdre la face devant cette mégère de Sidonie que d'admettre partager le sentiment de la damoiselle. Elle se contenta d'un trop sec :
    — Vous voici bien cernée, Hélène. Vous aviez meilleure mine au couvent.
    Refusant de voir sa peine, elle se tourna aussitôt vers Jacques qu'elle couvrit d'un œil sévère.
    — J'espère que vous ménagerez davantage vos cadettes, messire. Trop festoyer gâte le tempérament…
    — Trop de pénitence aussi. L'auriez-vous oublié ? lui jeta Sidonie avec morgue.
    L'abbesse la foudroya du regard. Cette fois, Jacques s'interposa.
    — Pouvons-nous monter dans votre bureau, ma mère ? Du temps que mon épouse se chargera de mes filles et Philippine d'aller embrasser sœur Albrante, j'aurais à cœur de vous entretenir en privé.
    L'abbesse tressaillit, mais n'en laissa rien paraître. Sidonie aurait-elle parlé ? Non. Ce n'était pas possible. Elle n'y avait aucun intérêt.
    — Si vous voulez bien me suivre… l'invita-t-elle en se dirigeant vers l'ancien donjon, sans voir que le regard de Jacques, attiré par une douce mélopée, avait accroché la fenêtre du dernier étage, et que derrière les voiles du rideau, un visage le fixait.
     
    — Quelle plaie ! lâcha Sidonie lorsqu'elle fut hors de portée.
    Philippine allait renchérir lorsque Albrante parut sur le seuil de l'infirmerie, du bonheur plein les yeux.
    Abandonnant sa cousine sans le moindre remords,

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