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Le Chant des sorcières tome 2

Le Chant des sorcières tome 2

Titel: Le Chant des sorcières tome 2 Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Mireille Calmel
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noués sur la table. Soulevée de chagrin. Le cœur broyé, elle se précipita. S'asseyant à côté d'elle, les reins calés contre le plateau de bois, elle l'attira contre son sein.
    — Allons, allons, ma toute-petite. Dans quel désespoir es-tu là ? Certes tes lettres ne me cachaient rien de ton attachement à cette servante, mais jamais je n'aurais imaginé que ce fût à ce point. Regarde-moi… Allons mon Hélène… Regarde-moi.
    Philippine releva le front.
    — Je ne veux pas la perdre, ma sœur, parvint-elle à hoqueter.
    Le visage d'Albrante se fit grave. Tant d'affliction trahissait de toute évidence des relations contre nature. Son devoir aurait été de les combattre de toute la force de ses principes religieux. Et cependant… pourrait-elle y changer quelque chose? N'avait-elle pas ramené à la vie le sire de Montoison qui le méritait nettement moins que cette Algonde dont les lettres de Philippine rayonnaient ?
    — Il y a bien cet élixir que je t'ai donné à goûter… s'entendit-elle avouer.
    Les traits de Philippine se détendirent.
    — … mais il me faudrait l'examiner pour en juger et j'ignore si la révérende mère me laisserait aller.
    Philippine renifla. Cette seule condition suffisait à tout gâter. Jamais l'abbesse n'y consentirait.
    — Ne puis-je le lui donner moi-même ? Le temps presse !
    Albrante se leva et se mit à arpenter la pièce en moulinant l'air de ses pensées informulées. Même si elle avait toute confiance en sa protégée, elle répugnait à se séparer de la fiole. C'était à elle et à elle seule que la sorcière l'avait confiée. Avec mission de ne jamais s'en séparer. Pourtant… Ne la lui avait-elle pas remise pour sauver Jeanne de Commiers et Philippine elle-même ? Pouvait-on inclure dans cet axioma ceux qui y étaient rattachés ? Tout de même… Une servante… Malgré toute sa charité chrétienne, et Dieu savait à quel point elle en était pourvue, Albrante ne pouvait s'empêcher de songer que cet élixir trouverait tôt ou tard bien mieux à s'employer.
    — Je vous en prie, ma sœur, la supplia Philippine qui devinait en elle le combat que sa raison lui menait.
     
    Elle allait céder lorsque l'on toqua à la porte. Sans attendre d'y être conviée, une moniale la poussa pour entrer. Sœur Albrante tiqua.
    — Un souci, sœur Hildegarde ?
    — L'abbesse m'envoie vous chercher. C'est au sujet de qui vous savez. C'est urgent. Prenez vos médecines… sédatives…
    Albrante se tordit les mains avant de s'activer dans son armoire. Qu'est-ce à dire ? Jeanne n'avait jamais eu besoin de liqueur de pavot. Elle était d'un naturel calme et enjoué. Pourquoi ce jourd'hui ? Se pouvait-il que Jacques de Sassenage en soit responsable ? Après avoir fourré quelques flacons dans un sachet de toile, elle se tourna vers Philippine qui, toute à son propre tourment, ne songeait qu'à la diversion causée par ce contretemps.
    — Je ne serai pas longue. Attends-moi en séchant tes larmes mon Hélène. À mon retour, je te donnerai ce que tu sais…
    — Qui donc est malade ? Ne puis-je vous accompagner pour la réconforter ? demanda Philippine que la solitude en ce lieu attristait davantage encore.
    Albrante esquissa un pâle sourire. Mentir. Encore, toujours. Combien cela faisait-il d'années ? Combien de péchés ajoutés…
    — Tu ne la connais pas. Sœur Jeanne est arrivée chez nous après ton départ. Atteinte de folie, elle vit recluse dans le donjon et ne tolère que moi. Prends patience. Le Seigneur parfois nous attend sur des rives insoupçonnées.
    Forte de cela, elle laissa Philippine méditer.
     
    Sidonie l'avait entendu. Le cri. Presque inhumain. Elle se trouvait dans le dortoir auprès des filles de Jacques qui, sortant de leurs leçons de catéchisme, l'avaient accueillie avec chaleur. L'abbesse les avait prévenues de la décision de leur père et elles étaient impatientes de revenir à la Bâtie. Sans plus attendre, Sidonie les avait invitées à ranger leurs malles. Elles s'étaient figées, les mains chargées de linge, une vague de terreur soulevant le duvet de leurs bras.
    — Restez ici, leur avait ordonné Sidonie avant de se précipiter dans la cour pour s'enquérir de ce qui était arrivé.
    Elle était déserte. Instinctivement, elle leva les yeux vers le dernier étage et la vit. Jeanne. Dodelinant du buste au-dessus du vide comme si elle voulait s'y jeter. Sans réfléchir plus avant, Sidonie se précipita

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