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Le Chant des sorcières tome 2

Le Chant des sorcières tome 2

Titel: Le Chant des sorcières tome 2 Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Mireille Calmel
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dans mes lettres, alors, à la vérité, je ne sais pas trop pourquoi il a accepté de nous accompagner, osa Gersende qui ne voulait pas risquer de voir les espoirs de sa fille déçus.
    Algonde la fixa avec inquiétude. Gersende tordit ses mains.
    — Fanette et lui se sont rapprochés plus qu'il ne faudrait ces temps derniers.
    La gorge d'Algonde se noua. Sans qu'elle en eût conscience, elle cessa de bercer Elora.
    Philippine haussa les épaules.
    — A présent que sa fille est née, je voudrais bien voir que cette Fanette le retienne. Il t'épousera, Algonde. J'y veillerai.
    Ce revirement d'opinion troubla la jouvencelle mais elle se garda de le souligner. De toute évidence, les sentiments que Philippine éprouvait pour Djem n'y étaient pas étrangers. Pour autant, Algonde ne pouvait accepter que Mathieu soit contraint. Ce n'était pas ce qu'elle voulait. Et puis il y avait Marthe. Quand bien même Philippine les laisserait s'aimer, que ferait la Harpie cette fois pour les désunir ? Algonde n'oubliait pas qu'elle avait délibérément accepté de perdre Mathieu pour le sauver. Elle y était prête encore. Malgré Elora. À cause d'Elora.
    — Vous ne ferez rien, dame Hélène, décida-t-elle en les embrassant d'un sourire apaisé.
    — Non ? s'étonna Philippine.
    — Non. Il faut savoir laisser les gens que l'on aime libres de leurs destinées. C'est un bien précieux que la liberté. Je ne veux pas que Mathieu en soit privé.
    Philippine baissa les yeux, les joues rosées du remords que ce constat appelait. À moins que ce ne fût un reproche détourné que sa chambrière lui adressait. Elle ne s'en offusqua pas. Il était mérité. Du plat de la main, elle lissa un mauvais pli pris par sa robe de soie jaune diaprée durant sa chevauchée aux côtés de son frère. Elle se sentit lasse soudain. La journée tirait à sa fin et elle avait eu son content d'émotions. Elle releva son nez légèrement retroussé.
    — Il en sera comme tu le voudras, Algonde. Sache que je ne mettrai aucun obstacle cette fois à ce que tu regagnes Sassenage si ton bonheur doit s'y trouver.
    Algonde se mit à rire. Vrai, sa maîtresse avait bien changé.
    — Nous n'en sommes pas là, dame Hélène. Attendons d'abord de voir de quel bois Mathieu veut me chauffer.
    Elle se leva et déposa Elora dans les bras de sa grand-mère qui venait de rattacher sa natte pour reprendre un peu d'allure, malgré la poussière du voyage.
    — Profite d'elle encore un peu. Quant à vous, damoiselle Hélène, si pour une fois vous me faisiez l'honneur de m'assister. J'aurais besoin de quelqu'un pour lacer mon corset…
    Philippine ouvrit des yeux ronds.
    — Moi ? Mais…
    Le rire d'Algonde reprit de plus belle tandis qu'elle ajoutait en clignant un œil complice :
    — Si j'en crois les dires du sire de Montoison, je ne vois guère que Francine pour chaque jour empoisonner mon brouet. Je ne serai pas fâchée de la surprendre parée et ressuscitée lorsqu'elle viendra me porter mon dîner.
    Cette idée sembla plaire à Philippine. Ébrouant sa fatigue, elle abandonna Gersende qui gloussait et babillait d'incompréhensibles onomatopées à l'intention de la petiote. Tout en se disant que Louis serait furieux de savoir à quel jeu elle allait se prêter, la damoiselle de Sassenage suivit sa chambrière dans le cabinet de toilette. À peine le rideau de velours tapissier retombé pour les isoler, elle en fut récompensée par le plus langoureux des baisers.
    *
    Le silence avait repris ses droits au cœur des ruines de l'ancien ermitage. Pour autant, à regarder son ami et son fils, le front pareillement baissé sur l'intense réflexion qui avait suivi son aveu, Jacques de Sassenage pouvait assimiler au sien dans son oreille le battement sourd de leurs cœurs. Il se racla la gorge et, le pourpoint humide, quitta l'appui de la porte contre laquelle il s'était adossé. Il avait froid soudain. De leur immobilisme. Du fardeau de son passé. Ces quatre derniers jours ne lui avaient laissé aucun répit. Remontant le temps, ses souvenirs s'étaient évertués à traquer l'inconcevable, à révéler les faux-semblants et à éclairer les non-dits de Marthe. Bien plus que les événements eux-mêmes qu'il venait de relater à son fils et à son ami, c'était le résultat de ses propres investigations qui lui coûtait.
    — Jusqu'à ce jour, sachez que mon abattement fut semblable au vôtre, reprit-il en s'avançant jusqu'à eux.
    L'un et l'autre,

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