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Le cheval de Troie

Le cheval de Troie

Titel: Le cheval de Troie Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Colleen McCullough
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voilà qui n’arrive pas tous les jours.
    — Je préférerais qu’on évite ce sujet, dit mon père d’un ton sec, en pinçant les lèvres.
    — Dommage qu’elle soit plus belle que Clytemnestre.
    — Clytemnestre plaît à Agamemnon.
    — Dommage alors qu’il n’y ait pas deux grands rois à Mycènes.
    — Il y a trois autres grands rois en Grèce.
    Mon père commençait à faire preuve de sens pratique.
    J’allai me cacher dans l’ombre, craignant de me faire remarquer et d’être chassée. Le sujet de la conversation – moi – était bien trop intéressant. J’aimais à entendre dire que j’étais belle. Surtout quand on prétendait que j’étais plus belle que Clytemnestre, ma sœur aînée, qui avait épousé Agamemnon, grand roi de Mycènes et grand roi de toute la Grèce. Jamais je ne l’avais aimée ; quand j’étais petite, elle me terrifiait lorsqu’elle arpentait les grandes salles en proie à une de ses rages célèbres ; sa chevelure de feu était dressée sur sa tête, ses yeux noirs lançaient des éclairs. Elle devait donner bien du mal à son mari quand elle piquait ses colères, tout grand roi qu’il fût. Cependant Agamemnon paraissait de taille à la maîtriser.
    Mais pour l’heure, on parlait de mon mariage.
    — Je ferais bien d’envoyer des hérauts à tous les rois, suggéra mon père.
    — Oui et le plus tôt sera le mieux. Que penses-tu de Philoctète ?
    — C’est un homme remarquable, promis à un brillant avenir, dit-on. Cependant il est roi de Thessalie, ce qui signifie qu’il doit rendre hommage à Pélée et à Agamemnon. Je songe plutôt à Diomède, de retour de la campagne de Thèbes, couvert de richesses et de gloire. Argos a l’avantage de n’être pas très loin. Si Pélée avait été plus jeune, je l’aurais choisi sans hésiter, mais on dit qu’il refuse de se remarier.
    — Inutile de s’attarder sur ceux qui ne peuvent être des prétendants, rétorqua ma mère. Mais il y a Ménélas.
    — Comment l’oublierais-je ?
    — Invite-les tous. Les héritiers aux trônes aussi bien que les rois. Ulysse d’Ithaque est roi, maintenant que le vieux Laërte est sénile. Et Ménesthée est un grand roi d’Attique bien plus sûr que ne l’était Thésée. Remercions tous les dieux de ne pas avoir affaire à Thésée !
    Je sursautai.
    — Que veux-tu dire ? demandai-je, frémissante.
    Au fond de mon cœur, j’avais espéré que Thésée viendrait me chercher et me demanderait en mariage. Depuis mon retour d’Athènes je n’en avais pas entendu parler. Ma mère me prit les mains et les serra fort.
    — Mieux vaut que ce soit nous qui te l’apprenions, Hélène. Thésée est mort, il a été exilé et tué à Scyros.
    Je me dégageai violemment et quittai la pièce en courant. Mes rêves s’écroulaient. Thésée était mort. Mort  ? Était-ce possible ? Une partie de moi venait de mourir à jamais.
     
    Deux lunes plus tard, mon beau-frère Agamemnon arriva, en compagnie de son frère, Ménélas. Quand ils entrèrent dans la salle du trône, j’étais présente, en ma qualité de sujet de toutes les conversations. Des messagers accourus de la porte du palais nous avaient avertis. Aussi le grand roi de Mycènes et de toute la Grèce fit-il son entrée au son des trompes. On avait déroulé sous ses pas un tapis tissé d’or.
    Jamais je ne sus dire si Agamemnon m’était sympathique ou pas. Je comprenais cependant en quoi il était impressionnant. Il était grand et se tenait droit, en guerrier, se déplaçant comme si le monde entier lui appartenait. Quelques fils d’argent apparaissaient dans ses cheveux de jais. Ses yeux noirs savaient se faire implacables et menaçants, son nez était fortement busqué ; quant à ses lèvres, minces et relevées aux commissures, elles exprimaient le dédain.
    On voyait rarement des hommes si bruns en Grèce, où les gens sont généralement blonds. Cependant, loin d’avoir honte de la couleur de ses cheveux, Agamemnon en était fier. Bien que la mode fût au menton bien rasé, il arborait une longue barbe noire bouclée et torsadée à l’aide de rubans d’or. Il portait un long manteau de laine pourpre dont les broderies au fil d’or dessinaient des motifs compliqués et, dans sa main droite, il tenait le sceptre royal en or massif, qu’il maniait avec autant de dextérité que s’il eût été en bois.
    Mon père descendit de son trône et s’agenouilla pour lui baiser la main, lui

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