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Le cheval de Troie

Le cheval de Troie

Titel: Le cheval de Troie Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Colleen McCullough
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Diomède, tu oublies que le grand guerrier, c’est toi !
    — C’est qu’il ne s’agit pas de champ de bataille. Non, non, ce que je veux, c’est te voir à l’œuvre. Je veux savoir comment tu te domines. Je veux que quelqu’un m’enseigne comment me maîtriser car je me laisse trop souvent emporter par la colère. Et je crois que ton calme finirait par déteindre sur moi.
    — Considère mes quartiers comme les tiens, Diomède, dis-je, touché par sa simplicité. Aligne tes navires auprès des miens, déploie tes troupes auprès des miennes et accompagne-moi au cours de mes missions. Tout homme a besoin d’un ami. C’est l’unique remède contre la solitude et le mal du pays.
    Il me tendit la main par-dessus les flammes, sans remarquer qu’elles léchaient sa peau, et je lui étreignis l’avant-bras pour sceller notre pacte. Nous dûmes nous endormir peu après, car à mon réveil le jour était levé et le vent faisait gémir la mâture des navires. Diomède poussa un grognement.
    — Mes os me font plus mal encore, annonça-t-il en s’asseyant.
    — Ils ne t’avaient hélas pas trompé. Dehors, c’est la tempête.
    Il se leva avec d’infinies précautions pour aller jeter un œil entre les rideaux.
    — Le vent souffle du septentrion, dit-il, je sens la neige. On ne pourra lever l’ancre aujourd’hui, à moins de vouloir atteindre les rives égyptiennes…
    Un esclave entra avec un nouveau brasero et de l’eau chaude pour nous laver. Une autre apporta des gâteaux au miel, du pain de seigle, du fromage de chèvre et du vin chaud. Agamemnon ne tiendrait pas conseil avant midi, aussi prîmes-nous le temps de savourer le repas et la chaleur du feu avant de nous rendre auprès du grand roi.
    Le visage d’Agamemnon était aussi sombre et tourmenté que le ciel. Il était furieux et contrarié de l’effondrement de tous ses projets. La coïncidence était certes troublante : une tempête le jour même de notre départ, après deux lunes de beau temps…
    — J’ai fait appeler Calchas pour qu’il augure de l’avenir, dit-il sèchement.
    Nous sortîmes, emmitouflés dans nos manteaux pour affronter la tempête. Les pattes entravées, la victime gisait déjà sur l’autel de marbre. Et Calchas était vêtu de pourpre ! De pourpre  ? Agamemnon devait avoir une haute opinion de lui pour lui accorder ce privilège ; que s’était-il donc passé durant mon absence ?
    C’était la première fois que je voyais Calchas à l’œuvre, et je dus admettre qu’il s’y prenait assez bien. Ses mains tremblantes pouvaient à peine lever le poignard quand il trancha d’un mouvement saccadé la gorge de l’animal. Il faillit ensuite renverser le calice doré destiné à en recueillir le sang qu’il répandit, fumant, sur le marbre froid. Puis il éventra l’animal et se mit à lire dans ses entrailles à la façon des prêtres d’Asie Mineure. Ses mouvements étaient rapides mais syncopés. Il fit soudain volte-face, le visage cireux et la respiration sifflante.
    — Écoutez, ô rois de Grèce ! La volonté de Zeus, le Tout-Puissant m’a été révélée à l’instant ! Il s’est détourné de vous ! Il refuse de donner sa bénédiction à votre entreprise ! Sa furie est telle que je n’ai pu en connaître le motif, mais j’ai vu Artémis à ses pieds, le suppliant de demeurer inflexible. Je ne puis rien voir d’autre, tant sa rage m’épouvante !
    Je m’attendais à un tel discours, mais l’allusion à Artémis était fort habile. Le visage du prêtre exprimait une souffrance atroce et, à ma grande surprise, sincère. Cet homme m’étonnait, il semblait réellement croire à ce qu’il disait – même si vraisemblablement il avait tout concocté d’avance. Non, tu n’as pas encore terminé ton numéro, me dis-je. J’attendais la suite…
    Au pied de l’autel, Calchas fit brusquement demi-tour, écarta les bras et rejeta la tête en arrière, le regard dirigé vers une fourche du platane. Un nid se trouvait là, un oiseau brun en train d’y couver.
    Le serpent dissimulé sous l’autel se mit à ramper jusqu’à la branche. L’air vorace, il dardait un regard glacial sur le nid. Calchas joignit les mains et désigna le nid ; nous assistions au spectacle en retenant notre souffle. Le reptile ouvrit les mâchoires, avala l’oiseau puis dévora ses œufs un à un. Je les comptai : six, sept, huit, neuf.
    Son repas terminé, il s’immobilisa, enroulé autour de la

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