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Le cheval de Troie

Le cheval de Troie

Titel: Le cheval de Troie Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Colleen McCullough
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géant, encore plus grand que mon ravisseur, approchait sans hâte.
    — Pourquoi ne pas l’aider toi-même ? dit-il.
    — Et la laisser filer ? Ajax ! Celle-ci a du caractère, je ne puis me fier à elle.
    — Serais-tu amoureux, cousin ? Il est grand temps que tu t’éprennes de quelqu’un d’autre que Patrocle.
    Sur ce il m’écarta comme une simple plume puis, sans lâcher sa hache, dégagea le corps de mon père. Il me fixait de ses yeux sans vie et sa barbe disparaissait au creux d’une entaille au travers de sa poitrine : un coup de hache.
    — C’est le vieux qui m’a affronté. Honorable vieillard, il s’est battu comme un lion ! s’exclama Ajax d’un ton admiratif.
    — Tel père, telle fille, répondit celui qui me tenait. Allons-y, me dit-il, je n’ai pas le temps de te laisser te lamenter.
    Je me levai maladroitement et saluai mon père. Il valait mieux partir en sachant qu’il était mort plutôt que me demander chaque jour s’il avait survécu, espoir insensé. Ajax s’éloigna pour rassembler les survivants, bien qu’il doutât en trouver aucun.
    Nous nous arrêtâmes à la porte de la cour et mon ravisseur ôta la ceinture d’un cadavre gisant sur les marches. Il attacha la lanière de cuir autour de mon poignet et fixa l’autre extrémité à son propre bras.
    — Ainsi ce n’est pas toi qui as tué mon père…
    — Si, c’est moi, répondit-il. Je suis celui qu’Énée a fui. Je suis donc responsable de toutes les morts.
    — Comment t’appelles-tu ?
    — Achille, répondit-il, tirant sur la ceinture et me forçant à courir pour le suivre.
    Achille. J’aurais dû le savoir. Énée avait été le dernier à prononcer ce nom, mais cela faisait des années qu’il était sur toutes les lèvres.
    Nous quittâmes Lyrnessos. Les Grecs entraient et sortaient par la porte principale, pillaient et violaient les femmes. Certains avaient des torches à la main, d’autres des outres à vin. Achille prétendit ne pas les avoir vus et ne prit pas la peine de les réprimander. En haut de la route, je me retournai pour contempler la vallée de Lyrnessos.
    — Tu as brûle ma demeure. J’y ai vécu vingt ans, et j’espérais y rester jusqu’à ce qu’on décide de mon mariage. Jamais je n’ai songé qu’une telle chose pût arriver.
    -- Les hasards de la guerre, femme, dit-il en haussant les épaules.
    Je désignai du doigt les minuscules silhouettes des soldats en train de piller.
    — Ne peux-tu les empêcher d’agir comme des bêtes ? Tout cela est-il vraiment nécessaire ? J’ai entendu les hurlements des femmes, l’ai tout vu !
    — Que sais-tu donc des Grecs, de leurs sentiments ? Je comprends ta haine, mais ces hommes haïssent Troie et ses alliés plus encore ! Priam leur a valu dix ans d’exil et ils prennent plaisir à les lui faire payer. Je ne pourrais les arrêter même si j’essayais. Et franchement, femme, je n’en ai nulle envie.
    — Cela fait des années que j’entends ces histoires et pourtant j’ignorais ce qu’est vraiment la guerre, murmurai-je.
    — À présent tu le sais.
    Son camp était à une lieue de là ; lorsque nous y arrivâmes, il héla un officier d’intendance.
    — Polidès, voici la prise que je me réserve. Prends la ceinture et attache-la à une enclume jusqu’à ce que tu puisses fabriquer de meilleures chaînes. Ne la quitte pas un instant, même si elle exige d’être seule pour se soulager. Une fois enchaînée, conduis-la en un lieu où elle aura tout le nécessaire, de la nourriture, un bon lit, sans oublier un vase pour ses besoins. Pars dès demain pour Andramyttios et confie-la à Phénix. Dis-lui bien qu’on ne peut lui faire confiance, qu’il ait toujours un œil sur elle. Adieu, femme, ajouta-t-il en me pinçant la joue.
    Polidès trouva des chaînes légères pour mes chevilles, rembourra celles des poignets et m’emmena sur la côte à dos d’âne. Là, il me remit à Phénix, un noble vieillard qui se tenait très droit, au regard bleu et à la démarche chaloupée typique des marins. Quand il vit mes fers, il fit claquer sa langue, mais n’essaya pas de me les enlever une fois qu’il m’eût installée à bord du navire amiral. Il me pria aimablement de m’asseoir. J’insistai pour rester debout.
    — Je suis désolé pour les chaînes, dit-il l’air chagriné. Pauvre Achille…
    Ainsi son chagrin allait-il uniquement à Achille ! Je n’appréciai guère que le vieil homme eût

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