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Le Coeur de la Croix

Le Coeur de la Croix

Titel: Le Coeur de la Croix Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: David Camus
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réception dans l’ordre : « C’est une rude chose que de se faire
serf du Temple, lorsque l’on est son propre sire. Car à grand-peine ferez-vous
jamais ce que vous voudrez : si vous voulez être en Terre sainte, on vous
en renverra ; si vous voulez être à Acre, l’on vous enverra en la terre de
Tripoli, d’Antioche ou d’Arménie, en Pouille ou en Sicile, en Lombardie, en
France ou en Bourgogne, en Angleterre ou en plusieurs autres terres où nous
avons des maisons et des possessions. Et, si vous voulez dormir, on vous fera
veiller ; et si vous voulez quelquefois veiller, on vous commandera
d’aller vous reposer dans votre lit. Quand vous serez à table et que vous
voudrez manger, l’on vous commandera d’aller où l’on voudra et vous ne saurez
jamais où. »
    « Quelle ironie ! » songeait-il, un fin
sourire aux lèvres. Et dire qu’autrefois il était le plus indiscipliné des cinq
enfants de son père. Incapable de suivre la moindre leçon sans bayer aux
corneilles, se moquant des précepteurs et filant courir la ribaude à la
première occasion !
    Mais il avait jugé le Temple, où son frère Arnaud venait
d’être reçu, digne de sa personne. Doté d’une discipline assez exigeante pour
« mériter » de faire de lui un homme. Il avait voulu le plus
difficile, il l’avait. Il forcerait son corps, il contraindrait sa tête, il
obligerait son cœur, il éduquerait son âme à se soumettre et à servir Dieu. Il
répéterait à longueur de journée avec ses frères templiers : Non nobis
Domine, non nobis sed nomini Tuo da gloriam ! – « Non pour
nous, Seigneur, non pour nous, mais pour Ton nom, donne la gloire ! »
    S’il était, lui, le plus jeune des cinq fils du comte
Étienne de Roquefeuille, capable de se plier à une règle voulue par Dieu et
appliquée par les hommes, alors tous le pouvaient. D’abord sa famille, ensuite
ses proches. Puis les Mahométans et les Juifs, qu’il convertirait de force ou
détruirait sans pitié, et enfin tous les autres chrétiens, melkites, jacobites,
coptes, nestoriens, maronites… qui vivaient loin de la loi de Rome.
    Redouter Dieu ne suffisait pas. Il fallait craindre Rome, la
supérieure, la grande. La terrible Rome.
    Elle seule était capable d’imposer au monde d’être sauvé par
Dieu, le Christ et le Saint-Esprit. Elle seule avait suffisamment de force pour
manier ces deux puissants glaives : le Temple et l’Hôpital. Simon ne
comprenait pas pourquoi Rome avait décidé de n’en garder qu’un, mais il s’était
juré : « Je serai de celui-ci. Je le serai pour Dieu, je le serai
pour mon père. »
    Et, tandis qu’il montait la garde en haut du donjon de La
Fève, il se gonflait d’orgueil et ressentait un plaisir inouï en repensant à
son parcours et à la discipline de fer qu’il s’était imposée. Peu d’hommes
avaient fait ce qu’il avait fait ! Il était entré dans l’ordre du Temple
avec la ferme intention de devenir le plus humble et le meilleur des Templiers.
Rien de ce à quoi on le soumettait n’était assez dur pour lui. Une chose
pourtant lui était insupportable : attendre ! D’abord un an dans le
diocèse de Troyes, à la commanderie de Bonlieu, puis deux années
supplémentaires dans celle de Coulommiers-en-Brie, quand il fut fait chevalier.
    Sa chance était venue avec le désastre de Hattin. La Terre
de promission manquait de chevaliers au bras fougueux, impatients d’en découdre
avec les Sarrasins. Oh, comme son cœur avait bondi quand il avait appris qu’on
l’envoyait enfin « là-bas » ! Dans cette terre dont il n’osait
plus prononcer le nom par crainte de ne pas être digne de la fouler. « Ô
Dieu en moi ! Je dois être fort. Gloria, laus et honor Deo in
excelsis !  » disait-il en tremblant tant l’excitation le tenait,
tant sa joie était grande d’aller enfin combattre en Terre absolue.
    Certainement, l’heure du martyre n’était pas loin. Son
écuyer et lui devaient s’y préparer.
    Une huissière du Temple avait quitté Marseille en les
emmenant dans son gros ventre vert et les avait débarqués en compagnie d’autres
frères, chevaliers, sergents et écuyers, à Tripoli. Simon s’y distingua dès le
premier jour en s’écriant, sitôt à terre : « Nous sommes là pour te
servir, ô Seigneur ! » De la commanderie de la ville, où il ne resta
pas longtemps parce que ses remarques incantatoires en irritaient plus d’un, on
l’envoya à la puissante

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