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Le Coeur de la Croix

Le Coeur de la Croix

Titel: Le Coeur de la Croix Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: David Camus
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Je ne peux pas partir sans
elle !
    — Vous l’aurez, le rassura Guillaume.
    — Je veux vous montrer…, poursuivit Morgennes. J’ai
réussi, je veux que vous voyiez les larmes d’Allah…
    — Mais je vous crois. Autrement, vous ne seriez pas
guéri… De toute façon, j’ai foi en vous.
    — Nous y sommes ! s’exclama Yemba.
    Morgennes regarda autour de lui : ils se trouvaient
dans une immense bibliothèque. Son plafond disparaissait à des hauteurs insondables,
accessibles uniquement par des échelles le long desquelles des augustiniens
suspendus à des câbles se laissaient glisser.
    — Quoi ! fit Morgennes. C’est ici ? La
mine ?
    — Oui, dit Guillaume. Pourquoi, cela n’en a pas
l’allure ?
    Morgennes ne répondit rien. Il se contenta de poser la croix
contre un immense panneau de bois, creusé de milliers d’ouvertures, recelant
chacune un parchemin. Une étiquette attachée par une ficelle permettait
d’identifier d’un coup d’œil la nature du rouleau, son origine, son contenu.
Ailleurs, des jarres étaient emplies non pas de vin, mais d’autres parchemins.
Plus loin, dans des wagonnets posés sur des rails, des livres aux pages grises
s’entassaient, entremêlant leurs sombres couvertures de cuir.
    — C’est magnifique ! dit Morgennes. Mais alors,
les mines d’or et d’argent, tout ça, ce n’est qu’une légende ?
    — Non, répondit Guillaume. C’est un point de vue… L’or
et l’argent des Moniales proviennent bien de cet endroit. Du savoir contenu
dans ces écrits. Ici, vous avez des recettes de potions aphrodisiaques, là, de
préparations pour soigner les brûlures d’estomac ; ailleurs, de remèdes
pour les maux de tête, les cors aux pieds, les verrues, la mauvaise haleine, la
goutte au nez, les rhumatismes, les panaris, la pourriture pourpre du pénis, la
fièvre des marais, les écrouelles… Sans compter les formules permettant de
fabriquer crèmes et onguents pour se prémunir contre le vieillissement ou
différents péchés, tels l’avarice, l’orgueil, la luxure, l’envie, la colère, la
paresse… Pour la gourmandise, malheureusement, il n’y a rien à faire… Peut-être
qu’un jour…
    — C’est incroyable, dit Morgennes.
    Puis Yemba les mena vers d’autres galeries, à la voûte
basse, et où les torches étaient interdites – on ne s’y déplaçait qu’avec
des lanternes à capuchon fermé. Ce que Morgennes venait de voir n’était que la
première partie d’une longue série de tunnels, qui tous semblaient se prolonger
à l’infini.
     
    Taqi donna de violents coups de sabre à droite, et couvrit
son flanc gauche avec son bouclier. Rawdân ibn Sultân le talonnait, le
harcelant mieux qu’une bête enragée : le cheik des Maraykhât était, comme
Taqi, un cavalier hors pair. Il était sur le point de frapper le neveu de
Saladin avec son glaive empoisonné, lorsqu’un javelot d’or lui traversa la
bouche, le faisant tomber de selle. Zénobie, montée sur une gazelle
caparaçonnée d’or, en avait débarrassé Taqi, qui la remercia de la main. La
reine courba la tête, puis lui lança, avant de repartir vers d’autres
adversaires :
    — Vous ne devez pas rester ici ! Ils en ont après
vous, partez ! Fuyez ! C’est un ordre !
    Mais Taqi ne pouvait se résoudre à battre en retraite. Déjà,
il recommençait à se battre avec acharnement, faisant voler de tous côtés son
sabre serti de pierres précieuses, parant les coups avec son petit bouclier en
forme de cœur.
    Cassiopée, dont la monture avait reçu au poitrail un violent
coup de lance, avait sauté de selle et gagné le refuge d’une guérite en
hauteur, d’où elle tirait à l’arbalète sur les Maraykhât. À côté d’elle,
quelques Moniales envoyaient des billes de fronde d’un genre particulier :
elles explosaient en répandant un nuage de poudre vomitive ou soporifique,
forçant les Maraykhât à rompre le combat ou à s’effondrer, perclus de fatigue.
(Les Amazones, elles, étaient immunisées.) Soudain, elle aperçut Simon :
il courait, tel un fou furieux, la Vraie Croix dans les mains.
    Dès le début du combat, Simon s’était précipité vers la
chambre où les Moniales avaient remisé la Vraie Croix – du moins, celle
qu’il appelait ainsi (en fait la croix de Hattin). C’était l’occasion ou jamais
de l’essayer au combat ; et, puisque les Moniales étaient chrétiennes, il
avait pensé que la vue du Saint Bois les inspirerait. Il

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