Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen
Le Coeur de la Croix

Le Coeur de la Croix

Titel: Le Coeur de la Croix Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: David Camus
Vom Netzwerk:
firmament et éclatèrent en plusieurs fragments, qui retombèrent en
pluie d’étoiles filantes sur les Sarrasins.
    Une dizaine de pierres creusèrent autant de trous profonds
dans les faubourgs de Jérusalem, y enterrant à tout jamais quelques soldats,
fracassant même l’une des galeries que des hommes poussaient vers les remparts.
    Puis ce fut au tour de deux longues lances de prendre leur
essor. L’une d’elles traversa un cavalier et sa monture, qu’elle cloua
définitivement à terre – comme un insecte sur une planche de bois ;
l’autre se perdit dans l’azur.
    L’onagre avait été placé au beau milieu du marché, vidé de
ses étalages. Pour faire bonne mesure, les servants avaient ajouté aux rochers
leurs ordures – car c’était, désormais, la seule façon de les sortir de la
ville.
    Des tombereaux d’immondices s’élancèrent donc à l’assaut du
ciel, avant de retomber en une giboulée pestilentielle sur la tête des
Sarrasins.
    Les efforts de ces derniers durèrent toute la journée. Aux
cris de Allah Akbar des milliers de fantassins coururent à l’assaut des
murailles et s’y fracassèrent, pressés par les rangs suivants. À l’abri de leur
bouclier, ils cherchaient à gagner les remparts, profitant du plus petit angle
mort – ou moins bien défendu. Certains parvenaient à y poser leurs
échelles ou à en approcher de lourdes tours de bois – contre lesquelles
les défenseurs tiraient des flèches enflammées. Mais les tours avaient été
protégées par des peaux de bêtes et des cordages aspergés de vinaigre, et le
feu prenait mal. L’une d’elles, cependant, qui avait reçu à son sommet la
pierre d’une catapulte, bascula vers l’arrière et s’effondra. Terrorisés par le
fracas de bois brisés, les Sarrasins qui la servaient se jetèrent dans le vide
et s’empalèrent sur les piques de leurs camarades. Par centaines, des archers à
cheval faisaient pleuvoir une nuée de flèches sur les murailles de
Jérusalem ; mais celles-ci n’étaient pas, comme les hommes, capables de
reculer. Elles restaient immobiles ; et, si leurs protecteurs venaient à
mourir – de minuscules ailes noires plantées dans la poitrine –,
d’autres prenaient aussitôt leur place, poussant de grands cris, crachant des
injures, bavant comme des bêtes, faisant des gestes obscènes, jetant des
pierres, des sacs, des chaises, des bancs, enfin, tout ce qui leur tombait sous
la main – y compris leurs vêtements, chemise, bottes, chapeau, ceinturon.
Parfois, pris de folie, c’était un camarade, hurlant s’il n’était que blessé,
silencieux s’il était mort, qu’on propulsait par-dessus les remparts. Ceux qui
ne jetaient rien tiraient à l’arc ou à l’arbalète, et ceux qui n’avaient rien à
lancer, pour ne pas être en reste, crachaient par-dessus les créneaux ou y
grimpaient pour montrer leurs fesses aux Sarrasins.
    À la tombée du soir, les troupes de Saladin reculèrent, sans
avoir réussi à passer la porte de Damas. Quelques vaillants guerriers étaient
bien parvenus à poser le pied sur les remparts, mais les Hiérosolymitains
avaient, avec de longues perches, renversé leurs échelles. Ces braves avaient
péri en martyrs, tâchant d’emporter dans leur mort le plus de chrétiens
possible, laissant un cercle de cadavres autour d’eux.
    Balian lui-même, malgré ses blessures, avait tranché d’un
violent coup d’épée la gorge d’un de ces audacieux.
    — Combien de guerres, combien de combats, devrai-je
encore voir avant de mourir ? se lamentait-il.
    Il était las de ces combats.
    Les hommes pour lesquels il se battait le rebutaient un peu.
Beaucoup étaient gras et ne défendaient pas, comme lui, la cité de Dieu mais
plutôt leur commerce, leur maison, leur famille. « Et après tout, pourquoi
pas ? » se disait Balian, qui pensait cependant : « Un
commerce, une maison, une famille, cela se déplace. Le Saint-Sépulcre,
non. »
    Il n’acceptait pas qu’on puisse avoir pour sa boutique le
même amour que celui qu’il avait pour le lieu où le Christ avait tant souffert.
    Voyant reculer les troupes de Saladin, il donna l’ordre
d’arrêter le combat. Et, quand le soleil se coucha, il comprit un fait
d’extrême importance, et qui expliquait – en partie – l’échec des
Mahométans : ils s’étaient battus, la journée durant, le soleil dans les
yeux. Leurs adversaires n’avaient été pour eux que des taches sombres sur

Weitere Kostenlose Bücher