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Le Coeur de la Croix

Le Coeur de la Croix

Titel: Le Coeur de la Croix Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: David Camus
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l’Hôpital ; plus importante que
la mort de centaines de leurs chevaliers et de milliers de leurs soldats ;
que tous les prisonniers et les otages que nous avons faits. Plus importante
que tout, car c’est leur Dieu que nous avons capturé !
    Les Sarrasins s’interrogeaient : « Comment peut-on
adorer ça ? » Certains riaient, d’autres singeaient la
crucifixion : ils écartaient les bras, inclinaient la tête, tiraient la
langue en signe d’agonie, et se laissaient tomber par terre en râlant. On
chassa ces farceurs à coups de pied.
    — Sans elle, à Montgisard, Baudouin IV était
perdu ! poursuivit Saladin. Sans elle, aujourd’hui, les Franjis sont
perdus !
    Un tonnerre d’acclamations salua ses paroles.
    — Allah est grand ! Allah est unique ! Il est
le seul Dieu !
    Dieu était incandescent. La chaleur était montée. On aurait
dit que l’ancien volcan de Hattin se réveillait, joignant ses forces à celles
des Mahométans.
    — Afin que notre victoire ne soit jamais oubliée, j’ai
donné l’ordre d’élever une stèle.
    Il montra du doigt une petite construction de forme
circulaire, commencée dans la journée. Un échafaudage l’entourait.
Curieusement, alors que les murs n’avaient pas fini d’être montés, une croix de
bois se dressait au sommet de l’édifice. Elle était à peu près aussi large que
la Vraie Croix était grande. Au dessous d’elle, deux hommes encagoulés de noir,
munis de maillets et de clous de fer, gardaient les bras croisés sur la
poitrine. C’étaient des bourreaux.
    — Gabriel m’a dit, reprit Saladin : « Dieu
t’attendait. » Il m’a dit : « Aucune maison n’a plus de mérite
que la tienne. » Il m’a dit : « C’est aux Ayyubides que revient
l’honneur de rendre Jérusalem à l’Islam. » Il m’a dit : « Et
c’est à toi, Saladin, qu’il revient d’unir tous les Mahométans sous une même
bannière ! »
    Les Syriens, les Égyptiens, les Yéménites et les Nubiens
scandèrent le nom de Saladin. Les autres, des bédouins pour la plupart, ou ceux
qui venaient de Bagdad, ne dirent rien. Une ombre était passée sur leur visage.
Alors Saladin ordonna à Sohrawardi :
    — Dis-leur ce que les djinns t’ont révélé !
    — Tu prendras la ville, ô Splendeur de l’Islam. Mais tu
perdras un œil !
    Un murmure monta de la foule.
    — Cela dût-il me coûter les deux yeux, déclara Saladin,
que j’irais quand même !
    On l’acclama. Il imposa le silence et poursuivit, d’une voix
vibrante de colère et d’émotion :
    — Tous les croyants n’étaient pas là, hier, à
Hattin ! Où étaient-ils ? Où étaient les vrais Mahométans ? Ceux
qui tardent à venir en aide à l’Islam ne cueilleront pas les fruits du
paradis ! Le jihad est le devoir personnel de tout Mahométan. Pourquoi la
maison des Ayyubides est-elle la seule à se battre ?
    Il parcourut du regard ceux qu’il considérait comme les
siens – les Syriens, les Égyptiens, les Nubiens, les Yéménites –,
dans leur uniforme blanc au dos duquel étaient brodés des versets du Coran.
Ceux-là, il les aimait. Puis il défia du regard les bédouins et ceux qui
venaient de Bagdad. Parmi eux se trouvaient quelques chefs de tribus
importantes. Mais beaucoup étaient restés chez eux, attendant pour se déplacer
de connaître l’issue de la bataille. Parmi les plus courageux se trouvaient
Dahrân Ibn Uwâd, le jeune cheik des Kharsa, une tribu de deux mille
tentes – il n’avait pas treize ans, mais plaisait déjà beaucoup aux
femmes ; Nâyif ibn Adid, l’impétueux cheik des Muhalliq, une tribu de trois
mille tentes – un grand amateur d’art qui n’aurait pour rien au monde raté
un combat ; Matlaq ibn Fayhân, le mystérieux cheik des Zakrad, une tribu
de huit cents tentes – qui formait les meilleurs fauconniers du
monde ; et enfin, bien qu’il fût, comme à son habitude, arrivé au tout
dernier moment des hostilités, Rawdân ibn Sultân, le voluptueux cheik des
Maraykhât, une tribu de mille cinq cents tentes – qui se déplaçait avec
moult femmes, et s’abreuvait de vin.
    Au moins seize autres tribus, représentant quelque trente
mille tentes, avaient ignoré l’appel lancé le mois précédent par Saladin. Pour
lui, c’était une insulte. Il s’enflamma :
    — Tous doivent se joindre à nous ou périr comme des
chiens, dans le désert ! Allez dire à toutes les tribus, à toutes les
maisons, de rallier ma

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