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Le combat des ombres

Le combat des ombres

Titel: Le combat des ombres Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Andrea H. Japp
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où se fondre dans la masse, recruter des nervis et ourdir des stratagèmes.
    – Alençon et Chartres. Authon-du-Perche serait d'une rare imprudence. Quant à Mortagne, la ville est de taille modeste. Un étranger y est bien vite repéré. Je me charge d'Alençon, François.
    – Et je m'occupe de Chartres. À vous revoir très vite, mon ami.
    – À Dieu plaise.
    1 Affineur de métal qui transforme les barres en feuilles avant de les livrer aux fabricants d'objets.

Château d'Authon-du-Perche, Perche, octobre 1306
    Un silence accablant. La clarté parcimonieuse d'un glacial après-midi d'hiver. L'odeur lourde et âcre des cierges. L'usure glissante des dalles noires. L'écho d'un pas.
    Francesco de Leone avançait, frôlant le déambulatoire de l'église. Son manteau noir orné d'une large croix blanche à huit branches soudées deux à deux effleurait ses bottes de cuir.
    Il suivait la silhouette qui se déplaçait, à peine trahie par le bruissement d'une étoffe, l'épais cendal d'une robe. Une silhouette de femme, une femme qui se dérobait, presque aussi grande que lui. La lumière des cierges se reflétait par intermittences sur la vague ondulée de sa chevelure. De longs cheveux qui dissimulaient sa taille, tombant jusqu'aux mollets, se confondant avec la soie de sa robe. D'un blond cuivré, évoquant le miel. Un essoufflement pénible faisait haleter Leone. Pourtant, le froid givrait ses lèvres.
    Il tentait d'essuyer la sueur qui lui trempait le front, s'éraflant aux mailles de son gantelet. Pourquoi le portait-il ? S'apprêtait-il à livrer combat ?
    Ses yeux s'étaient accoutumés à la demi-pénombre. Profitant de la faible lumière qui filtrait du dôme, et de celle, incertaine, des cierges, il fouillait l'ombre qui estompait les contours des piliers, absorbait les murs. De quelle église s'agissait-il ? Quelle importance ? Elle était de taille modeste. Pourtant, il suivait sa circonférence depuis ce qui lui semblait une éternité.
    Il avait pris la femme en chasse. Pourquoi ? Elle ne fuyait pas, se contentant de maintenir la distance qui les séparait. Elle le précédait de quelques pas, semblant anticiper ses mouvements, longeant le déambulatoire extérieur pendant qu'il suivait l'intérieur.
    Il s'immobilisait. Un pas, un seul, elle s'arrêtait à son tour. Le souffle serein de la femme lui parvenait. Il repartait. L'écho jumeau reprenait aussitôt.
    La main de Francesco de Leone descendait doucement vers le pommeau de son épée, pourtant une infinie tendresse lui noyait le cœur. Il regardait, incrédule, sa main enserrer la boule de métal. De puissantes veines saillaient sous une peau qui s'était affinée et que des rides cisaillaient. Il avait tant vieilli.
    Soudain, la certitude d'une autre présence, tapie dans l'obscurité. Une présence de sang et de meurtre. Une présence impitoyable. Non, repliées dans les ténèbres qui avalaient les absidioles, plusieurs présences malfaisantes. La femme s'était immobilisée. Avait-elle perçu les ombres féroces ? Un murmure : « À ma garde, chevalier, pour l'amour de Dieu tout-puissant. » Une main féminine, pâle, frôlait la manche de son bliaud 1 long, le faisant frissonner d'un ravissement presque insoutenable. L'autre disparaissait dans les plis de sa robe pour réapparaître aussitôt, enserrant l'éclat d'argent d'une courte épée. Ainsi, elle était armée. Il chuchotait : « Ma vie pour vous, madame. Ma vie avec joie » et se retournait avec lenteur vers elle. La soie jaune safran de sa robe tendue sur son ventre. Elle était enceinte. Prête au combat afin de protéger l'enfant qu'elle portait. C'était l'enfant à naître que les spectres maléfiques voulaient détruire. Le regard de Leone remontait jusqu'au fin visage triangulaire, jusqu'au regard pers qui scrutait l'obscurité menaçante. Il connaissait ce visage. Il le connaissait si bien. Pourtant, il était incapable de préciser où il l'avait rencontré.
    La courte épée se levait, pointant à l'est, vers l'une des absidioles qui parsemaient la circonférence de l'église. Un murmure sans hargne :
    –  C'est la femme qu'il faut abattre. C'est elle leur donneuse d'ordres. Pourtant, elle a presque oublié qu'elle était du côté du mal.
    Leone fronçait les sourcils, incertain. Il se dirigeait à pas lents vers la petite chapelle. Une profusion de cierges dissipait un peu les ténèbres. À genoux en prière devant une statue de Vierge

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