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Le Conseil des Troubles

Le Conseil des Troubles

Titel: Le Conseil des Troubles Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Frédéric H. Fajardie
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trouver des excuses, elle comprit les raisons de son comportement. Ses seules interlocutrices étaient les actrices du théâtre qui ne variaient guère leurs sujets de conversation ni ne s'intéressaient à autre chose qu'à l'argent et au pouvoir, si bien que le duc lui avait permis de s'épancher sur des sujets qui lui étaient chers.
    Bamberg n'avait point manoeuvré pour arriver à pareil résultat, sa bonne foi était totale car il ne s'estimait pas un sujet de conversation présentant le moindre intérêt quand tout ce que disait sa ravissante hôtesse le passionnait.
    Au reste, à travers tout cela se dessinait le portrait de Marion de Neuville, jeune femme fort émouvante livrée à la solitude et qu'il imaginait mal en épouse résignée de quelque marchand ou magistrat.
    Officier de cavalerie, il alla seller lui-même Pégase, ignorant l'avis contraire de Marion qui affirmait que son vieux cheval ne supportait pas une main étrangère posée sur lui. Cependant, après que le duc lui eut flatté l'encolure, et malgré sa manière presque brutale en l'extrême précision des gestes, le cheval ne protesta pas, comme s'il s'agissait là d'une vieille habitude.
    C'est alors que la jeune femme s'enquit :
    — Vous êtes certain que votre cheval se trouve en les parages ?
    Il lui sourit sans répondre, ôta un de ses gants gris puis, introduisant deux doigts en sa bouche, siffla avec conviction.
    On entendait déjà, mais sans rien voir en raison du brouillard, un bruit de sabots lorsque Bamberg réalisa que sa manière manquait totalement de distinction. Il esquissa un pauvre sourire :
    — Je suis terriblement désolé... Siffler son cheval fait partie des détestables habitudes de la cavalerie...
    Elle lui rendit son sourire :
    — Je ne trouve pas cela détestable, tout au contraire. M'apprendrez-vous ?
    — Bien volontiers.
    Hautain, beau et grand cheval bai brun, parut, discipliné.
    Bamberg, par ses quatre sorties, ayant montré ses aptitudes à se diriger malgré l'épais brouillard, la jeune femme trouvait là bon prétexte à ne point refuser de se faire accompagner jusqu'au théâtre ce qui, au fond, la ravissait. Cependant, très vite, les événements prirent un autre tour et l'on passa du plaisir à l'utilité car à la vérité, on n'y voyait pas à deux mètres.
    Dans cet univers cotonneux, tout paraissait inquiétant, surtout les bruits dont on ne pouvait identifier la source. L'accident, la mort peut-être, pouvait se présenter au premier carrefour à ceci près qu'à chaque fois, l'officier de dragons qui chevauchait à ses côtés prévenait : « Attention, cavalier », « Attention, attelage de quatre chevaux, laissons passer », « Attention, deux petits enfants traversent la rue ».
    Et toujours, pendant les deux ou trois secondes où elle y voyait, il s'avéra que Bamberg prédisait très exactement ce qui allait se produire.
    À la fin, elle n'y tint plus :
    — Mais comment faites-vous ?
    Il sembla un instant embarrassé avant de répondre :
    — C'est mon métier, c'est ma vie et elle tient à cela : voir et entendre avant les autres.
    Elle lui jeta un long regard, trouvant l'explication un peu courte...

30.
    Un jeune garçon se précipita, surgissant du brouillard, et ouvrit la porte du carrosse :
    — Elle arrive, monsieur le comte. La baronne de Neuville arrive. Elle n'est point seule.
    Stupéfait, Charles de Lagès-Montry descendit de voiture en hésitant puis, d'une voix sèche:
    — Qui l'accompagne ?
    — Un officier des dragons, j'ai parfaitement reconnu l'uniforme. C'est étrange, il porte un sac de cuir à l'épaule et il en sort une tête de chien.
    Le général des mousquetaires parvint difficilement à surmonter sa mauvaise surprise. Déjà pointait en son coeur quelque chose de douloureux oscillant entre tristesse et jalousie :
    — Quel air me chantes-tu là, crétin? Es-tu bien certain qu'il s'agissait de la baronne de Neuville ? Et quel est cet officier des dragons assez stupide pour transporter ainsi un chien? Eh quoi, dois-je t'arracher chaque mot, mauvais drôle?
    Le jeune homme à l'esprit vif comprit immédiatement qu'il n'avait point été porteur de bonnes nouvelles. Il songea un instant travestir la vérité, la magnifier en le sens qu'attendait, qu'espérait M. le comte de Lagès-Montry mais d'autre part, il savait que le couple n'allait pas tarder à sortir du brouillard, révélant sur l'instant au comte toute l'étendue de son infortune.
    Lagès-Montry eut

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