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Le Crime De Paragon Walk

Le Crime De Paragon Walk

Titel: Le Crime De Paragon Walk Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Anne Perry
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qui auraient hanté
sa solitude, l’auraient privé de sommeil, il aurait fini par commettre quelque
acte insensé avant de sombrer. Quand Forbes avait interrogé les servantes, aucune
n’eut à se plaindre du comportement de Diggory. Il y avait certes eu des
avances, mais sans forcer le consentement des intéressées. Et les rares refus
avaient été accueillis avec humour et résignation.
    Non, selon toute vraisemblance, Diggory était exactement ce
qu’il prétendait être.
    Et George ? Pitt savait à présent pourquoi il s’était
montré aussi évasif au départ. Il avait été simplement trop soûl pour se
rappeler où il était allé… et trop gêné pour le reconnaître. Peut-être la
frayeur lui servirait-elle de leçon, du moins vis-à-vis d’Emily ?
    Freddie Dilbridge. En ce moment même, il lui tournait le dos,
mais Pitt l’avait observé tandis qu’il remontait l’allée derrière le cercueil. Son
visage anxieux reflétait la confusion plutôt que la peine. Si peur il y avait, c’était
la peur de l’inconnu, de l’inexplicable, et non la peur ordinaire de quelqu’un
qui sait précisément où est le mal et quelle en sera la rétribution.
    Il y avait cependant quelque chose chez Freddie qui dérangeait
Pitt. Il n’avait pas encore déterminé quoi. Les soirées orgiaques n’étaient pas
une exception. Les gens qui s’ennuyaient, délivrés de la nécessité de gagner
leur pain ou même de gérer leurs biens, des gens dépourvus d’ambition s’amusaient
parfois à satisfaire leurs propres penchants, voire les tendances excentriques
de leur entourage. Le voyeurisme n’était pas une nouveauté, qui s’accompagnait
souvent d’un petit chantage moral, histoire de prouver qu’on était le plus fort.
    Ce tableau correspondait bien à l’idée qu’il se faisait d’Afton
Nash. Il sentait chez lui une cruauté, une propension à jouir de la fragilité d’autrui,
surtout la fragilité sexuelle. Il était tout à fait capable de sacrifier aux
goûts qu’il méprisait, pour le plaisir de savourer son propre sentiment de
supériorité. Pitt n’avait jamais rencontré de personnage plus antipathique. Être
victime de ses fautes, aussi ineptes fussent-elles, cela, il le comprenait. Mais
se régaler et tirer profit de la faiblesse d’autrui ne suscitait chez lui pas
la moindre once de compréhension.
    Debout à la tête de la tombe, Afton fixait le pasteur d’un regard
dur et sombre. Il est vrai qu’il avait enterré un frère et que sa sœur avait
été assassinée en l’espace d’un court été. Se pouvait-il que, suprême hypocrite,
il eût violenté et tué sa propre sœur, puis poignardé son frère pour garder le
secret ? Était-ce la raison pour laquelle Phœbe se décomposait de terreur
sous leurs yeux, glissant de l’extravagance vers la folie ? Seigneur miséricordieux,
si c’était le cas, Pitt se devait de le démasquer, avec preuves à l’appui, et
de le faire enfermer. Il n’était pas partisan de la pendaison. C’était pourtant
chose courante, l’un des moyens mécaniques de la société de se purger de son
mal ; néanmoins, il trouvait cela répugnant. Il en savait trop sur les
crimes, sur la peur ou la folie qui les engendraient. Il avait vu et senti la
misère noire, les morts et les maladies innombrables dues à la faim dans les
quartiers pauvres, et il savait qu’il existait des assassins aux mains propres,
une extermination à distance que la société du profit aveugle ne voyait même
pas. On mourait de faim à cent mètres des morts par obésité.
    Cependant, si jamais Afton était coupable, il était prêt à l’envoyer
à la potence sans trop de scrupules.
    Le Français, Paul Alaric, était là également, à supposer qu’il
fût réellement français. Peut-être venait-il des colonies africaines ? Il
était bien trop raffiné, trop ironique et subtil pour être originaire des
grandes plaines venteuses et neigeuses du Canada. On sentait un très long passé
derrière lui : Pitt l’imaginait mal appartenant au Nouveau Monde. Tout en
lui évoquait des siècles de civilisation, des racines plongeant au cœur même d’une
vieille culture, d’une histoire riche et obscure.
    Sa tête brune baissée contre le vent qui forcissait, il était
beau et distingué même dans ce cimetière. Son attitude était celle du respect
pour le mort, de la courtoise observance des coutumes. Etait-ce la seule raison
de sa présence ici ? Pitt ne lui connaissait aucun

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