Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen
Le Dernier Caton

Le Dernier Caton

Titel: Le Dernier Caton Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Matilde Asensi
Vom Netzwerk:
merci, répondit Farag.
    — Alors, allons directement à l’auberge, nous vous montrerons vos chambres.
    Il nous examina des pieds à la tête.
    — Trois chambres, n’est-ce pas ? À moins que l’un de ces deux-là ne soit ton mari, ma petite.
    Je souris.
    — Non.
    — Et pourquoi êtes-vous venus en hélicoptère ? voulut savoir le nonagénaire avec une curiosité infantile.
    — Pour gagner du temps, dit le capitaine, qui marchait lentement par égard pour les deux vieillards.
    — Ah ! vous devez être bien riches, tout le monde ne peut se permettre ce mode de transport.
    Et les deux moines rirent de bon cœur comme s’il s’agissait de la meilleure plaisanterie du monde. Nous échangeâmes discrètement quelques regards étonnés : ou ces stavrophilakes étaient d’excellents comédiens ou nous nous étions complètement trompés d’endroit. Je les observai en essayant de détecter le moindre signe de duplicité, mais leurs visages ridés ne reflétaient qu’une innocence totale, et leurs sourires francs paraissaient absolument sincères. Avions-nous commis une erreur ?
    Nous avançâmes jusqu’à l’auberge tandis que les moines nous racontaient sommairement l’histoire du couvent. Ils étaient très fiers des fresques byzantines qui décoraient le réfectoire et du bon état de conservation de l’église, tâche à laquelle ils consacraient toute leur vie, en plus de l’accueil des rares randonneurs qui parvenaient jusque-là. Ils voulurent savoir comment nous était venue l’idée de visiter cet endroit et combien de temps nous comptions y rester. Bien sûr, ajoutèrent-ils, nous étions invités à partager leur repas, et si nous étions satisfaits, il serait bon, puisque nous étions riches, de laisser quelque chose pour l’abbaye. Et, sur ces mots, ils se remirent à rire comme deux enfants joyeux.
    Tout en bavardant ainsi, nous passâmes devant un petit potager où un autre moine, âgé lui aussi, était penché sur une pelle qu’il enfonçait à grand-peine dans la terre.
    — Père Giuliano, cria un de nos hôtes, nous avons des invités !
    Le moine mit la main en visière au-dessus de ses yeux pour mieux nous voir, et émit un grognement.
    — Le père Giuliano est notre abbé. Allez le saluer, nous recommanda-t-il à voix basse. Il vous gardera sans doute un petit moment, nous allons donc vous attendre à l’auberge. Quand vous aurez terminé, suivez ce sentier et prenez à droite. Vous ne pouvez pas vous tromper.
    Le capitaine commençait à montrer des signes d’impatience et de mauvaise humeur. Le sentiment de nous être trompés, de perdre notre temps, se faisait de plus en plus net. Ces moines ne répondaient pas, et de loin, à l’image des stavrophilakes que nous nous étions forgée. Mais il est vrai qu’en y réfléchissant bien, nous disposions de très peu d’éléments de comparaison. En réalité, nous n’en avions vu qu’un avec certitude, notre jeune Éthiopien, parce que les deux autres, le sacristain de Sainte-Lucie et le curé malodorant de Sainte-Marie in Cosmedin, pouvaient être parfaitement innocents.
    Les moines disparurent par le sentier tandis que l’abbé, la main posée sur sa pelle, nous contemplait en silence, immobile et digne comme un monarque sur son trône.
    — Combien de temps pensez-vous rester ? nous demanda-t-il à brûle-pourpoint quand nous fûmes à sa hauteur.
    — Peu de temps, répondit le capitaine sur le même ton.
    — Que venez-vous faire ici ?
    Le ton de sa voix indiquait qu’il s’agissait bien d’un interrogatoire. On distinguait mal son visage recouvert d’une capuche.
    — Observer la flore et la faune, répondit aussitôt le capitaine.
    — Profiter du paysage, mon père, et du calme, ajouta Farag d’un ton plus conciliateur.
    L’abbé tint la pelle entre ses deux mains et, lui donnant une forte poussée, la planta de nouveau dans la terre.
    — Allez à l’auberge. On vous y attend.
    Confus et étonnés de ce bref échange, nous reprîmes le chemin en sens inverse. Le sentier menait à un chemin ombragé et devenait de plus en plus étroit.
    — Quels sont ces arbres si hauts, Kaspar ?
    — Il y a un peu de tout, dit le capitaine sans lever les yeux. Des chênes, des frênes, des ormes, des peupliers… Mais ces espèces ne sont pas si hautes en général. Il est possible que la composition du terrain soit très riche, à moins que les moines ne soient parvenus à créer des espèces

Weitere Kostenlose Bücher